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COPTES (VERSIONS) DE LA BIBLE


lents coptes ; soit enfin que l’usage les ait mis sans autre raison sur le même pied que ceux-ci. Il n’est pas rare de trouver un mot de la version grecque rendu par un autre mot également grec ; le traducteur a même poussé parfois la fantaisie jusqu'à employer tour à tour l'équivalent copte et le mot grec dans un même passage pour exprimer un même mot de son original. Cette particularité de la langue copte la rendait très apte à traduire exactement des textes grecs. Ajoutez que le copte, ayant un article défini et un article indéfini, avait sous ce rapport une grande supériorité sur d’autres langues, telles que le latin et le syriaque. D’un autre côté, Lightfoot (Scrivener, Introduction, t. ii, p. 124) fait justement remarquer certains défauts de la langue copte, comme le manque d’une voix passive, et du verbe avoir. Ainsi pour àiie<Trâ>[iEvoç, le copte dit « celui qu’ils ont envoyé » ; pour e^b), « il est à moi, » comme dans les langues sémitiques. — Malgré cela la langue copte est, en règle générale, plus apte que toute autre langue à traduire littéralement le grec, et on peut s’en servir, avec discernement, cela va sans dire, là où les autres versions ne sont d’aucun secours.

Passons maintenant à l’examen des différentes versions.

i. version bohaïrique. — 1° Ancien Testament. — Les seuls travaux de critique textuelle que nous ayons sont ceux qu’un savant catholique allemand, A. Schulte, a récemment publiés, en se basant sur l'édition des Prophètes de Tattam, Die Koptische Uebersetzung der Vier grossen Prophète », , Munster, 1893, et Die Koptische Uebersetzung der kleinen Prophelen, dans la Theolorjische Quartalschrift, 1894 et 1895. D’après M. Schulte, la version bohaïrique des petits Prophètes se rattache à la recension des Septante, représentée par les manuscrits m, xil, 22, 23, 26, 36, 40, 42, 49, 51, 62, 86, 91, 95, 97, 106, 114, 130, 147, 153, 185, 228, 233, 238, 240, 310, 311, et les éditions Complute et Alexandrine. Dans certains passages pourtant elle se rapproche de la version de saint Jérôme (qu’il ne faut pas confondre avec la Vulgate). Ailleurs, par exemple Ose., viii, 4 ; Joël, ii, 11 ; iii, 9 ; Am., viii, 3 ; ix, 7 ; Mich., iii, 1 ; vi, 3 ; Hab., iii, 13 ; Zach., i, 1 ; Mal., iii, 5, elle se rapproche de la Vulgate ; saint Jérôme, dans son second travail, ayant préféré sans doute les leçons de l’ancienne Italique, qu’il avait écartées dans son premier travail. Quelques leçons de la version bohaïrique s’accordent avec l’hébreu contre les manuscrits grecs, et on serait tenté de croire à une revision de cette version sur le texte massorétique ; mais après tout ces leçons proviennent peut-être de manuscrits grecs que nous ne connaissons pas. Mûnter, Spécimen, p. 7, avait déjà remarqué que le passage de Jérémie, cité par saint Matthieu, xxvii, 9-10, et qu’on ne lit dans aucun manuscrit de l’hébreu ni des Septante, se trouvait dans les deux versions coptes. Tuki, Rudimenta lingux copiai, p. 245. Tattam, Prophetx majores, t. i, p. vi, observe qu’on ne le voit dans aucun des manuscrits bibliques, mais bien dans les manuscrits liturgiques de la Pàque, en particulier dans le manuscrit B. M. add. 5997, qui est du xme siècle, et dans un autre manuscrit qui appartenait à ce savant. Voici la traduction latine qu’il en donne : Iteruni dixit Jeremias Pashori : Eritis aliguando cum patribus vestris répugnantes veritati, et filii vestri venturi post vos, isti facient iniquitatem magis abominandam quam vos. Nam ipsi dabunt pretium pro eo, cui nullum est pretium. Et nocebunt ei qui sanat morbos, et in remissionem peccatorum. Et accipient triginta argenteos in pretium ejus quem tradent filii Isrælis. Et ad dandum id, pro agro figuli, sicut mandavit Dominus. Et ita dicent : Veniet super eos judicium perditionis in xternum et super filios eorum quia condemnaverunt sanguinem innocentent. Tuki cite ce passage comme le ꝟ. 4 du chapitre XX, mais d’après Woïde il faudrait le placer à la fin du même chapitre.

