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    1. BARTHÉLÉMY##

BARTHÉLÉMY, APOTRE — BARTHÉLÉMY DE 0RAGANCE

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indication ; et il semble que la perspicacité des exégètes s’est exercée ici avec quelque succès.

On a d’abord observé que, sauf dans le livre des Actes, Barthélémy est toujours associé avec Philippe. Quel lien pouvait unir ces deux hommes ? Une vieille amitié, peut-être une fraternité de vocation. Or nous lisons dans saint Jean, l, 45, que Philippe, ayant entendu pour son propre compte l’appel de Jésus, courut annoncer à son ami Nathanaël la grande nouvelle, et l’inviter à venir voir de ses propres yeux le jeune Messie des Juifs. Ainsi il prépara sa vocation à la foi et à l’apostolat. Il est remarquable, en effet, que, d’après saint Jean, ce Nathanaël, dont ne parlent jamais lès synoptiques, fut, jusqu’à la fin, du groupe apostolique. Au chap. xxi, 2, il se trouve en effet classé parmi les disciples à qui Jésus apparaît pour la troisième fois, ꝟ. 14 ; or nous savons que ces disciples sont le groupe des Douze. À n’en point douter, Jean a vu dans Nathanaël un des Apôtres. C’est pourquoi il le nomme en l’intercalant parmi les apôtres Simon Pierre, Thomas et les fils de Zébédée. Si peu qu’on veuille bien peser toutes ces choses, ne trouve-t-on pas naturel qu’ayant été appelé des premiers à voir de près le Maître qui le salua sympathiquement comme un caractère loyal et vrai fils des croyants, Nathanaël soit devenu l’un des Douze ? Cependant il n’est jamais nommé dans les synoptiques, pas plus que Barthélémy n’est nommé dans saint Jean. On a donc été amené à supposer pour tous ces motifs, et plus particulièrement en raison de son association perpétuelle avec Philippe, que, sous deux noms différents, le nom patronymique et le nom propre, Barthélémy et Nathanaël ne sont qu’un seul et même personnage ? La plupart des exégètes modernes le pensent, et malgré le sentiment contraire de saint Augustin, Ira Joa. tract, vii, 17, t. xxxv, col. 1445, et de saint Grégoire, Mor. in Job, xxxi, 24, t. lxxvi, col. 693, nous partageons leur avis.

Nathanaël, fils de Tholmaï, était de Cana. On nous y a montré le site traditionnel de sa maison. Quelle physionomie intéressante que celle de ce disciple de la première heure ! Il est regrettable que saint Jean, après l’avoir si heureusement ébauchée dès le début de son Évangile, ne l’ait pas achevée plus tard. On sait avec quel calme réfléchi et par quelle objection il accueillit l’enthousiaste Philippe, qui accourait pour lui annoncer l’apparition du Messie. Joa., i, 45-46. Sa nature paraît avoir été méditative et réservée. Quand Jésus l’avait vu sous le figuier, il priait, ou du moins était préoccupé de graves pensées. Quand il s’entend louer, loin de se livrer aussitôt, il dit froidement : « D’où me connaissez-vous ? » Jésus donne alors le signe que sa foi demande. Il l’a vii, non pas seulement à distance et à travers les obstacles, sous le figuier, mais surtout il l’a pénétré jusque dans le fond de son àme, et l’honnête homme, si rude soit-il au premier abord, vaincu par cette révélation dont nous soupçonnons l’importance, sans toutefois en lire le dernier mot dans l’Évangile, s’écrie : « Maître, vous êtes le Fils de Dieu, le roi d’Israël ! » Joa., i, 49. Avec énergie le vrai Israélite rend hommage à son véritable roi. Après cette belle profession de foi, qui, dès le premier jour, atteint presque celle que Jésus arrachera seulement trois ans après au collège apostolique, dans la personne de Pierre, il n’est plus question de Nathanaël, sinon au dernier chapitre de saint Jean, où nous le trouvons prenant part à une pêche, et favorisé, comme les autres, d’une des plus consolantes apparitions du Sauveur. Joa., xxi, 2. Sous le nom de Barthélémy, il figure encore à la Pentecôte, Act., i, 13 ; puis le silence le plus complet se fait sur lui dans nos saints Livres.

