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APHRAATE — APION


réjouit la vue de quelque côté qu’on la considère, » Jixii, 26, on doit cependant rechercher la tradition des anciens, et soumettre à cette épreuve les diverses interprétations du texte sacré, comme on fait des pièces de monnaie, lesquelles sont reçues partout si elles portent l’effigie royale ; autrement elles sont rejetées comme fausses. Dém., xxii, 26.

Vivant au milieu des Juifs, répandus en grand nombre à cette époque en Mésopotamie et en Perse, Aphraate applique dans sa polémique leur méthode d’exégèse, pour leur prouver l’accomplissement des prophéties concernant le Messie, la réprobation du peuple juif, l'élection des Gentils, et démontrer que les figures contenues dans l’Ancienne Loi ont été réalisées dans la Nouvelle. Quoiqu’il s’applique surtout au sens historique ou littéral, il expose aussi le sens mystique de l'Écriture, et recherche l’allégorie, en suivant la méthode des premiers écrivains ecclésiastiques. La femme qui a perdu une de ses dix drachmes, Luc, xv, 8, est la Synagogue, qui a perdu le premier des dix commandements en adorant les idoles (Barnabe, iv, 8) ; et avec ce premier précepte elle a perdu les neuf autres qui en dépendent. Dém, , i, 11. Israël réprouvé est la vigne de Sodome, qui ne donne que des fruits amers. Deut, xxxii, 32 ; Dém., xix, 4. L'échelle de Jacob est le Christ, « par qui les justes montent du bas jusqu’au sommet. » Elle représente aussi « la croix du Sauveur, qui fut dressée comme une échelle, et au sommet de laquelle le Seigneur se tenait, selon la parole de l’Apôtre : La tête du Christ, c’est Dieu ». I Cor., xi, 3 ; Dém., iv, 5. Les pierres que Jacob oignit d’huile figuraient les nations qui devaient croire en Jésus-Christ, selon la parole de Jean-Baptiste : De ces pierres Dieu peut faire des fils d’Abraham. Malth., iii, 9. Le bâton que portait Jacob représente encore la Croix du Grand Prophète. Lorsque Jacob leva la pierre qui fermait le puits, et que plusieurs pasteurs réunis n’avaient pu soulever, il figurait le Christ, qui ouvrit seul la fontaine baptismale, que tous les prophètes n’avaient pu découvrir. Dém., iv, 6. — Il laut remarquer qu’un même texte est interprété par l’auteur tantôt au sens historique, tantôt au sens spirituel. Ainsi ce passage de la Genèse : « Le jour où tu mangeras de ce fruit tu mourras de mort, » ii, 17, entendu au sens littéral de la peine de la mort corporelle portée par Dieu contre Adam et toute sa postérité, Dém., xxii, 2, est expliqué figurativement de l'étal de mort spirituelle de l'âme pécheresse, Dém., viii, 17.

Certaines interprétations d’Aphraate, conformes aux traditions consignées dans les Targums, le Talmud et les auteurs juifs, témoignent clairement que notre auteur subit l’influence des doctrines rabbiniques. Par exemple, il désigne les Romains sous le nom de « fils d'Édom » ou « Ésaù ». Voir Le Hir, Le quatrième livre d’Esdras, dans les Études bibliques, t. i, p. 201 ; Dém., v, 22. Il rapporte que Caïn fut maudit pendant sept générations, Dém., ix, 8, et que le serpent, condamné à ramper et à manger la poussière, perdit les membres qu’il avait possédés jusque-là. Dém., xi, 9. Il fixe à six mille ans la durée du monde, et donne cette opinion comme une tradition reçue de ses « maitres », rabbanin. Dém., ii, 14. Un même roi de Tyr régna depuis David jusqu'à Sédécias, soit pendant 440 ans ; et Phinées exerça le sacerdoce durant 365 ans, de l’exode à la fin du temps des Juges, Jud., xx, 27, 28 ; Dém., xiv, 27 ; mais on sait que les événements racontés dans les derniers chapitres du livre des Juges se rapportent aux temps qui suivirent la mort de Josué. Vigouroux, Manuel biblique, 7e édit., t. ii, n° 446, p. 45, note. L’auteur se conforme dans ses supputations chronologiques aux chiffres reçus par les Juifs, et compte comme eux les jours par « soir et matin ». Il cite enfin un célèbre passage de l'Écriture d’après le Targum : « Le sceptre ne sortira point de Juda… jusqu'à ce que vienne celui à qui appartient le royaume. » Gen., xlix, 10 ; Dém., ii, 6 ; xvi, i. Dans le récit de la Cène, il établit que l’Eucharistie

