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ASTAROTH — ASTARTHE


source « purifiante, rafraîchissante et étanchant la soif *. — La localité de 'AStarâ est nommée dans Bohâ ed-dïn, Vita Saladini, Liège, 1732, p. 66 et suiv.

Les auteurs chrétiens du moyen âge n’ont guère connu ces localités. Néanmoins Jin catalogue de reliques du xme siècle, publié par M. Battifol, dans la Revue biblique, 1892, p. 202, nous informe qu’alors le tombeau quramus) de Job était en vénération chez les chrétiens orientaux aussi bien que chez les musulmans. ( Voir, sur tous les lieux mentionnés : "Wetzstein, Das Iobskloster, dans Delitzsch, Das Buch lob, p. 507 et suiv. ; Schumacher, Across the Jordan, p. 187-209 ; et, dans la Zeitschrift des deutschen Palàstina - Vereins, divers articles de Schumacher, t. xiv, p. 1Ï2 et suiv. ; comte de SchackSchackenberg, t. xx, p. 193 et suiv. ; Erman, p. 205 et suiv., et Van Kasteren, t. xiv, p. 213 et suiv., et t. XV, p. 196 et suiv.)

Reste à traiter la question de l’emplacement d’Astaroth et de Carnaïm (peut-être des Astaroth et des Carnaïm) de la Bible. D’abord l’existence des traditions de Job à èeih Sa’d ne nous laisse aucun doute sur l’identité de cet endroit avec le Carnæa de YOnomasticon et le Carnéas de sainte Sylvie ; l’Astaroth (près de) Carnaïm d’Eusèbe et saint Jérôme devra donc être le Tell 'Astarâ ; rien n’empêche d’y trouver aussi l’Astaroth de Genèse, XIV, 5, même en préférant la leçon du Codex Vaticanus : « Astaroth et Carnaïm. »

Cette leçon étant admise, il n’y a rien dans la Bible qui nous empêche d’identifier encore le même Astaroth avec la résidence d’Og. Il nous reste cependant bien des doutes si celle-ci ne doit pas être placée à Tell el-As’ari : d’abord la leçon citée reste au moins bien douteuse ; les deux villages du même nom, connus par Eusèbe ; l’existence enfin d’un nom assez semblable, attaché à des ruines importantes, jusqu’ioi sans nom ancien : tout cela nous fait incliner de ce côté. La distinction entre les deux Astaroth a été. admise aussi par Wetzstein, Sepp et d’autres, qui ont cherché la résidence d’Og dans la ville célèbre de Bosrâ, au pied des montagnes du Hauran. Avouons cependant que le nom actuel, ElAè'arï, diffère sensiblement d"As[taroth, et même du, mot plus ou moins synonyme d’Alera, et. que les distances d'Édréi et de l’autre Astaroth (dix-huit et sept kilomètres) ne répondent pas exactement aux chiffres de YOnomasticon.

D’autres autorités récentes (Bùhl et Furrer, dans la Zeitschrift des deutschen Palàstina - Vereins, t. xiii, p. 42, 198), tout en laissant Astaroth à Tell 'Astarâ, le séparent complètement de Carnaïm. Selon Buhl, Carnaïm est encore inconnu ; Furrer dit : « Karnaïm (Gen., xrv, 5), Karnaïn ( Septante, loc. cit., et I Mach., v, 26, 43, 44), Karnion (II Mach., xii, 21), Agræna, Græna dans les inscriptions (voir Le Bas et Wa’ddington, iii, 561), est le Krën actuel (d’autres écrivent Dschrën, Dschurên), dans le Ledjah. De cette localité, il est dit très exactement, II Mach., xii, 21, qu’elle est d’un siège difficile et d’un accès difficile, à cause de l'étroitesse de tous les lieux ( Sià-rïiv 7tâvTtov xùv xàitwj otiv6vrtit.). » — Pour le Carnaïm de Genèse, xiv, 5, cette opinion ne nous paraît pas admissible ; quelque leçon qu’on admette, Carnaïm y reste trop intimement lié à Astaroth pour ne pas l’identifier avec Carnaïm - Astaroth de YOnomasticon, pays de Job. Peut-être l’hypothèse de Furrer est-elle applicable au Carnaïm des Machabées. Les noms composés, Carnaïmvstaroth = Carnaïm (près) d’Astaroth, et Astaroth - Carnaïm = Astaroth (près) de Carnaïm, ne semblent devoir leur origine qu’au besoin de les distinguer l’un et l’autre d’autres localités homonymes. C’est ainsi qu’on dit maintenant : Safed (de = près de) Qatamoun, Busr ( de = près de) el-Harîri, Yâfa (de = près de) en-Nâsira (Nazareth), etc. Ces noms supposeraient donc l’existence d’un autre Carnaïm, aussi bien que celle d’un autre Astaroth. Il faut avouer aussi que le texte cité par Furrer (II Mach., xii, 21) ne saurait

