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APOCALYPSES APOCRYPHES — APOCRYPHES (LIVRES)

L’archange Michel, archistratège de Dieu, révèle à Marie le lieu où sont punis les pécheurs et quelles peines ils subissent : Marie intercède en leur faveur auprès de Dieu. Ici encore nous avons affaire à une œuvre catholique de basse époque, mais dont on ne peut actuellement déterminer la date ni l’origine.

Un article spécial sera consacré au Testament des douze patriarches, au livre des Jubilés, aux livres Sibyllins, que les critiques classent quelquefois dans la catégorie des Apocalypses apocryphes. Voir à l’article Méliton deux apocryphes qui lui sont attribués, le Transites Mariæ et la Dormitio Mariæ.

P. Batiffol.

APOCRYPHES (LIVRES). Ce nom est donné par les protestants aux livres que nous appelons deutérocanoniques. Les catholiques, d’accord avec la façon de s’exprimer de l’ancienne Église, réservent ce nom aux livres qui ont figuré à tort dans le canon scripturaire de quelques Églises orthodoxes ou hérétiques de l’antiquité. Dans ce sens, les livres apocryphes sont les livres pseudocanoniques. On peut cependant élargir encore cette définition, et dire que les livres apocryphes sont ceux qui, par leur titre ou leur teneur, se donnent comme l’œuvre d’auteurs inspirés, sans pouvoir justifier de cette prétention. Dans ce sens, Origène les définit justement des livres qui « sont mis sous le nom des saints », entendant par saints les personnages bibliques, et qui « sont en dehors des Écritures canoniques ». Voyez le développement de cette définition dans saint Augustin, De Civitate Dei, xviii, '28, t. xli, col. 598.

La mise en circulation et le crédit de telles compositions pseudépigraphes s’explique par la croyance, fort ancienne dans la société chrétienne, que les Juifs possédaient une littérature secrète à côté de la Bible qui était publique. Cette croyance fut étendue plus tard aux sectes hérétiques. Le mot ἀπόκρυφος veut simplement dire « caché » ; il est opposé à κοινός, qui veut dire « public, courant, commun. » Origène, citant l’Apocalypse apocryphe qui a pour titre Ascension d’Isaie, écrivait : « Il est rapporté dans les écritures non publiques, in scripturis non manifestis, qu’Isaïe a été scié. » Origène, prévenant une objection qu’on pourrait lui faire, expose immédiatement sa règle de doctrine touchant ces sortes de livres : « Nous n’ignorons pas, dit-il, que beaucoup de ces écritures secrètes ont été composées par des impies, de ceux qui font le plus haut sonner leur iniquité, et que les hérétiques font grand usage de ces fictions : tels les disciples de Basilide. Nous n’ignorons pas davantage que d’autres de ces apocryphes, secreta, mis sous le nom des saints, quæ feruntur in nomine sanctorum, ont été composés par les Juifs, peut-être pour détruire la vérité de nos Écritures et pour établir de faux dogmes. Mais, en règle générale, nous ne devons pas rejeter en bloc ce dont nous pouvons tirer quelque utilité pour l'éclaircissement de nos Écritures. C’est la marque d’un esprit sage de comprendre et d’appliquer le précepte divin : Éprouvez tout, retenez ce qui est bon. » Origène, In Matth. comm. ser., xxviii, t. xiil, col. 1637.

Cette vue si juste et si profonde d’Origène, la théologie se l’est de nos jours appropriée. Elle a compris que, si cette littérature extracanonique n’ajoute pas un iota à la somme des Écritures inspirées, elle peut en mainte occasion, ainsi que l’exprimait Origène, éclaircir tel ou tel point obscur de tel ou tel livre canonique. L’histoire, à son tour, y a vu des documents. L’histoire, qui ne connaît point seulement des faits historiques, mais encore des états de conscience, et qui même cherche l’explication de tant de faits dans l’analyse de ces états ; l’histoire a demandé à ces apocryphes, où tout est fiction et vision, les éléments nécessaires pour reconstituer la pensée, les souffrances, l’attente, le rêve d'époques et de milieux qu’il nous importe particulièrement de connaître, et dont l’histoire serait, sans ces apocryphes, obscure et muette. C’est ainsi que les Apocalypses palestiniennes nous ont révélé le messianisme des Juifs du premier siècle avant notre ère, de l'époque asmonéenne et du temps des Hérodes, de même que les Actes apocryphes des Apôtres, l'éthique des gnostiques chrétiens de la fin du second siècle. Là est l’intérêt théologique et historique de cette littérature pseudépigraphe et extracanonique : Origène est seul à l’avoir pressentie.

