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CHÈVRE — CHEVREAU

vaient être offertes dans les sacrifices. Quand le Seigneur voulut sceller son alliance avec Abraham, il lui fit immoler trois animaux de trois ans, une vache, une chèvre et un bélier. Gen., xv, 9. On offrait des sacrifices pacifiques de chèvres. Lev., iii, 12-16. L’holocauste d’une chèvre était prescrit quand un homme du peuple tombait dans un délit par ignorance, Lev., iv, 28 ; Num., xv, 27, et quand on avait fait un serment frivole. Lev., v, 6. Néanmoins on ne pouvait offrir l’animal que le huitième jour après

sa naissance. Lev., xxii, 27.

H. Lesêtre.
    1. CHEVREAU##

CHEVREAU (hébreu : gedî, « qui coupe et arrache » la verdure dont il se nourrit ; une fois gedyyâh, la chevrette, Cant., i, 7 (hébreu, 8) ; Septante : eptço ; , èpiçiov ; Vulgate : hsedus), le petit de la chèvre. Il occupe une place assez notable dans la Sainte Écriture. — 1° Tout d’abord, il servait dans les sacrifices. Num., xv, 12. Après sa captivité, Darius ordonna à ses satrapes de fournir aux Juifs des veaux, des agneaux et des chevreaux pour les holocaustes. I Esdr., vi, 9. La victime pascale devait être « un mâle sans tache, d’un an, d’entre les brebis et d’entre les chèvres ». Exod., xii, 5 (hébreu). L’usage prévalut de choisir pour le repas solennel de la Pâque un agneau plutôt qu’un chevreau. Néanmoins Josias fait distribuer

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265. — Offrande d’un chevreau. Cylindre chaldéen.

D’après J. Menant, Recherches sur la glyptique orientale,

t. i, p. 163-164.

au peuple trente mille agneauxet chevreaux pour un festin pascal. II Par., xxxv, 7. Jusque dans les derniers temps, il fut loisible de substituer le chevreau à l’agneau, ce qu’on faisait sans doute quand il y avait quelque difficulté à se procurer la victime habituelle. On lit dans le Talmud : « Si quelqu’un dit à son disciple : Va et sacrifie-moi la Pâque, et que celui-ci sacrifie un chevreau, qu’il en mange. » Pesachim, viii, 2. Le sacrifice du chevreau et sa présentation au dieu sont figurés sur les cylindres chaldéens et les bas-reliefs assyriens (fig. 265). Cf. Botta, Monument de Nivive, t. i, pi. 43 ; Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, 1895, t. i, p. 681. — 2° Un chevreau servait de salaire ou de présent. C'était un salaire honteux, dans le cas de Juda et de Thamar, Gen., xxxviii, 17, 20, 23 ; un salaire honorable, quand il rémunérait le travail de la femme de Tobie. Tob, II, 20. On payait parfois en chevreaux le champ qu’on avait acheté. Prov., xxvii, 26. Le don d’un chevreau était un présent très sortable. Quand Samson va voir Thamnatha, l'épouse qu’il s’est choisie dans le pays philistin, il emporte avec lui un chevreau pour lui en faire cadeau. Jud., xv, 1. Sur l’indication de Samuel, Saùl rencontre près du chêne de Thabor des hommes qui portent des pains, une outre de vin et trois chevreaux. I Reg., x, 3. Ils se rendent à Béthel, probablement dans l’intention de présenter ces offrandes au sanctuaire de cette ville. Quelques années après, quand Isaï envoie son fils David à Saül pour lui jouer du kinnor, il ne manque pas de le charger de présents pour le roi. Ces présents se composent aussi de pains, d’une outre de vin et d’un chevreau. I Reg., xvi, 20. — Le chevreau est un petit animal très doux. Au temps du Messie, il habitera avec le léopard, Is., xi, 6,

