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1959
1960
ESPAGNOLES (VERSIONS) DE LA BIBLE


II. rEXHOirs juives. — 1° Versions de l’Ancien Testament. — 1. Isaac Abarbanel a traduit plusieurs livres sacrés en espagnol. Né à Lisbonne, en 1439, de parents juifs, il passa en Castille et y conquit la faveur des rois catholiques, sans renoncer cependant à sa religion. Aussi, lors du décret de 1492, il prit le parti de quitter l’Espagne et se réfugia d’abord à Naples, puis à Corfoue, enfin à Venise, où il mourut en 1508. Voir t. i, col. 15. Il a traduit de l’hébreu en espagnol le Deutéronome, Josué, les Juges, les Rois, les grands et les petits Prophètes. Voir Rodriguez de Castro, Biblioteca, t. i, p. 346-349. —

2. Isaac llaraman ben Moseh, originaire de Zamora, contemporain et coreligionnaire d’Abarbanel, prit comme lui le parti de l’exil, en 1492. Il avait traduit et commenté en espagnol, avant de quitter son pays natal, les livres d’Esther, de Ruth, de l’Ecclésiaste, du Cantique des cantiques, ainsi que les Lamentations de Jérémie ; mais il ne parait pas qu’aucun de ces écrits ait été livré à l’impression. Castro, Biblioteca, t. i, p. 361. Le manuscrit de la traduction de l’Ecclésiaste se conserve à l’Escurial. —

3. Bible de Ferrare ou des Juifs. — En 1553 parut la Bible espagnole la plus renommée et la plus souvent réimprimée. Elle a pour titre : Biblia en lengua espanola traduzida palabra por palabra de la verdad hebraica por muy excelentes letrados. En Ferrara, 16 de adar de 5313 (1 er mars 1553). Cette traduction est connue sous le double nom de Bible de Ferrare et de Bible des Juifs. Elle doit son premier nom à ce qu’elle fut publiée à Ferrare, sous la protection du duc Hercule II, qui favorisait ouvertement le luthéranisme. Elle doit le second à ce qu’elle est l’œuvre de deux Juifs portugais, Duarte Pinel, appelé aussi Jom Tob Athias, et Jérôme de Vargas, nommé aussi Abraham Usque. Rodriguez de Castro, Biblioteca, t. i, p. 400 et 401. Elle contient tous les livres protocanoniques de l’Ancien Testament, à l’exception des Lamentations de Jérémie. Daniel est rangé parmi les hagiographes, après Job. Esther est le dernier livre de tout le volume. Cette version eut, paraît-il, deux tirages simultanés en 1553, lors de sa première publication. L’un portait une dédicace au duc de Ferrare et s’adressait sans doute aux catholiques, qu’on voulait tromper ; car on s’y targuait frauduleusement d’avoir obtenu pour cette version de la Bible une approbation explicite du saint office. Le second tirage, destiné selon toute apparence aux Juifs, était dédié à une de leurs coreligionnaires, dona Gracia Nasi. M. Hidalgo, Diccionario, p. 214, qui a confronté les deux tirages, n’y a remarqué d’autre divergence que la suivante : dans le verset Ecce virgo concipiet, Is., vii, 14, l’un traduit virgo par virgen, qui est une traduction littérale, tandis que l’autre substitue le mot moza, qui offre un sens vague. La traduction en général laisse beaucoup à désirer pour l’élégance et la correction du langage, en dépit de la réputation qu’on lui a faite. L’espagnol y est froid, compassé, parfois inexact ; les hébraïsmes y abondent. Ménendez Pelayo, Heterodoxos, t. ii, p. 466. La Bible de Ferrare fut en partie corrigée dans les réimpressions qui en ont été faites, toujours par des Juifs et presque toujours à Amsterdam, en 1611, 1617, 1661, 1665, 1728, 1762. Rodriguez de Castro, Biblioteca, t. i, p. 472, 481, 517-518. La dernière édition, celle de 1762, a été donnée par lé rabbin Abraham Mendez de Castro, et passe à tort auprès de quelques auteurs pour être une version autre que celle de Ferrare.

2° Versions du Pentateuque. — 1. On doit au rabbin Manasseh ben Israël, Juif espagnol réfugié en Hollande, une traduction espagnole des cinq livres de Moïse, publiée à Amsterdam, en 1627 et 1655. Cette version ne diffère pas notablement de celle de Ferrare. — 2. En 1695, Joseph Franco Serrano, professeur de théologie à la synagogue d’Amsterdam, édita un Nuevo Pentateucho traducido en lengua espanola, avec paraphrase empruntée aux meilleurs commentateurs juifs. R. Castro, t. i, li.491-4’J3. — 3. Dix ans plus tard, le rabbin Isaac de

Cordova publia aussi à Amsterdam une traduction du Pentateuque. R. Castro, t. i, p. 493.

