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COLLYRE

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II. Le collyre dans l’antiquité avant l’ère chrétienne. — L’usage des collyres, beaucoup plus ancien que le mot relativement récent par lequel on désigne aujourd’hui encore ces médicaments, remonte à la plus haute antiquité.

1° Égyptiens. — À une époque très reculée, les Égyptiens se servirent de collyres, comme l’attestent les papyrus et les étuis à collyre. LePapyrus Ebers, Dos hermetische Buchàberdievrzeneimittelderalten Aegypter, trouvé vers 1860, à El-Assasif, près de Thèbes, et qu’on

fait remonter à l’an 1550 avant J.-C, contient, pi. 54-64, des recettes pour les collyres. Le Musée du Louvre possède un étui à collyre (fig. 313), composé de quatre cylindres réunis en faisceau autour d’un cylindre central. Il est en bois de cèdre, haut de 57 millimètres. Sur deux des côtés, en visà-vis, est un trou peu profond, ayant servi d’un côté à fixer, de l’autre à arrêter un couvercle plat qui s’ouvrait en pivotantsurlui-même (H. Thédenat, Note sur un étui à collyre égyptien conservé au Musée du Louvre, in-8°, Paris, 1881). Chacun des compartiments porte une inscription indiquant la nature ou les vertus du collyre qu’il était destiné à contenir : 1° <i Bon collyre. » — 2° « Bon pour la vue. » — 3° « Repousser le sang. » — 4° « Repousser la douleur. » L’étui a conservé les petits bâtonnets en bois dont l’extrémité arrondie en forme d’olive servait à introduire le collyre sans risquer de blesser l’œil. M. Pierret rapporte ce petit monument à la XVIIIe ou XIXe dynastie, c’est-à-dire de 1800 à 1500 ans avant J.-C. — Dans plusieurs étuis à collyre égyptiens, on a retrouvé des restes desséchés de ces préparations, et l’analyse a fait retrouver du plomb, du fer, du bioxyde de manganèse, de l’oxyde de cuivre et, contrairement à l’opinion commune, très rarement de l’antimoine, etc. Voir A.Wiedemann, Aegyptologische Studien : Die Augenschminke Mesdem, Bonn, 1889 ; X. Fischer, Uéber die cheniisclie Zusammensetsung altàgyplischer Augenschminken, dans VArchiv fur Pharmacie, t. ccxxx, 1892, p. 9 ; K. B. Hoffmann, Ueber Mesdem, dans les Mitlheilungen des Vereins der Aertze in Steiermark, n° s 1 et 2, 1891 ; Florence et Loret, Le collyre noir et le collyre vert trouvés dans le tombeau de la princesse Noub Hotep, dans J. de Morgan, Fouilles à Dahchour, in-4°, Vienne, 1895, p. 153-164.

2° Assyriens. — Les maladies d’yeux n’étant pas aussi fréquentes en Assyrie qu’en Egypte, les collyres étaient sans doute moins recherchés par les Assyriens, du moins comme remèdes. Hérodote, iii, 1, raconte que Cyrus demanda à Amasis et obtint de ce roi l’envoi à sa cour du meilleur des médecins oculistes de l’Egypte. Avant l’époque de Cyrus, les étuis à collyre étaient connus sur les bords du Tigre. M. Babelon (dans le Bulletin des antiquaires de France, 1895, p. 180) en a reconnu un dans un objet

313.

— Étui a collyre égyptien. Musée du Louvre.

trouvé à Khorsabad, par Botta, en 1846, et conservé aujourd’hui au Cabinet des médailles, à Paris (fig. 314). Il est en serpentine, haut de 77 millimètres, large de 66 et épais de 20. Ses faces sont décorées de figures en relief.

3° Hébreux. — Les Hébreux durent connaître les collyres par les Égyptiens, qui en faisaient si grand usage.

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311. — Étui à collyre assyrien. Cabinet de France.

Dans l’Ancien Testament, il n’en est question que commeingrédient pour peindre les yeux afin d’en relever la beauté. II (IV) Reg., ix, 30 ; Jer., iv, 30 ; Ezech., xxiii, 40. Voir l’explication de ces passages, t. i, col. 672-673. — Le livre de Tobie, vi, 5 ; xi, 4, 7-8, ’13-15, raconte que ce saint personnage fut guéri de la cécité au moyen du fiel

315. — Vase à collyre. Cabinet de France.’Iâaovoç Xuxcov : « Collyre lycium de Jason. » Corpus inscr. grsec. 5779. Trouvé- à Tarente.

316. — Coupe du même vasS* montrant la partie creuse qui contenait le collyre. — Grandeur de l’original.

d’un poisson du Tigre. Nous verrons plus loin que le fiel des animaux entrait dans la composition de certains collyres. Les commentateurs admettent, les uns, que la guérison de Tobie fut naturelle ; les autres, qu’elle fut l’effet d’un miracle. Voir Calmet, Commentaire littéral, Esdras, Tobie, Paris, 1722, p. 299-300. Quoi qu’il en soit, il est curieux de rapprocher du récit du livre de Tobie l’inscription gravée sur une des tranches d’un cachet d’ocu-