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APOLLINAIRE DE LAODICÉE — APOLLO


écrivains grecs du rv 5 siècle, le père et le fils, portent ce même nom d’Apollinaire.

Apollinaire l’ancien, Alexandrin de naissance, grammairien de profession, avait enseigné les belles-lettres d’abord à Béryte (aujourd’hui Beyrouth), finalement à Laodicée de Syrie ou Laodicée ad mare, la Ladikiyéh actuelle. Il y fut fait prêtre, et son fils, Apollinaire le jeune, lecteur. Ensemble ils enseignèrent, le père la grammaire, €t le fils la rhétorique : ceci dès avant 335. Apollinaire l’ancien vivait encore à l'époque du règne de Julien (361-363). On lui a attribué longtemps la tragédie chrétienne qui a pour titre Christus paliens, mais qui est en réalité un centon de l'école de Théodore Prodrome, XIe siècle. Voir Bulletin critique, 1886, p. 371-373. L’historien Socrate, H. E., iii, 15, t. lxvii, col. 417, et après lui Sozomène, H. E., v, 18, t. lxvii, col. 1270, attribuent à Apollinaire l’ancien une adaptation en vers hexamètres du Pentateuque et « des autres livres historiques de l’Ancien Testament jusqu'à Saül », en vingt-quatre chants, adaptation à laquelle il avait donné le titre d’Archéologie hébraïque. Ce vaste poème soi-disant homérique est perdu. Au dire des historiens déjà cités, Apollinaire avait tiré aussi des Saints Livres des sujets de compositions soit lyriques, soit dramatiques, dans la manière de Pindare et d’Euripide. Il ne nous en est rien resté. D’après Socrate, Julien ayant défendu aux chrétiens l’usage des auteurs profanes, H. E., iii, 16, t. lxvii, col. 417, Apollinaire et son fils voulurent suppléer au défaut des classiques païens par la confection de classiques sacrés. La loi de Julien ayant été bientôt abolie, toute l'œuvre de ces rhéteurs chrétiens périt sans retour.

Apollinaire le jeune, disciple et collaborateur de son père, avait, dans la même vue que lui, composé des hymnes ou cantiques pour être chantés par les fidèles, même dans les réunions liturgiques, où généralement le psautier davidique seul était admis. Cette innovation n’eut pas de succès, et rien ne nous a été conservé de ces « idylles », comme lès appelle Sozomène. Il ne nous reste rien non plus des Évangiles et Épitres mis par Apollinaire en forme de dialogues à la manière de Platon, adaptation que l’historien Socrate est seul à mentionner. Par contre, on possède sur les Psaumes une paraphrase, en vers hexamètres, qui porte le nom d’Apollinaire, le seul ouvrage poétique que nous aurions de l'école de Laodicée. C’est, dit Tillemont, « une traduction fidèle, exacte et noble, de tous les Psaumes, et les plus habiles en parlent avec estime. » Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique, t. vii, p. 613. Mais l’authenticité de cette Melaphrasis psalmorum n’est plus admise aujourd’hui, et, depuis Godefroy Hermann, on est porté à y voir plutôt une œuvre de l'école de Nonnus, ve-vie siècle. Le texte, publié depuis 1552, a été reproduit par Migne, Patr. gr., t. xxxiii, col. 13131538. Voir A. Ludwich, Die Psalter-Metaphrase des Apollinarios, dans l’Hermès, t. xiii, 1878, p. 335-350. Saint Jérôme a paru à quelques critiques donner à entendre qu’Apollinaire le jeune était auteur d’une version en prose de l’Ancien Testament ; mais on est plus autorisé à croire qu’il s’agit d’interprétations toutes personnelles données par Apollinaire au texte de l’Ancien Testament, qu’il affectait de citer d’après la recension de Symmaque. S. Jérôme, Adv. Rufinum, ii, 34, t. xxiii, col. 456. Ce sont là les travaux d’Apollinaire le jeune sur la Sainte Écriture : nous n’avons qu'à rappeler ici que l'œuvre capitale d’Apollinaire a été une œuvre, non point de poète ni d’exégète, mais de théologien dogmatique et de dogmatiste platonicien ; c’est à ce titre surtout qu’il doit d'être connu, et à ce titre seul qu’il doit d’avoir été condamné à Rome en 378, à Antioche en 379, à Constantinople en 381. Il était alors évéque de Laodicée, où il mourut hérétique impénitent peu avant 392. — Voir Fabricius, Bibliotheca grseca, « dit. Harless, t. viii, p. 584-594 ; Tillemont, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique, t. vii, p. 602-637. M. Dràseke, qui a réussi à identifier parmi les apocryphes

de divers Pères de l'Église, saint Justin, saint Grégoire le Thaumaturge, etc., plusieurs des principaux traités théologiques d’Apollinaire le jeune, prépare une édition des Apollinaris opéra qux supersunt. P. Batiffol.