D’après Eusèbe, H. E., v, 10, t. xx, col. 456, lorsque, vers la fin du ir 3 siècle, saint Pantène, ce philosophe fondateur de l’école des catéchètes, à Alexandrie, pénétra dans les Indes pour y annoncer Jésus-Christ, il y trouva l’Évangile de saint Matthieu en hébreu ou syro-chaldaique, et on lui dit qu’il avait été apporté là par l’apôtre

Barthélémy. Saint Jérôme reprend, comme cela lui arrive souvent, pour son propre compte, le récit d’Eusèbe, en ajoutant que Pantène rapporta à Alexandrie un exemplaire de cet évangile de saint Matthieu. De Vir. illust., 36, t. xxiii, col. 651. Que faut - il entendre par les Indes ? Ce n’est pas facile à dire, car les anciens désignaient vaguement par ce nom tous les pays de l’Orient inconnu, au delà de l’empire des Romains et des Parthes. D’après Rufin, H. E., i, 9, t. xxi, col. 478, et Socrate, H. E., i, 19, t. lxvii, col. 125, Barthélémy serait allé évangéliser l’Inde qui touchait à l’Ethiopie. Sophrone, ou du moins l’auteur qui a ajouté les Apôtres aux Hommes illustres de saint Jérôme, suppose, au chap. vii, Pair, lat., t. xxiii, col. 722, que ces Indes furent l’Arabie heureuse. Œcumenius, Duodecim Apostolorum nomina, dans ses Commentaria, in-f », Paris, 1631, p.e v b, et Nicétas, t. cv, col. 208, affirment à peu près la même chose. Dans l’homélie sur les Douze, qui se trouve parmi les œuvres de saint Chrysostome, t. lix, col. 495, il est dit que Barthélémy enseigna la tempérance aux Lycaoniens, ce qui supposerait une mission de cet apôtre en Asie Mineure. Il se serait trouvé à Hiérapolis avec saint Philippe, et y aurait courageusement souffert pour la foi. De là il se serait dirigé vers l’Orient, à travers le pajs des Parthes et l’Arménie. C’est à Albanopolis, ville de ces contrées, qu’il aurait été selon les uns décapité, et selon les autres, dont l’opinion est consignée dans le Bréviaire romain, écorché vif et crucifié par l’ordre d’Astyage, dont il avait converti le frère, Polymius, roi d’Arménie. Mais, outre que les témoignages sur lesquels on voudrait s’appuyer pour dégager quelque chose de probable sur la vie apostolique et le martyre de Barthélémy sont peu autorisés, ce qui demeure évident, quand on les compare, c’est qu’ils se contredisent. L’art chrétien représente l’apôtre tantôt écorché, tantôt avec le couteau qui servit d’instrument pour son supplice, Ch. Cahier, Caractéristiques des Saints, p. 52, 673 ; cf. p. 288. Théodore le Lecteur, Hist., . ii, t. lxxxvi, l re part., col. 212, affirme qu’en 508 l’empereur Anastase fit élever un temple magnifique à Daras, en Mésopotamie, pour y recevoir les restes de saint Barthélémy, et Procope, JEdif., lib. ii, c. ii, édit. de Bonn, t. iii, p. 214, parle, en effet, d’une église qui y était dédiée à ce saint. Après avoir été transportées dans l’île de Lipari et puis à Bénévent, les reliques de l’apôtre sont aujourd’hui vénérées à Rome, dans l’église de Saint-Barthélemy-en-1’Ile. Voir notre Vie de Notre - Seigneur Jésus-Christ, t. i, p. 424 et 267 ; Tillemont, Mémoires, t. i, p. 387- ; Cave, Lives of the Apostles, p. 387-392. E. Le Camds.

2. BARTHÉLÉMY (ÉVANGILE DE SAINT). Le catalogue gélasien des livres apocryphes mentionne un s évangile apocryphe au nom de l’apôtre Barthélémy ». : les catalogues grecs d’apocryphes ne le mentionnent point. C’était, conjecture-t-on, un évangile gnostique. Il n’a rien de commun avec « l’évangile de Matthieu « .Voir col. 1469. Bède, Exposit. in Luc, i, proœm., t. xcii, col. 307, commentant les premiers mots de l’Évangile de saint Luc, rappelle que plusieurs se sont efforcés de narrer les faits évangéliques, et que quelques-uns ont mis en tête de leurs récits les noms de Thomas, de Barthélémy, de Mathias, des « Douze apôtres », de Basilide, d’Apelle. Ce texte de Bède n’est qu’une adaptation d’un texte de saint Jérôme, Comment, in Matth., prolog., t. xxvi, col. 17, qui, lui aussi, commentant le même verset de saint Luc, rappelle les évangiles apocryphes « selon les Égyptiens »,-et de Thomas, de Mathias, de Barthélémy, des « Douze apôtres », de Basilide, d’Apelle, etd’autres qu’il seraittrop long d’énumérer. On pense que saint Jérôme a pu emprunter cette information à Origène. L’évangile apocryphe de saint Barthélémy n’a pas laissé d’autre trace dans l’ancienne littérature chrétienne. Voir Apocryphes et Évangiles apocryphes.

P. Batiffol.

3. BARTHÉLÉMY DE BRAGANCE, aussi nommé