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ANNÉE


Sanhédrin, xr, 1, 2. Ils devaient veiller à ce que le 16 Nisan, ou deuxième jour de la fête, tombât toujours après l'équinoxe du printemps. Que cette condition dont parle la Gemarâ au vi" siècle fut déjà observée au I er, c’est ce qui résulte des indications de Philon, De Septenario, 19 ; Quxstiones et tolut. in Exod., i, 1 ; de Josèphe, Ant.jud., 111, x, 5, et d’Anatolius, dans Eusèbe, H. E-, vii, 32, 10-19, t. xx, col. 728-729. Mais les passages cités de la Mischna montrent qu’alors rien n'était encore réglé à l’avance d’après un cycle, et qu’on attendait parfois au dernier mois pour la décision. On tenait compte aussi de l'état de la végétation pour savoir si on pourrait faire l’offrande des épis ; et même, après des pluies prolongées, si on n’avait pas eu le temps de réparer les routes et les fours où l’on faisait cuire l’agneau pascal ( Sanhédrin : « à cause des routes, des ponts, des fours, » (anurê pesâhim), le Sanhédrin déclarait qu’on attendrait pendant une lunaison encore le commencement de l’année nouvelle ; mais, dans une année sabbatique, on ne devait jamais faire l’intercalation. Vers la fin du ive siècle seulement (670 de l'ère des contrats = 358), les Juifs rabbanites reçurent le cycle de Hillel. Th. Reinach, Le calendrier des Grecs de Babylonie et les origines du calendrier juif, dans la Revue des études juives, t. xviii, 1889, p. 90-94. C'était le cycle de dix-neuf ans inventé par l’astronome grec Méton vers 463 avant J.-C. Diodore, xii, 36 ; Théophraste, l)e signis tempest., 4 ; Élien, Var. hist., x, 7. Dans ce cycle de dixiieuf ans, sept années ont le mois intercalaire : les troisième, sixième, huitième, onzième, quatorzième, dixseptième et dixiieuvième. Comme il n’intéresse pas les temps bibliques, nous n’avons pas à en étudier ici le mécanisme ; il suffit de signaler son introduction tardive et surtout de remarquer qu’au second siècle de notre ère, et par conséquent au temps de Notre-Seigneur, une intervention du Sanhédrin réglait d’une façon tout empirique soit la durée de chaque mois, soit la succession des années à mois intercalaire, d’où dépend la coïncidence des fêtes avec tel ou tel jour de la semaine. On ne peut donc retrouver l’année où avaient lieu de pareilles coïncidences au moyen de table ; jlculées d’après des cycles déterminés, comme chercnent à le faire certains auteurs pour la vie de Notre-Seigneur et pour les temps apostoliques ; c’est à des renseignements historiques spéciaux à chaque cas, s’il en existe, qu’il faut demander la solution de ces problèmes chronologiques.

Quant aux anciens Hébreux, puisqu’ils se servaient, nous l’avons vii, de mois lunaires, ils ne pouvaient arriver à faire coïncider leur premier mois avec la même saison de l’année que par le procédé de l’intercalation ; nous devons conclure de là qu’ils le pratiquaient. L’usage des temps postérieurs, comme les attaches chaldéennes de la famille d’Abraham, confirment cette conclusion. Cependant les textes bibliques ne nous permettent pas d’en constater l’application. Le tour mensuel de service de certains officiers est réglé pour l’année ordinaire de douze mois. 1Il Reg., iv, 7 ; lPar., xxvii, 1, 15. En vain, les docteurs de la Mise/ma, Pesah., 4, 9, veulent-ils trouver trace de l’intercalation dans II Parai., xxx, 1-3, 13, 15, où l’on voit Ézéchias retarder la célébration de la Pâque au second mois ; rien n’indique que ce prince ajouta un second Nisau, comme on le faisait parfois dans le calendrier assyro-babylonien, mais il applique plutôt à la célébration solennelle et nationale de la Pâque ce que les particuliers pouvaient faire en certains cas. Num., ix, 6-11. Dans Daniel, iv, 26, l’expression « après douze mois », au lieu de dire « après un au », laisse-t-elle entendre que l’année pouvait avoir plus de douze mois ? C’est possible, d’autant plus que l’expression se rencontre là dans un document attribué au roi même de Rabylone, "où l’usage d’années à mois intercalaire était couramment pratiqué ; mais par là même ce passage ne peut être cité comme un témoignage direct sur la coutume des anciens Hébreux. On ne peut que par conjecture dire sur