fut instituée non pas le soir, mais bien avant dans la nuit du 14 nisan, à l’heure correspondant à celle de la résurrection, qui eut lieu le surlendemain, c’est-à-dire la nuit entre le sabbat et le dimanche, de très grand matin, Luc, xxiv, 1 ; mais lorsque les ténèbres régnaient encore. Joa., xx, 1. D’après lui aussi, le Seigneur se communia luimême, et Judas ne participa point à la réception du sacrement. Dém., xii, 6. Aphraate émet une interprétation fausse relativement à la manière de compter les trois jours que le Sauveur passa « parmi les morts » ; il compte trois jours entière à partir de la Cène : « Du moment où il donna son corps et son sang à ses disciples, il devait être compté parmi les morts. » De fait il ne parla point devant ses juges : « À celui qui était réputé pour mort, il était impossible de parler. » Dém., XII, 6, 7. En somme, réserve faite pour un très petit nombre de passages analogues à celui que nous venons de signaler, nous croyons que la connaissance de ces Démonstrations sera d’une haute importance et d’un grand profit pour l’exégèse chrétienne, et que l’auteur doit prendre rang parmi les interprèles autorisés de l'Écriture Sainte.

Le texte syriaque des œuvres d’Aphraate a été publié par le D r W. Wright, sous ce titre : The Homilies of Apliraates, the Persian Sage, ediled from Syriac manascripts of the fifth and sixth centuries, in the British muséum, with an English translation, by 11*. Wright, t. i, the Syriac text, Londres, 1869. Le second volume, qui devait contenir la traduction anglaise, n’a pas été édité. Une traduction allemande en a été donnée dans îes Texte und Untersuchungen der altchristlichen Literatur de Gebhardt et Harnack, t. iii, fasc. 3 : Aphrahat’s des persischen Weisen Homilien, aus dem Syrischen uberselit und erlâutert, von G. Bert, Leipzig, 1888. Huit des traités d’Aphraate avaient été traduits en allemand et publiés avec une Introduction par le D r Bickell dans la Bibliothek der Kirchenvâter de Thalhofer, t. en-cm : Ausgewdhlte Abhandlungen des Bischofs Aphraates von Mar Matliâus. — Einleilung ûber Leben und Schriften des Aphraates, Kempten, 1874. On peut utilement consulter aussi les ouvrages suivants : Prolegomena in Aphraatis Sapientis Persee sermones homilelicos scripsit C. I. Fr. Sasse, Leipzig, 1879 ; Devita et scriplis Aphraatis Sapientis Persse Dissertatio theologico - hislorica, quant ad gradum doctoris theologiee in universitale Lovaniensi consequendum conscripsit J. Forget, Louvain, 1882. J. Parisot.

    1. APHSÈS##

APHSÈS (hébreu : Happissês, nom avec l’article, « dispersion ; » Septante : 'Açea^), chef de la dix-huitième famille sacerdotale parmi les vingt-quatre choisies par David pour le service du temple. 1 Par., xxiv, 15.

    1. APHUTÉENS##

APHUTÉENS (hébreu : Happû(i), une des familles établies dans le pays de Cariathiariin. I Par., ii, 53.

    1. APION##

APION (l et siècle), né à Oasis, en Egypte, était venu de bonne heure s'établir à Alexandrie, où, après avoir été disciple des grammairiens Didyme et Apollonius, il avait fondé lui-même une école et reçu le droit de cité. Nous le retrouvons, à l'époque de Jules César, parcourant la Grèce et y obtenant un tel succès par ses leçons sur Homère, que, au dire de Sénèque, toutes les villes le décoraient du droit de cité. Il vint enseigner à Rome sous Tibère, et s’y rendit célèbre par son talent et par sa fatuité : « Apion quidem grammaticus, dit Pline l’Ancien, hic quem Tiberius Cæsar cymbalum mundi vocabat, cum propriae famse tympanum potius videri posset. » H. N. præf., 25. Revenu à Alexandrie, il fut envoyé à Rome en ambassade auprès de l’empereur Caligula, pour lui demander de sévir contre les Juifs, qui étaient fort nombreux à Alexandrie, pendant que de leur côté les Juifs d’Alexandrie envoyaient leur illustre coreligionnaire PhiIon, pour les défendre auprès de l’empereur. Sous Claude (qui régna de 41 à 54 de notre ère), Apion tenait école à