    1. APOLLO##

APOLLO ( 'AicoXXw ; ), contraction d’Apollodoros, ou, plus probablement, d’Apollonios, est le nom d’un des personnages considérables de l'Église apostolique. Act., xviii, 24-28. Malheureusement celui qui l’a porté, comme tant d’autres vaillants ouvriers de l'Évangile, n’a presque pas d’histoire dans nos Saints Livres. L’auteur des Actes, xviii, 24, nous dit qu’il était Juif, originaire d’Alexandrie, et aussi remarquable par son érudition que par son éloquence. Tel est, en effet, le sens qu’il faut donner à l’expression ïvtjp lâfiot ; . Dans Hérodote, ii, 3, Xi-ytoç veut dire un homme savant en histoire ; et les prêtres d’Héliopolis y sont ainsi qualifiés parce qu’ils étaient les plus instruits des Égyptiens sur les traditions de leur pays. Josèphe, Bell, jud., i, v, aussi bien que Philon, Légat, ad Caïum, p. 1026, désigne ainsi les historiens de la Grèce. Aoyio ; , c’est l’homme érudit, mais avec cette nuance particulière qu’il est éloquent. Ainsi on disait de Mercure à Àoyto ; , « le beau parleur, » et Philon, De Cherub., p. 127, indique par cette même expression, rai vu Xoyîow, les grands orateurs à qui la moindre maladie ferme la bouche. Chez Apollo, l'éloquence était le résultat de sa parfaite connaissance des Écritures : A’jvarà ; ûv èv txî ; ypatpxXi. Au reste Josèphe, Antiq. jud., XVII, vi, fait une appréciation analogue de deux Juifs célèbres à la fin du règne d’Hérode, Judas, fils de Sariphée, et Mathias, fils de Margaloth : 'IouSoaoïv XoytwTaxoi xa tùïv TtaTpiaiv i%ryr i-za. vgixwv. Apollo fut, comme eux, un docteur éloquent, exerçant une profonde inlluence sur ceux à qui il parlait. Par son génie naturel, autant que par sa formation classique, il se rattachait à cette brillante école juive d’Alexandrie, qui, avec ses tendances plus mystiques que formalistes, marchait tout droit à l'Évangile d’un pas autrement dégagé que le ritualisme de Jérusalem. Philon en était alors le plus illustre représentant.

C’est à Éphèse qu' Apollo se trouve, quand le livre des Actes le mentionne pour la première fois. Déjà il avait été instruit des voies du Seigneur, c’est-à-dire de la venue du Messie et de sa vie publique, mais par des disciples de Jean-Baptiste, qui ne lui avaient donné qu’un enseignement très incomplet au point de vue de la doctrine de JésusChrist. Ainsi ne connaissait - il pas d’autre baptême que celui du précurseur, et peut-être pouvait-il dire alors ce que dirent peu après quelques Éphésiens à saint Paul à propos du Saint - Esprit : « Nous ne savons pas même s’il y en a un. » Act., xix, 2. Toutefois ce qu’il connaissait de Jésus-Messie, il l’exposait avec beaucoup de soin et de zèle : ëkâ'kê.t xoù iSï8a<TX£v axptêto ; Ta TCEp’i toO 'Iyjgoû, prenant courageusement la parole dans les synagogues. Quelle que fût l’ardeur de son âme, Çéwv tw nveùjiaTt, et la vigueur de son éloquence, il demeurait insuffisant ou même dangereux dans son apostolat, la première condition, pour bien instruire, étant de bien savoir. Deux chrétiens militants, Priscille et Aquila, qui se trouvaient alors à Éphèse, virent le parti qu’on pouvait tirer d’un tel homme, et, l’ayant attiré chez eux, ils se chargèrent de l'éclairer pleinement. Le disciple devint aussitêt un maître du premier ordre, ayant la vraie doctrine et le désir autant que le don de la propager. Ce qu’on lui dit sans doute de l'œuvre de Paul à Corinthe, des espérances et des craintes qu’elle donnait, lui inspira le désir de passer immédiatement en Achaie. Il voulait maintenir dans la foi ce pays déjà acquis à l'Évangile, et peut-être pousser de plus en plus vers l’Occident la Bonne Nouvelle, déjà triomphante en Orient. La communauté chrétienne d'Éphèse l’y encouragea de tout son pouvoir, et lui donna des lettres de recommandation pour les frères de l'Église de Corinthe En sorte qu'étant arrivé en Achaïe, il rendit les plus grands services à la cause de l'Évangile, arrosant généreusement ce que Paul