2° Nouveau Testament. — Telle que nous la possé dons dans la plupart des éditions et dans les manuscrits récents, dit M. Headlam (Scrivener, ouvr. cit., t. ii, p. 127), la version bohaïrique du Nouveau Testament concorde dans l’ensemble avec les manuscrits grecs les plus anciens. Sans doute elle présente aussi un nombre assez considérable des additions que l’on retrouve dans le texte traditionnel, mais, comme l’a remarqué Lightfoot, ces additions n’appartiennent pas à la version bohaïrique primitive : remarque dont la correction se vérifie de jour en jour. Voir Sanday, Appendices ad Novum Teslamentum, append. iii, p. 182 et suiv. Le texte bohaïrique original représente donc une traduction très pure, exempte des additions dites occidentales, que l’on rencontre dans la version sahidique, et l’on a peine à croire qu’elle puisse être plus récente que celle-ci. Et si le christianisme s’est répandu en Thébaïde dès le commencement du nie siècle, époque à laquelle la critique textuelle assigne l’origine de la version sahidique, il nous faut certainement admettre une date plus ancienne encore, tant pour l'évangélisation du Delta que pour la composition de la version bohaïrique. — Voir, fig. 334, le fac-similé du recto du feuillet 60 de la version copte du Nouveau Testament (Bibliothèque des Bollandistes à Bruxelles), contenant le commencement de l'évangile de saint Marc.

il. version sahidique. — 1° Ancien Testament. — Notre seule source d’information pour la critique textuelle de cette partie de la version sahidique est l’ouvrage déjà plusieurs fois cité de Ma r Ciasca, Sacrorum Bibliorum fragmenta. Le savant augustin a fait dans la préface du volume u un examen minutieux des fragments les plus considérables publiés dans ce même volume, particulièrement de Job, des Proverbes, de l’Ecclésiaste, d’Isaïe, d'Ézéchiel, de Daniel et des petits Prophètes. Voici en peu de mots ses conclusions. La version de Job nous a conservé très purs les Septante d’avant Origène. Quatre manuscrits sur cinq, xxiv, xxv, xxxm et xcix de Zoega (le dernier est un Lectionnaire), omettent 362 versets, qu’Origène avait fait passer avec l’astérisque dans la version des Septante. Il est donc évident que cette version a dû être faite avant le temps d’Origène, ou en tout cas avant que la recension d’Origène ne se fût répandue (et l’on sait par saint Jérôme avec quelle rapidité elle se répandit). De là on peut conclure sans témérité que les versions d’autres livres de la Bible d’un usage plus usuel que le livre de Job, les Psaumes, par exemple, et les Évangiles, sont également antérieures à Origène.

La version sahidique n’a pourtant pas échappé à l’influence des Hexaples. On découvre de nombreuses traces de cette influence dans le cinquième manuscrit dont Ma r Ciasca s’est servi pour son édition du livre de Job, Bodl. Hunt. 5 (Lectionnaire), dans la version des Proverbes, dans celle de l’Ecclésiaste et aussi, mais à un moindre degré, dans la version d'Ézéchiel, qui en revanche semble avoir été revisée sur la version bohaïrique. La version d’Isaïe suit fidèlement les Hexaples. Daniel, comme en bohaïrique, est emprunté à la version de Théodotion. Les petits Prophètes ont été souvent corrigés sur l’hébreu. Il y a donc ou une recension de la version sahidique, mais cette recension a eu lieu plus tard que celle des versions grecques. Cette recension est-elle celle d’Hesychius, dont parle saint Jérôme, Prssfat., in Paralip., t. xxviii, col. 1324? M9 r Ciasca le laisse à décider à plus compétent que lui. En tout cas, il n’hésite pas à attribuer une grande importance à la version sahidique pour la critique textuelle des Septante, et donne à propos du livre de Job un certain nombre d’exemples du parti qu’on peut en tirer sous ce rapport.

2° Nouveau Testament. — Mùnter, Commentatio de indole versionis sahidiese Novi Testamenti, Copenhague, 1784, a été le premier à examiner le texte de la version sahidique du Nouveau Testament. Voici le résumé de ses observations ; elles sont limitées aux fragments de la collection Borgia. 1° La version des Évangiles s’accorde