Aux yeux de la plupart des écrivains de l’ancienne Église, au contraire, toute cette littérature de mensonge ne pouvait être que dangereuse et condamnable. Origène lui-même était trop clairvoyant pour ne le point marquer : « Ces écrits sont appelés apocryphes, parce qu’on y trouve beaucoup de choses corrompues et contraires à la vraie foi. » In Cantic, prol., t. xiii, col. 83. Apocryphe était synonyme de bâtard et de faux. S. Augustin, De Civitate Dei, xv, 23, 4, t. xli, col. 470 ; S. Irénée, Contra hær., i, 20, t. vii, col. 654 ; Tertullien, De pudicit., 10, t. ii, col. 1000. Et ainsi s’explique la proscription dont l’ancienne Église les a frappés. Voir Le Hir, Études bibliques, Paris, 1869, t. ii, p. 90 et suiv. « Si quelqu’un lit, approuve ou défend les fictions impies que les hérétiques ont mises, pour confirmer leurs erreurs, sous le nom des patriarches, des prophètes ou des apôtres, qu’il soit anathème. » Ainsi s’exprime le dix-septième canon du concile de Braga, en 563. Mansi, Conciliorum collectio, t. ix, col. 776. Voyez au contraire l’apologie des apocryphes dans le traité nouvellement retrouvé d’un hérétique du IVe siècle, Priscillien, De fide et apocryphis, édition Schepss dans le Corpus scriptorum eccl. latin., t. xviii, Vienne, 1889, p. 44-56.

Les anciens catalogues des livres canoniques seront étudiés à propos de l’histoire du canon. Nous n’avons à mentionner ici que ceux de ces catalogues qui nous fournissent des listes étendues et anciennes des livres apocryphes, et qui sont la documentation de cette proscription dont l'Église entendait frapper ces productions pseudépigraphes. Le plus étendu, le plus important de ces catalogues nous est fourni par l'Église romaine. C’est le catalogue des livres canoniques, des livres recommandés et dès livres condamnés soi-disant par le pape saint Gélase, dans un concile tenu à Rome en 495-496. En réalité, ce catalogue est composé de pièces rapportées, en partie plus anciennes que saint Gélase ; c’est un catalogue anonyme, quoique officiel, dont la compilation définitive a dû être fixée au début du VIe siècle. Le voici d’après Mansi, Conciliorum collectio, t. viii, col. 150-151. Cf. Jaffé, Regesta pontificum romanorum, 2e édition, t. i, p. 91, n » 700 ; Maassen, Geschichte der Quellen und dei Literatur des canonischen Redits in Abendlande, t. i, p. 283. (Les chiffres entre crochets renvoient aux paragraphes ci-après, où chacun de ces apocryphes est individuellement étudié.)

Notice des livres apocryphes qui ne sont pas reçus :

… Itinéraire au nom de Pierre, apôtre, qui est appelé de saint. Clément, huit livres, apocryphe [1].

Actes au nom d’André, apôtre, apocryphe [1],

Actes au nom de Thomas, apôtre, dix livres, apocryphe [1].

Actes au nom de Pierre, apôtre, apocryphe [1J.

Actes au nom de Philippe, apôtre, apocryphe [t].

Évangile au nom de Thaddée, apocryphe [4].

Évangile au nom de Mathias, apocryphe [4].

Évangile au nom de Pierre, apôtre, apocryphe [4].

Évangile. au nom de Jacques, apôtre, apocryphe [4J.

Évangile au nom de Barnabe, apocryphe [ï].

Évangile au nom de Thomas, dont se servent les Manichéens ». apocryphe [4].

Évangile au nom de Barthélémy, apôtre, apocryphe [4].

Évangile au nom d’André, apôtre, apocryphe [4].

Évangiles falsifiés par Lucien, apocryphes [41.

Livre de l’enfance du Sauveur, apocryphe [4].

Évangiles falsifiés par Ésichius. apocryphes [4].

Livre de la nativité du Sauveur et de Marie et de la sage-femme, apocryphe [4].

Livre appelé du Pasteur, apocryphe [3].