Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, III.djvu/187

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
179
DEG

ces bâtimens faute d’entretenir les couvertures, c’est-à-dire, que le bâtiment est devenu inhabitable, faute d’y faire les réparations nécessaires. Il a dégradé ces terres, ces vignes, faute de les fumer, & en ôtant les échalas. Il a abattu plusieurs arbres, & a dégradé cette forêt. Silvam cædere, excidere. Les Mâçons disent dégrader une muraille, pour dire l’abatre par le pié.

Les Peintres disent aussi dégrader, pour dire, observer les dégrés d’éloignement des parties d’un tableau, & y proportionner les jours & les teintes, affoiblir par degrés insensibles la lumière ou les couleurs d’un tableau. Varios colorum gradus observare.

Dégrader, en termes de Marine, signifie ôter tout l’équipement des vaisseaux quand on les abandonne parce qu’ils sont trop vieux, & inutiles au service. Navim vetustate inutilem derelinquere.

Dégradé, ée. part. Il a les significations du verbe.

En termes de Mâçonnerie on appelle un mur dégradé, un mur dont l’enduit ou le crépi est tombé & dont les moellons sont sans liaison.

DÉGRAFFER. v. a. Quelques-uns disent désagraffer. Détacher une chose qui étoit attachée avec une agraffe. Uncinis rem aliquam expedire. On le dit aussi quand on défait le crochet de l’agraffe où il est passé. Uncinos ab annulis solvere, expedire. Dégraffer une jupe.

Dégraffé, ée. part.

☞ DÉGRAISSAGE. s. m. Terme de Manufacture en laine. Voyez Dégraissement.

DÉGRAISSEMENT, plus ordinairement dégraissage. s. m. Se dit particulièrement des étoffes de laine, & moins de celles de soie, parce que la laine naturellement est comme imbibée de la sueur & de la graisse de l’animal, & est nourrie sur la tête d’une substance adipeuse, au lieu que la soie tient plus d’un humide gommeux que gras, le ver à soie tirant cet humide gluant de la feuille du mûrier. Préparation qu’on donne 1o. Aux laines avant que de les employer, en les mettant dans un bain chaud d’eau claire, & d’un quart d’urine, après quoi on les dégorge à la rivière ; 2o. Aux étoffes de laine, en les faisant fouler avec la terre & l’urine pour en séparer l’huile ou la graisse.

DÉGRAISSER. v. a. Oter la graisse. Adipem detrahere. Cette soupe est trop grasse, il la faut dégraisser. On dit dans le même sens, qu’une longue maladie a dégraissé quelqu’un. Adipes tenuare.

☞ On le dit aussi des taches que la graisse a faites. Un Fripier dégraisse les habits avec de la terre à potier. Dégraisser un chapeau. Illuviem purgare, detergere.

Dégraisser les laines, les étoffes de laine Voy. Dégraissement.

Dégraisser, se dit aussi en parlant du mauvais effet que les torrens & les ravines d’eau font sur les terres labourables, en emportant ce qu’il y a de plus propre à les rendre fertiles. Les plaies ont dégraissé les terres qui sont sur cette colline.

Dégraisser le vin, c’est, lorsqu’il a tourné à la graisse en vieillissant, lui ôter cette mauvaise qualité par le moyen de la colle de poisson mise en morceaux, & dissoute à froid dans du vin blanc, qu’on jette dans le tonneau par la bonde, & qu’on remue à plusieurs réprises. On se sert aussi pour cela de blé grillé & arrosé d’eau de vie ; de cire jaune fondue & jetée dans le tonneau, d’alun blanc pulverisé & fricassé avec du sable, de cendres de sarment, &c.

Dégraisser, se dit figurément en Morale. Dégraisser quelqu’un, c’est-à-dire, lui ôter une partie de son bien. Fortunas, opes imminuere. On le dit ordinairement des richesses mal acquises. On a souvent dégraissé les Financiers. Cet homme avoit fait de prodigieux gains, mais on l’a bien dégraissé.

Dégraissé, ée. part. Il a les significations de son verbe, en Latin comme en François.

DÉGRAISSEUR. s. m. Celui qui dégraisse les étoffes, les habits. Purgator. Les Chapeliers sont des Dégraisseurs de chapeaux ; les Fripiers des Dégraisseurs d’habits. Il y a aussi des Dégraisseurs Teinturiers.

