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VER–VER

dresser un procès verbal. Rei gestæ acta scribere. Tandis qu’on verbalise, on entend un grand bruit. Pat.

On le dit aussi, dans le discours familier seulement, de celui qui fait de grands discours qui n’aboutissent à rien. Depuis deux heures il ne fait que verbaliser.

Tous ces mots viennent du Latin verbum, qui signifie toute sorte de paroles, ainsi dit, selon quelques-uns, quòd aëris verberatu formetur. Mais Varron le dérive à veritate ; parce que les mots ne devroient servir qu’à dire vrai.

VERBE. s. m. Terme de Théologie. Verbum. La seconde personne de la Trinité. Le Verbe incarné, le Verbe s’est fait chair. Au commencement étoit le Verbe, & le Verbe étoit Dieu, dit S. Jean en son Évangile.

Le Verbe est engendré du Père de toute éternité. Filius meus es tu ; ego hodiè genui te ; parce que le Père n’a pu être un seul instant sans le connoître, ni se connoître sans produire un terme de cette connoissance. Ce terme est le Verbe qui procède conséquemment du Père par voie de connoissance & d’entendement. Voyez Trinité, Génération, Procession.

Verbe Incarné. Ordre du Verbe incarné. C’est le nom d’un Ordre Religieux de Filles, dont la fin principale est d’honorer le mystère de l’Incarnation du Verbe. Il a été fondé par la Mère Jeanne-Marie Chézard de Matel, née à Roanne en Forez, le 16 Novembre 1596, & fille de Chézard, Seigneur de Matel, Gentilhomme de la Chambre des Rois Henri IV & Louis XIII, & Capitaine de Chevaux Légers. Ce fut l’an 1615 qu’elle commença cet Institut à Paris, & Urbain VIII accorda la Bulle d’érection l’an 1655, le 11 Juin. Elle établit des Monastères à Lyon, à Avignon, à Grenoble & à Paris ; mais ce dernier fut dissout bientôt après la mort de la Fondatrice, qui arriva le 11 Septembre 1670. Leur habillement consiste en une robe blanche, un manteau & un scapulaire rouge ; la robe ceinte d’une ceinture de laine aussi rouge, & sur le scapulaire un nom de Jésus, dans une couronne d’épines, & au-dessous du nom de Jésus, un cœur surmonté de trois clous, avec ces mots, Amor meus. Le tout en broderie de soie bleue. Leurs Constitutions ont été approuvées par Innocent X. Voyez la vie de la Mère Chézard par le P. Antoine Boissieu Jésuite ; & le P. Hélyot, T. IV. C. 51

VERBE. Terme de Grammaire. Partie de l’oraison, qui se conjugue par temps & par modes. Un verbe actif, est celui qui exprime une action, comme faire, donner, battre, & qui régit l’accusatif. Verbum activum. Les Grammairiens en font de deux sortes : un qu’ils appellent transitif, qui agit sur autrui, comme tourmenter quelqu’un ; l’autre qu’ils nomment réciproque, qui agit sur soi-même, comme, se tourmenter, & qui se joint toujours avec le pronom personnel. Voyez le mot Régir.

Jules César Scaliger a cru trouver un grand mystère, en disant, que la distinction des choses, en ce qui demeure, & ce qui passe, in permanentes & fluentes, étoit la vraie origine de la distinction entre les noms & les verbes, les noms étant pour signifier ce qui demeure, & les verbes ce qui passe : mais cette définition est fausse, & à ne considérer que ce qui est essentiel au verbe, c’est proprement un mot dont le principal usage est de signifier l’affirmation, avec désignation de la personne, du nombre & du temps. Gramm. Rai. On peut encore définir le verbe, en disant que c’est un mot qui sert à marquer ce qu’on fait, ou ce qu’on souffre ; l’existence ou l’état d’une chose, par rapport au temps & aux personnes. Id.

Verbe signifie, suivant l’étymologie Latine, mot ou parole, par où l’on a voulu sans doute marquer que le verbe est le mot, par excellence, en ce qu’il forme la liaison de toutes nos idées, & qu’il n’est pas possible de faire aucun discours suivi, sans le secours des verbes. M Restaut, Grammaire Fr. p. 165. de la 2e édit.