symbole de l’union de tous les peuples sous la houlette du divin Pasteur. L'épouse du Cantique, i, 7, fait pailre ses chevrettes auprès des tentes des pasteurs, image gracieuse de l'Église qui prend soin des âmes dociles. — 3° Le chevreau servait surtout dans l’alimentation. Sa chair est fort tendre. Le jeune Samson écharpait un lion avec autant d’aisance qu’un chevreau. Jud., xiv, 6. Pour rendre cette chair plus savoureuse, on la faisait cuire dans du lait. C’est ce que pratiquent encore aujourd’hui les Arabes. Toutefois, pour inspirer aux Hébreux l’horreur de toute cruauté inutile, la Loi défendait de faire cuire le chevreau dans le lait de sa mère. Cette prohibition est répétée jusqu'à trois fois. Exod., xxiii, 19 ; xxxiv, 26 ; Deut., xiv, 21. On tuait le chevreau de préférence à l’agneau, parce qu’on laissait grandir ce dernier pour en recueillir la laine, dont on tjrait un meilleur profit que du poil de chèvre. C’est pourquoi Jérémie, ii, 40, déclare aux Juifs que le Seigneur les mènera à la mort comme « des béliers avec des chevreaux ». Le chevreau était ordinairement le premier animal qu’on saisissait, quand on voulait préparer rapidement un mets présentable. Lorsque Rébecca veut obtenir pour Jacob la bénédiction qu’Isaac destinait à Ésaii, elle envoie son plus jeune fils au troupeau pour en rapporter « les deux meilleurs chevreaux », et ensuite elle les apprête comme le vieillard les aimait, avec une sauce analogue à celle qui accommodait la venaison d'Ésaû. Isaac, dont le goût était sans doute émoussé par l'âge, fut trompé d’autant plus aisément, que Rébecca avait mis de la peau velue des chevreaux autour du cou et des mains de Jacob et qu’elle l’avait revêtu des habits de son frère, pour qu’au toucher et à l’odorat le vieillard aveugle crût reconnaître son fils aîné. Gen., xxvii, 9-16. Plus tard, Jacob devenu vieux reçut la tunique de son fils Joseph, trempée par ses frères « dans le sang d’un chevreau qu’ils avaient tué », sans doute pour en faire ensuite leur repas. Gen., xxxvii, 31. Le chevreau est utilisé aujourd’hui encore toutes les fois qu’on a un hôte à recevoir au désert. « Dans toutes les parties sauvages de la Palestine, raconte Tristram, chaque fois qu’un voyageur s’arrête dans un campement arabe ou fait sa visite au scheick du village, on le presse d’attendre, jusqu'à ce que le chevreau puisse être tué et préparé. On voit aussitôt, sur le devant même de la tente, prendre le chevreau et l’apprêter pour la cuisson. Les femmes l’emportent alors pour le faire cuire, loin du regard, dans le compartiment intérieur. À moins d'être forcé par la nécessité, l’hôte ne peut refuser d’accepter, sans une excuse raisonnable. S’il tient à passer pour un homme bien élevé, il faut qu’il attende jusqu'à ce que le festin soit prêt. Le chevreau fraîchement tué est extrêmement tendre et bon, et le palais le plus difficile ne peut découvrir de différence entre le chevreau et l’agneau. Le bouc déjà âgé ne fournit pas un bon aliment, bien qu’on le mange au lieu de mouton dans la plus grande partie de la Palestine. » The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 91. La scène ainsi décrite se lit deux fois dans le livre des Juges. Quand Gédéon reçoit la visite de l’ange qui lui ordonne d’attaquer les Madianites, il lui dit : « Ne vous éloignez pas d’ici, jusqu'à ce que je revienne à vous, avec le présent que je veux vous offrir. Il répondit : J’attendrai ton retour. Gédéon entra donc et fit cuire un chevreau et des pains azymes avec une mesure de farine. Puis, mettant la viande dans une corbeille, et versant le jus dans une marmite, il porta le tout sous un chêne et le présenta à l’ange. » Jud., vt, 18, 19. Lorsque Manué, le Danite, a devant lui l’ange qui lui annonce la naissance de Samson, il lui dit aussi, au nom de sa femme et au sien : « Je vous en prie, agréez ma prière ; laissez-nous nous retirer et vous apprêter un chevreau attaché à la chèvre. » Jud., xiii, 15. Dans lès deux cas, l’ange refuse le repas, qui devient alors matière à sacrifice. — Du temps de Notre - Seigneur, le chevreau occupait toujours bonne place dans les festins. C’est ainsi que le frère aîné du prodigue se plaint à son père de n’avoir