Les Teinturiers Dégraisseurs, & autres Ouvriers qui sont obligés de se servir de l’eau de la rivière pour leurs ouvrages, se pourvoiront par devers les Prévôt des Marchands & Echevins, afin de leur accorder la permission d’avoir des bateaux, s’ils en ont besoin, & de marquer les lieux où ils pourront les placer, sans incommodité de la ville, & sans empêcher le cours de la navigation ; &, lorsqu’ils n’auront pas besoin d’avoir des bateaux, ils se pourvoiront seulement pardevers le Lieutenant Général de Police. Edit du Roi de l’an 1700. De la Mare, Tr. de la Pol. Tom. I. p. 176.

DÉGRAISSOIR. s. m. C’est un instrument qui avec son moulinet, sert à tordre la laine trempée dans l’eau de savon, avant de la mettre sur le peigne.

DÉGRAPINER. v. a. Terme de Matelots. Il se dit d’un vaisseau qui se retire de dessus la glace dont il s’étoit approché, par le moyen des grapins.

DEGRAS. s. m. On appelle ainsi l’huile de poisson qui a servi à passer des peaux en chamois, & dans laquelle on les a fait bouillir. Les Corroyeurs s’en servent.

☞ DÉGRAVELER. v. a. En Hydraulique, c’est nettoyer un tuyau qui sert à la conduite des eaux ; en ôter le sédiment.

DEGRAVOIEMENT. s. m. C’est l’effet de l’eau courante qui déchausse & dégrade les murs des pilotis, &c. Voyez Déchausser.

☞ DÉGRAVOYER. v. a. Dégrader, miner, déchausser des pilotis, des murs. Atterere, suffodere. L’eau courante, par son mouvement continuel, dégravoie les pilotis, les murs.

Dégravoyé, ée. part.

DEGRÉ. s. m. Terme d’Architecture, synonyme d’escalier, partie d’un bâtiment qui sert à monter & à descendre. Scalæ. Le grand degré du Palais. Un petit degré. Un degré dérobé, de dégagement. Ce terme est devenu bourgeois. On dit aujourd’hui escalier.

Degré, est aussi chaque marche d’un escalier. Gradus. Il lui a fait sauter les degrés quatre à quatre. Les Anciens donnoient à leurs degrés neuf à dix pouces de hauteur de leur pié, qu’on appelle pié Romain antique, ce qui revient à neuf, ou un peu moins de notre pié de Roi ? ils donnoient de giron à leurs degrés les trois quarts de leur hauteur, c’est-à-dire, un de nos piés de Roi, plus ou moins, ce qui faisoit des degrés trop hauts & pas assez larges. Aujourd’hui l’on donne aux degrés cinq ou six pouces de hauteur, & treize ou quatorze de giron dans les grands escaliers, ce qui rend nos degrés beaucoup plus commodes que ceux des Anciens. Les siéges des théâtres des Anciens étoient en façon de degrés, & chaque degré servant de siège avoit deux fois la hauteur des degrés qui servoient à monter & à descendre. Voyez les notes de M. Perrault sur Vitruve, l. 3 & 5. Daviler, Cours d’Architecture.

☞ Ce mot se prend au figuré à-peu-près dans le même sens qu’au propre : c’est ainsi qu’en Grammaire on dit degré de comparaison ou de signification en parlant des adjectifs qui, par leur différente terminaison, ou par des particules prépositives servent à relever ou à rabaisser la signification de l’adjectif, c’est-à-dire, à marquer un rapport de plus ou un rapport de moins dans la qualité de deux ou de plusieurs choses comparées, ou cette même qualité portée au suprême degré de plus ou de moins. Voy. Positif, comparatif & superlatif.

Degré, se dit encore dans un sens métaphorique 1o. de la différence interne qui se trouve entre les mêmes qualités, lesquelles ne peuvent être distinguées que par le plus ou le moins de force qu’elles ont dans plusieurs sujets, ou successivement dans le même sujet. 2. Des différentes choses, des emplois, des dignités qui servent de moyens pour s’élever à de plus grandes, & généralement des choses qui sont susceptibles de plus ou de moins. Degrés de mouvement, degrés de chaleur. Gradus. De ce degré d’am-