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BAAL

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Mais Baal était le dieu de la mort en même temps que le dieu de la vie. Sa chaleur est souvent funeste à l’homme comme aux plantes et aux animaux, surtout dans les pays brûlés de l’Orient, et c’est pour cela que les classiques grecs et latins, qui avaient reconnu en lui à juste titre le soleil, l’assimilaient aussi à Chronos ou Saturne, le dieu qui dévore ses propres enfants, comme nous l’avons vu dans le texte de Servius. Il inspirait ainsi la terreur à ses fidèles, qui honoraient ce dieu cruel par des actes de cruauté, et cherchaient à se le rendre propice par l’immolation de victimes humaines, en particulier d’enfants. Jer., xrx, 5 ; xxxii, 35. Voir de Baudissin, lahveetMoloch, 1874, p. 39, 50-53. Le rite sanglant par lequel ses prêtres se blessaient et se meurtrissaient eux-mêmes, III Reg., xviii, 28, se rattache vraisemblablement à ces sacrifices inhumains.

III. Culte de Baal chez les Israélites. — 1° Histoire.

— Les enfants de Jacob, , fort enclins à l’idolâtrie, adorèrent Baal même avant d’entrer dans la Terre Promise.

388. Le dieu Baal sur une monnaie de Tarse.

Buste de Pallas, de lace, coiffée d’un casque à triple aigrette. — Baal de Tarse, assis sur un trône. À gauche, dans le champ, épi et grappe ; à droite, feuille de lierre ; au-dessous dn trône, T, marque de Tarse.

Le nom de ce faux dieu apparaît pour la première fois dans l’histoire de Balaam. Balac, roi de Moab, conduisit ce fameux devin aux bamôf ou hauts lieux de Baal, d’où l’on voyait l’extrémité du camp d’Israël. Num., xxii, 41. Peu de temps après, le perfide devin conseilla au roi Balac de pervertir le peuple de Dieu à l’aide des filles moabites. Num., xxxi, 16. Un grand nombre d’Israélites succombèrent, et leurs séductrices les firent tomber dans l’idolâtrie et adorer le dieu Baal sous une de ses formes particulières, c’est-à-dire comme Ba’al Pe’ôr (voir Béelphégor). Num., xxv, 1-3. — Quand les Israélites se furent emparés de la terre de Chanaan, ils ne tardèrent pas à rendre un culte à Baal, qu’ils considéraient comme le dieu du pays. L’auteur des Juges le leur reproche dès le commencement de son livre. Jud., Il, 11, 13. C’est parce qu’ils servent Baal et Astaroth que Dieu les livre entre les mains de Ghusan Rasathaïm, roi de Mésopotamie, Jud., iii, 7, 8 ; des Madianites et des Amalécites, Jud., VI, 25-32 ; des Philistins et des Ammonites, Jud., x, 6-7, 10 ; cf. Jud., viii, 33 ; ix, 4 ; I Reg., vii, 3-4 ; xil, 10. Lorsque, par suite de l’établissement de la royauté, les enfants de Jacob eurent moins de rapport avec les Chananéens, Baal n’eut d’abord parmi eux qu’un petit nombre d’adorateurs ; mais, après le schisme des dix tribus, sous Achab, roi d’Israël, son culte fut plus florissant que jamais. Ce prince avait épousé une Phénicienne, Jézabel, fille d’Ethbaal, roi de Sidon et prêtre d’Astarthé, III Reg., xvi, 31 ; elle était passionnée pour la religion de sa famille, et elle la propagea avec ardeur à Samarie et dans tout le royaume des dix tribus. III Reg., xvi, 31-33. Baal eut alors en Israël jusqu’à quatre cent cinquante prêtres, et Aschérah quatre cents. III Reg., xviii, 19, 22. Il ne fallut rien moins que le zèle du prophète Élie pour empêcher la perversion entière du royaume du nord, ffl Beg., xviii, 16-40. Le texte sacré ne compte que sept mille hommes qui n’eussent pas fléchi le genou devant Baal. III Reg., six, 18. Ochozias, fils d" Achab et de Jézabel, continua à servir le dieu phénicien.