De toutes les parties de l’oraison, il n’y en a aucune dont nous ayons autant de définitions que nous en avons des verbes : chaque Grammairien qui en a traité, ayant différemment défini le verbe, selon qu’il l’a différemment envisagé. Abbé Régnier, Grammaire Fr. in-4o.p. 341.

Il faut savoir parfaitement les deux verbes auxiliaires pour apprendre à conjuguer les autres verbes. Le P. Buffier, n. 569. de la Grammaire Fr. 1714. Quels sont les verbes neutres qui se conjuguent avec l’auxiliaire être. Voyez Intransitif & Marcher.

Verbe passif, est celui qui exprime une passion ; qui souffre & reçoit l’action de quelque agent, & se conjugue avec le verbe auxiliaire je suis. Verbum passivum. Quelques-uns n’admettent point de verbe passif en François ; la raison est, que ce qu’on nomme passif, n’est autre chose que le participe du verbe joint dans différens temps avec le verbe auxiliaire être. Les verbes Latins ont véritablement un passif, parce que les terminaisons en sont différentes, & qu’ils sont passifs de leur nature. Voyez Passif.

Verbe neutre, est celui qui ne désigne aucune action, ni passion, & qui n’a aucun régime : comme dormir. Verbum neutrum.

Il y en a qui admettent les neutres-passifs ; mais à y prendre garde de près, il n’y en a point en notre Langue, ou fort peu. Verba neutra passiva. Ce sont des verbes neutres ou absolus, qui se conjuguent en y ajoutant le pronom personnel seulement, lequel se met également bien aux actifs, quoiqu’il n’y ait point de neutres actifs. Il est assez difficile de prendre parti là-dessus, d’un côté à cause de ce que l’on vient de dire, & qui paroît assez bien fondé & de l’autre à cause de l’Académie, dont l’autorité semble être une décision absolue, & qui admet un très-grand nombre de neutres-passifs. Richelet n’en reconnoît presque aucun. Il appelle verbes réciproques presque tous ceux que l’Académie appelle neutres-passifs. Quels sont les verbes-neutres qui se conjuguent avec l’auxiliaire avoir ? & quels sont ceux qui se conjuguent avec l’auxiliaire être ? Voy. Intransitif & Marcher.

Verbe absolu, est celui qui n’a besoin d’aucun régime, ni exprimé, ni sous-entendu, comme, il tonne. Verbum absolutum.

Verbe auxiliaire, c’est le verbe avoir & le verbe être, qui aident à conjuguer les verbes actifs & passifs. Verbum auxiliare.

Verbe substantif, est le verbe être, je suis. Verbum substantivum ; sum. Voyez Être.

Verbes réguliers, sont ceux qui se conjuguent tous d’une même façon, & suivant une certaine règle, comme, 'j’aime, je fais. Verba regularia.

Verbes anomaux, sont ceux qui ont des irrégularités, & quelque chose de singulier dans les terminaisons ou formations de leurs temps. Verba anomala seu irregularia, comme, asseoir, faillir.

Verbe impersonnel, est celui qui n’a que la troisième personne, il faut. Verbum impersonale.

Verbe fréquentatif. C’est un verbe qui marque que l’on fait souvent, que l’on réitère souvent la même action, la même chose, comme en Latin itare, ito, aller souvent. Ventitare, ventito, venir souvent. Mussitare, mussito, marmoter. Et en François, élignoter, marmoter, barboter, machicoter. Les verbes fréquentatifs, en François, sont des termes bas & populaires.

Verbe inchoatif. Celui qui marque une action commencée & continue dans le sujet ou suppôt du verbe, comme fleurir, grifonner, reverdir, vieillir, &c. Florescere, canescere, virescere, senescere. Il y a 140 verbes Latins semblables, terminés en asco, esco, isco.

Verbe réduplicatif. C’est celui qui signifie une action répétée deux ou plusieurs fois, ou la répétition d’une même action. Verbum reduplicativum. En Latin reficere, rejicere, recantare, &c. En François, refaire, rejetter, rechanter, &c.

Verbe transitif. C’est celui qui signifie une action qui passe sur un autre, qui tombe sur un sujet différent de celui qui la fait. Verbum transitivum.

Monsieur l’Abbé Dangeau a donné des Réflexions sur les verbes, comme sur toutes les autres parties de la Grammaire Françoise. En voici le précis, dans lequel nous ne suivrons pas tout-à-fait l’ordre que cet illustre Académicien a gardé, mais où nous rendrons un