s’appliquer aux environs immédiats de Seih Sa’d, ce village se trouvant adossé à une basse colline, au milieu d’une plaine. Mais il n’est peut-être pas nécessaire de le restreindre aux environs immédiats ; le plateau du Hauran occidental, quoique n’offrant à l'œil qu’une plaine aussi unie qu’immense, est en réalité, surtout dans la partie méridionale, coupé par un réseau compliqué d’ouadis aussi raides que profonds, et parfaitement invisibles à distance : ce qui en fait un pays bien traître pour une armée étrangère. Les croisés en ont fait de tristes expériences. — Si cette conformation du pays ne suffit pas pour justifier les expressions du texte sacré, on sera obligé de chercher ailleurs le Carnaïm ou Carnion des Machabées. Rien du reste ne s’y oppose.

Ainsi au lieu d’une seule ville (Astaroth-Carnaïm) nous en aurons au moins deux, très rapprochées l’une de l’autre, assez probablement trois ; et même l’hypothèse d’une quatrième, le Carnaïm des Machabées, ne peut être définitivement rejetée. J. van Kasteren.

3. ASTAROTH-CARNAÏM, ville à l’est du Jourdain. Gen., xiv, 5. Voir Astaroth 2.

    1. ASTARTHE##

ASTARTHE, divinité chananéenne dont le culte s’introduisit chez les Hébreux à diverses époques ; à ce titre seulement elle ^est plusieurs fois mentionnée dans la Bible. Astarté est la forme grecque du nom : Septante, 'AorapTTi ; en hébreu, il se prononce au singulier 'ASporep, au pluriel 'Aspârôp ; de là, dans la Vulgate, Astarthe, III Reg., xi, 5, 33, et Astaroth, Jud., ii, 13 ; iii, 7, etc. L’emploi du pluriel pour le nom de la déesse doit s’expliquer, comme pour le nom du dieu, Baalim : ou bien parce qu’il se rapporte à la pluralité des images (Gesenius, Thésaurus, p. 1082, et déjà S. Augustin, Lib. quœst. in Jud., ii, 13, t. xxxiv, col. 797), ou bien parce que l’hébreu emploie souvent la forme du pluriel pour un singulier abstrait ; la signification primitive de ces noms de dieux serait abstraite. Schlottmann, Zeitschrift der deutschen morgenlândisches Gesellschaft, t. xxiv, p. 649-650. Notons qu’en assyrien le pluriel tëtarati est pris parfois dans le sens de déesses en général : « Les dieux (ili) et les iStarati qui habitent le pays d’Assur. » Schrader, Keilinschriften und A. T., 2e édit., 1883, p. 180. — L'étymologie du nom reste encore problématique. Les uns, s’appuyant sur le caractère sidéral de la divinité, l’ont rattaché à la racine qui a donné en zend açtar, en grec iarfp, et qui est passée chez les Hébreux sous la forme du nom judéopersan Esther. Gesenius, Thésaurus, p. 1083 ; Schrader, Keïlinschriften, p. 179, et Frd. Delitzsch, Smith’s chaldâische Genesis, in-8°, Leipzig, 1876, p. 273, pensent aussi que ce nom n’est pas d’origine sémitique, mais appartient plutôt au suméro-accadieri, dont l’existence est aujourd’hui contestée. D’autres, au contraire, le rattachent à une racine sémitique qui donne en arabe le verbe 'asara, « unir ; » il conviendrait ainsi à la déesse de l’amour et de la fécondité, comme le nom de la déesse babylonienne Mylitta, de la racine yâlad, « celle qui fait concevoir, enfanter ; » ou bien ce nom laisserait encore entendre, d’après Schlottmann, qu’Astarthé forme le lien d’union de plusieurs tribus ou cités, comme le Baalberith ou Baal de l’alliance ; en fait, elle était devenue, en Chypre et en Sicile, une Aphrodite Pandémos. En faveur de l’origine sémitique du nom, contentons-nous de remarquer que 'astârôt se rencontre comme nom commun dans Deut., vii, 13 ; xxviii, 4, 18, 51, partout dans une mémo formule où il se rapporte à la fécondité des femelles du troupeau. Dieu doit bénir ou maudire « les portées des bœufs et les 'aSpârôt du troupeau ». Le nom peut donc répondre à l’idée d’un dédoublement féminin de la divinité : idée qui a été, chez les peuples anciens, une source de tant de rêveries mythologiques, et un principe de corruption dans les croyances et le sentiment religieux. — Cette idée est absolument opposée à la conception reli-