3° Versions des Psaumes. — 1. À une époque inconnue, un poète donna le premier, prétend-il dans sa Préface, une traduction en vers des Psaumes, sous le nom probablement supposé de Jean Le Quesne. On croit qu’il était Juif. On a pour cela plusieurs motifs, et en particulier cette circonstance, qu’il se vante d’avoir traduit sur le texte hébreu. Sa version n’était pas d’ailleurs sans mérite. Rodriguez de Castro, Biblioteca, t. i, p. 471. Mais elle était entachée de plusieurs erreurs doctrinales. Elle figure à l’Index espagnol comme livre prohibé, au mot Quesne. — 2. En 1625 parut à Amsterdam une autre version espagnole des Psaumes. Elle était anonyme et n’offre rien qui lui mérite une attention particulière. Rodriguez de Castro, Biblioteca, t. i, p. 472 et 473. — 3. En 1626, David Abénatar-Melo, Juif espagnol, d’abord converti au christianisme, puis relaps et réfugié en Allemagne, publia à Francfort une traduction espagnole en vers de tout le Psautier, faite d’après la Bible de Ferrare. Voir Amador de los Rios, Estudios sobre los Judios de Espana, in-8°, Madrid, 1848, p. 521-530. — 4. Les rabbins Éphraïm Bueno et Jonas Abravanel publièrent à Amsterdam, en 1650, une autre traduction espagnole des Psaumes, faite également sur l’hébreu. R. de Castro, Biblioteca, t. i, p. 477 et 478. — 5. Le rabbin Jacob Jehudah, Juif originaire de Léon, publia également une version des Psaumes à Amsterdam, et sa version n’était pas sans valeur. R. de Castro, t. i, p. 483-487. — 6. Mentionnons en dernier lieu à cet égard la traduction très prosaïque, bien qu’en vers castillans, du rabbin Daniel Israël Lopez-Laguna. Elle parut aussi à Amsterdam, en 1720. L’auteur avait consacré vingt années de sa vie à la composer, et comme elle avait été faite spécialement pour les Juifs, ceux-ci à leur tour ne négligèrent rien, en dépit de la pauvreté de la poésie, pour que la beauté de la forme et la richesse de l’ornementation ne laissassent rien à désirer. R. de Castro, t. i, p. 500-506.

4° Versions du Cantique des cantiques. — 1. Il fut traduit en espagnol vers 1631, par le rabbin David Cohen Carlos ; mais sa version est restée manuscrite. Elle se conserve à la Haye, en Hollande. R. de Castro, 1. 1, p. 476.

— 2. En 1766 parut à Amsterdam une édition du Cantique des cantiques en trois langues, hébreu, latin et espagnol. La version espagnole était l’œuvre du rabbin Moseh Belmonte. Castro, t. I, p. 519 et 520.

5° Version des premiers Prophètes. — Elle est due au rabbin Isaac de Acosta ; mais, comme ses coreligionnaires, il désigne par cette expression : « les premiers Prophètes, » Josué, les Juges et les quatre livres des Rois. L’ouvrage parut à Leyde, en 1732, sous le titre de Conjeturas sagradas sobre los Prophetas primeros. Voir Rodriguez de Castro, qui en donne des extraits, t. i, p. 506-510.

6° Version des hagiographes. — Juan Pinto Delgado, Juif portugais, qui avait fui la péninsule ibérique pour échapper à l’Inquisition et s’était réfugié en Normandie, traduisit en espagnol et en vers quelques-uns des livres qui sont appelés hagiographiques dans le canon hébreu, savoir ceux d’Esther et de Ruth, ainsi que les Lamentations de Jérémie. Sa version parut à Rouen, en 1627, avec une dédicace au cardinal de Richelieu. Ce fut sans doule grâce à ce patronage que le livre ne fut pas prohibé par l’Inquisition espagnole. Castro, p. 510-516.

7° Version d’Isaïe et de Jérémie. — En 1569, Joseph ben Isaac ben Joseph Jebetz avait publié à Strasbourg une édition du texte hébreu d’Isaïe et de Jérémie, avec traduction espagnole en regard. Le volume était à deux colonnes. La première offrait le texte hébreu, la seconde la traduction. Mais celle-ci était presque identique à celle de la Bible de Ferrare. R. de Castro, t. i, p. 464.

/II. VEBSlOiïS protestantes. — 1° Juan de Valdès. — C’est le premier luthérien originaire d’Espagne qui se soit