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AMALÉGITE


assez difficile de fixer les limites du territoire occupé par un peuple nomade ; il nous manque, dans ce cas, les principaux points de repère, c’est-à-dire les villes. Cependant des textes qui appartiennent à différentes époques, partant de données diverses et se contrôlant ainsi les uns les autres, s’accordent à nous montrer Amalec dans la région septentrionale de la péninsule sinaïtique, de la frontière d’Egypte au sud de la Palestine et sur les confins de l’Arabie Pétrée (fig. 110). Le passage 1 Reg., xv, 7, nous fournirait une indication générale assez précise : « De Havila à Sur, qui est en avant de l’Egypte, » si nous étions sûrs de la position d’Havila, qu’il faut chercher sans doute au nord de la péninsule arabique. Quant à Sur (une région plutôt qu’une ville), elle était en avant, c’est-à-dire sur la fron 110. — Carte du pays des AmaKcites.

iière orientale de l’Egypte, au nord et à l’est du golfe de Suez, où nous ramène Exod., xv, 22, et c’est, en effet, de ce côté, avant d’arriver au Sinaï, que les Hébreux se rencontrent pour la première fois avec les Amaléciles. Exod., xvii, 8. Mais ils s’étendaient à l’est jusqu’à la frontière méridionale de la Palestine, comme nous l’apprennent les explorateurs de la Terre Promise, Num., xiii, ’211, et c’est là que les Hébreux les rencontrent une seconde fuis, Num., XIV, 45, cꝟ. 25, quand ils veulent s’avancer du désert de Pliaran et de Cadès. Num., xiii, 1, ’27. C’est là aussi que Chodorlahomor, après avoir poussé son invasion vers le sud « jusqu’à Pharan, qui est dans le désert », et repris la direction du nord, trouve, après Cadès, <. le pays des Amalécites », puis celui des « Amorrhéens, qui habitent Asasonthamar ». Gen., xiv, 0-7. Aussi, quand Saùl prépare son expédition contre Amalec, rassemble— 1— il ses troupes dans une ville du sud de Juda, Télém, Jos., xv, 21, dont le nom est écrit Telahn dans 1 Sam., xv, 4. (La Yulgate traduit : quasi agnos, « comme des agneaux, » en confondant la préposition z, be, dans, avec la particule z, ke, comme, et en prenant, comme l’a fait aussi le Tm^um de Jonathan, le nom de la ville pour le pluriel de

tell, « agneau, » ) Dans I Reg., xxvii, 7 et suiv., et xxx, on voit que les Amalécites étaient dans le voisinage des Philistins, tandis que I Par., iv, 43, les met en rapport avec les montagnes de Séir. La région des Amalécites confinait donc à l’Egypte, aux Philistins, au sud de Juda et aux Iduméens. C’est là que nous ramène la donnée assez vague de Josèphe, Ant. jud., VI, vii, 3, paraphrasant I Reg., xv, 7 : « Tous ceux qui vont de Péluse à la mer Rouge, » où il faut entendre plus spécialement le golfe d’Akaba. Cf. aussi Eusèbe, dans X Onomasticon, où il définit Amalec « la région dans le désert situé au sud de la Judée, s’étendant jusqu’à la ville maintenant appelée Pétra, quand on va vers Aila. » (Dans les Œuvres de saint Jérôme, t. xxiii, col. 121.) C’est par une singulière méprise que Josèphe parle de « villes amalécites » dont Saül aurait fait le siège en règle ; il oublie le caractère nomade de ce peuple, tel que l’Écriture nous le présente partout. La prophétie de Balaam, Num., xxiv, 20-21, nous montre qu’Amalec vivait à côté des Cinéens, autres tribus errantes, et ce trait est confirmé par I Reg., xv, 6. L’humeur vagabonde et l’instinct pillard d’Amalec expliquent comment nous le voyons envahir le territoire d’Israël par la TransJordanie au temps des Juges, tantôt uni à Moab et à Arnmon, Jud., iii, 13, et tantôt aux Madianites. Jud., vi, 3. C’est probablement alors, sinon dans une circonstance analogue antérieure, non mentionnée dans l’Écriture, qu’une famille d’Amalécites s’établit un certain temps jusque dans les montagnes d’Éphraïm, et y laissa son nom à une localité. Jud. xii, 15. Cf. le texte si obscur et peut-être altéré, v, 14. Voir Amalec 2.

La région qu’occupait Amalec est en grande partie représentée par ce qu’on appelle aujourd’hui le désert d’Et-Tih (de l’égarement) ; ce n’est pas une région absolument aride et sablonneuse, mais le sol est trop maigre, trop desséché pour être cultivé, sauf en quelques oasis ; à la saison des pluies, il se couvre d’une végétation abondante, et peut nourrir des troupeaux, qui, dans la saison chaude, sont parqués dans les oasis. Autrefois même, comme l’attestent de nombreuses vallées et les lits de torrents qui se ramifient en divers sens, ce pays jouissait d’un régime d’eau plus abondant ; il pouvait par conséquent nourrir une population pastorale plus dense. Le Tilt répond parfaitement à la notion hébraïque du midbar, qui désigne une région inhabitée sans doute, impropre à l’agriculture, mais où l’on conduit et nourrit des troupeaux. Aujourd’hui les principales tribus bédouines de la péninsule sinaïtique sont les Tiyaliâ (habitants du Tih) et les Towarâ (Arabes de Toi) ; de ces derniers, E. Reclus nous dit dans sa Nouvelle (jéograpliie, t. ix, Asie antérieure, 1884, p. 747 : « On les croit descendants des Amalékitcs, que les Hébreux sortis d’Egypte vainquirent à Raphidim, au pied du mont Sorbal. » Mais ce sont plutôt les Tiyakà, comme le pense L. de Laborde, qui tiennent la place des Amalécites. Commentaire géographique de l’Exode, 1841, p. 99.

II. Histoire des Amalécites. — C’est dans le récit de l’invasion de Chodorlahomor que se trouve la plus ancienne mention du « pays de l’Amalécite ». Gen., xiv, 7. Quelques siècles après, les Amalécites furent les premiers ennemis qu’eurent à combattre les Hébreux, au sortir de l’Egypte, à Raphidim, à une petite distance au nord-ouest du mont Sinai. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 1889, t. ii, p. 409. Ces hordes de pillards, attirés sans doute par l’espoir d’un facile butin, « chargèrent en queue » les émigrants fatigués par la marche, la faim et la soif, « lrappant les traînards » sans pitié. Deut., xxv, 17-19. Josué fut chargé de repousser les assaillants, tandis que Moïse montait sur une colline voisine, accompagné d’Aaron et de Hur, et grâce à leur appui tenait ses bras étendus, ayant en sa main la « verge de Dieu ». Exod., xvii, 8-10. Amalec fut battu, et Moïse dut écrire « dans le livre » le souvenir de la victoire et la promesse qu’Amalec serait entièrement détruit. Nous suivons dès lors