III Reg., xxii, 54. Son frère Joram, qui lui succéda sur le trône de Samarie, détruisit les emblèmes (masêbâli) de Baal élevés par son père, IV Reg., iii, 2 ; mais il ne déracina pas complètement son culte, qui ne fut aboli que par Jéhu, le destructeur de la maison d’Achab. IV Reg., x, 18-28. La ruine du royaume d’Israël fut la punition de son idolâtrie. IV Règ., xvii, 16, 18.

Le royaume de Juda n’avait pas échappé lui-même à la contagion. Athalie, la fille d’Achab et de Jézabel, introduisit à Jérusalem le culte de Baal ; cf. IV Reg., rai, 27 ; elle lui fit élever un temple dont Mathan était le grand prêtre. IV Reg., xi, 18. Le temple, l’autel et les objets idolâtriques qu’il renfermait, furent détruits par le peuple à l’avènement de Joas, IV Reg., xi, 18 ; II Par., xxiii, 17 ; mais Achaz, roi de Juda, adora Baal, comme l’avait fait la maison d’Achab. II Par., xxviii, 2 ; cf. IV Reg., XVI, 3-4. Son fils Ézéchias détruisit l’idolâtrie dans son royaume,

IV Reg., xviii, 4 ; elle reparut de nouveau sous son successeur Manassé, qui dressa des autels à Baal et releva les

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392. — Hercule tyrien.

Tête laurée d’Heroule, à droite. — S). TTPOT IEPAS [KAI AjSYAOT. Aigle, à gauche, avec une palme. Tétradrachme frappé entre l’an 136 et 57 avant J.-C.

hauts lieux renversés par son père.- IV Reg., xxi, 3. Josias s’efforça d’anéantir son culte. IV Reg., xxiii, 4 5. Cependant le dieu chananéen eut des faux prophètes et des adorateurs dans Juda jusqu’à la captivité de Babylone, comme nous l’apprend Jérémie, ii, 8, 23 ; vii, 9 ; ix, 14 ; xi, 13, 17 ; xii, 16 ; xix, 5 ; xxiii, 13, 27 ; xxxii, 29, 35 (Cf. aussi Ezech., vm, 3, « l’idole de jalousie », c’est-à-dire Baal, d’après saint Jérôme, In Ezech., viii, 4, t. xxv, col. 78, et un certain nombre de commentateurs). Ce n’est qu’à partir de la captivité que le nom de Baal disparaît de l’Ancien Testament ; cf. Soph., i, 4 ; il n’est plus qu’un souvenir dans le Nouveau, Rom., xi, 4, et, pour les Juifs contemporains de Notre -Seigneur, le Baal qu’avait envoyé consulter Ochozias, roi d’Israël, IV Reg., i, 2, Ba’al Zebûb, dieu d’Accaron, est devenu Béelzeboul, un objet de dérision et un terme de mépris. Matth., x, 25. Voir Béelzébhb. ( Le dieu phénicien est mentionné, il est vrai,

II Mach., IV, 19, mais ce n’est plus sous son nom indigène de Baal ou Melqart, « roi de la cité, » c’est sous celui d’Héraclès ou Hercule (fig. 393), avec qui les Grecs l’avaient identifié. Voir Hercule.)

2° Rites et cérémonies du culte de Baal chez les Israélites.

— On adora Baal dans un temple, à Samarie, III Reg., xvi, 32 ; IV Reg., x, 21-27 ; à Jérusalem, IV Reg., XI, 18. Cf. Jud., IX, 4. Mais on lui rendait surtout un culte sur les hauts lieux, bamôt, c’est-à-dire primitivement sur les montagnes et les collines, puis sur des tertres artificiels. Jer., xix, 5 ; xxxii, 35 ; cf. III Reg., xviii, 20. Là, on lui élevait des autels, Jud., vi, 25 ; II Par., xxxiv, 4 ; Jer., xi, 13, au-dessus ou auprès desquels étaient dressés ses hammânim, cippes ou colonnes, II Par., xxxiv, 4 ; IV Reg., x, 26 ; on lui offrait des sacrifices de taureaux,

III Reg., xviii, 23, et d’autres victimes, IV Reg., x, 24 ; on brûlait des parfums en son honneur, Jer., vii, 9 ; xi, 13 (qattêr labba’al ; Vulgate : libare, « faire des libations, » mot qui ne rend pas le sens de l’original) ; IV Reg., xxm, 5 ; on fléchissait le genou devant lui, et l’on baisait ses statues ou ses emblèmes en signe d’adoration et de