quels principes se faisait autrefois l’intercalation. Il y a tout lieu de penser qu’elle était réglée, comme aux temps postérieurs, d’une façon aussi empirique. L'état de la végétation devait, comme plus tard, servir d’indice. Des courriers portaient aux villes du royaume la décision de l’autorité centrale. Cf. II Par., xxx, 5, 6, 10. Cependant on pouvait avoir recours aussi à quelques observations astronomiques rudimentaires sur la position de certaines étoiles ou constellations à telle ou telle saison de l’année, permettant de prévoir quelque temps à l’avance le moment où devait se faire l’intercalation. On trouve trace d’observations de ce genre dans le poème de Job, xxxviii, 31 ; et qu’on les ait utilisées pour fixer l’ordre et la durée desannées, c’est ce qui paraît résulter de la note incidemment donnée dans I Par., xii, 32 (hébr. 33), sur les gens de la tribu d’Issachar, qui sont réputés, au temps de David t comme « habiles à distinguer les temps pour savoir ce que doit faire Israël ».

Nous arrivons maintenant à notre seconde conclusion : rien dans la littérature hébraïque n’indique que les Hébreux aient anciennement connu et employé l’année solaire, c’est-à-dire composée simplement de douze mois fixes de trente jours chacun, avec cinq : jours surnuméraires. Les. considérations qui précèdent réfutent suffisamment ceux qui vont jusqu'à prétendre qu’ils ont fait d’abord usage d’un tel système et n’ont compté par mois lunaires qu'à une époque relativement récente, sous Ézéchias ou Josias d’après Credner, Joël ùbersetzt und erklàrt, 1831, p. 207 et suiv. ; Bottcher, Proben alttestamentl. Schrifterklârung, 1833, p. 283 et suiv. ; vers le temps d’Alexandre le Grand et sous la domination grecque, d’après D. Calmet, Dictionnaire de la Bible, au mot An et Dissertation sur la chronologie, en tête du Commentaire sur la Genèse ; et même seulement vers l’an 200 avant J.-C, suivant Seyflarth, Chronologia sacra, 1846, p. 26 et suiv. D’autres : soutiennent simplement que les Hébreux ont connu l’année solaire et s’en sont parfois servis à côté du système luni-solaire. Ainsi Riehm, Handwôrterbùch, au mot lahr, t. i, p. 655 ; S. Poole dans le Smith’s Dictionary of the Bible, t. iii, p. 1803, veulent en trouver quelques traces dans la Bible ; mais est-il bien sérieux d’alléguer dans ce sens le chiffre de 365 ans attribué au patriarche Hénoch dans Genèse, v, 23 ? ou celui de 150 jours dans le récit du déluge, Gen., vii, 24 ; viii, 3, quand le récit n’insinued’aucune façon qu’ils font cinq mois, 5x30, mais implique seulement que ces 150 jours sont renfermés dans un intervalle de cinq mois et dix jours, Gen., vii, 11 ; viii, 4, . intervalle qui renferme plus de 150 jours, qu’on le prenne en mois lunaires ou en mois solaires ? De plus, d’après. Riehm, dans les dates qui fixent la durée totale du déluge, du dix-septième jour du deuxième mois au vingt-septièmejour du deuxième mois de l’année suivante, vii, 11 ; . vm, 14, on trouverait une combinaison de l’année solaire et de l’année lunaire. Ces dates supposent, en effet, une année, plus onze jours. Or une année lunaire, 351 jours plus Il jours, égale l’année solaire, soit 365 jours. Que l’auteur du récit ait voulu faire entendre que la durée totale du déluge égalait une révolution solaire, c’est possible ; mais il n’en reste pas moins vrai que son calcul par mois, 354 + 11, est basé sur l’année lunaire. — On allègue ensuite les noms anciens : Abib, Ziv, Ethanhn, Bul, indiquant que ces mois sont essentiellement rattachés à des saisons déterminées, et par conséquent des mois solaires. Ces noms supposent, en effet, la coïncidence, mais ne disent pas quelle en était la nature ; celle que l’on obtenait par.'. procédé de l’intercalation suffisait pour justifier la dénomination de lune (hôdés) des épis, des fleurs, etc. — On dit encore que l’expression « trente jours » est prise par les auteurs sacrés comme synonyme d’un mois. Deut., xxr, 13 ; xxxiv, 8 ; Num., xx, 30 ( 29) ; Esther, iv. Il : Dan., vi, 7, 12 ; Judith, iii, 15 ; xv, 13. On ne peut rien conclure de semblables locutions ; même dans le cas de Tannée lunaire, on compte en chiffres ronds-