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Commis est aussi le nom qu’on donne dans quelques Communautés religieuses, & principalement chez les Bénédictins de la Congrégation de S. Maur, aux Artistes laïques, qui quittent le monde pour se donner à la Religion, & qui s’engagent par un contrat civil, à garder certaines règles, à s’occuper selon l’ordre des Supérieurs, dans les arts & métiers dont ils sont capables, sans prendre l’habit ni faire de vœux. Pierre Denys, ce fameux ouvrier en fer, qui a fait de si belles grilles d’église, & de si superbes rampes d’escalier, se donna Commis à l’Abbaye de S. Denys, & après deux ans de probation, il fit son contrat de stabilité en 1692, & mourut en 1733, âgé de 75 ans. Le Commis travaille sous les ordres du Prieur ou du Procureur. C’est de qu’on appelle dans d’autres ordres, un Donné ou un Oblat. Dans l’Abbaye de S. Waast d’Arras, le Commis aux ouvrages est chargé de la fabrique, tant au dedans qu’au dehors du Monastère. P. Helyot, T. VI, p. 261.

Ce nom se donne dans l’Ordre des Ermites de S. Jérôme de l’Observance de Lombardie, à un ordre ou degré de Freres lais qu’on y reçoit. Il y a dans cet Ordre, outre les Freres convers, des Freres Commis & des Donnés qui font des vœux. P. Helyot, T. III, c. 60, pag. 455. Les Augustins déchaussés de la Congrégation de France, appellent aussi leurs Freres lais, les Freres Commis.

COMMISE, s. f. terme de Jurisprudence féodale. ☞ Confiscation faite au profit d’un Seigneur féodal ; d’un fief pour félonie, ou désaveu de la part d’un vassal envers son Seigneur. Commissi culpa, cujus nomine prædium dynastæ committitur, vindicatur, commissum. Cette commise est appelée confiscation dans la Coutume de Paris. Cependant la confiscation se prend proprement pour l’adjudication qui se fait au profit du Roi, ou du Seigneur haut-justicier, des biens d’un homme condamné à la mort naturelle ou civile, dans les coutumes où la confiscation a lieu. Ferrière.

☞ Les fiefs étoient originairement donnés à vie ; & comme ils procédoient de la seule libéralité des donateurs, ils étoient appelés bénéfices, & la donation par conséquent pouvoit être révoquée pour cause d’ingratitude des vassaux envers leurs Seigneurs : & quoiqu’il y a long temps que les fiefs soient possédés en pleine propriété, & soient héréditaires comme les autres biens, ils sont toujours regardés comme une espèce de dépendance des Seigneurs de qui ils relèvent, comme si en effet les propriétaires ne les possédoient que par leur bienfait. De-là l’usage de la commise, qui n’est que la réversion des fiefs aux Seigneurs, causée par l’ingratitude des vassaux envers eux, a été conservé dans nos coutumes pour les fiefs, non pour les rotures, pour lesquelles on ne doit point de foi & hommage, & qui n’ont point été données originairement à titre de bénéfices, comme les fiefs.

Ce mot vient de commissum, qui signifie confiscation, dont il y a un titre exprès dans le digeste, qui est le 4 du 39 liv.

COMMISÉRATION, s. f. sentiment de compassion qu’on a pour quelque personne qui souffre. Commiseratio. Cette famille ruinée mérite de la commisération. Les soldats, à la prise d’une ville, n’ont aucune commisération, ni pour l’âge ni pour le sexe. Un bon Avocat doit porter les Juges à la commisération. Des airs superbes, ni une commisération affectée, ne conviennent point à un vainqueur généreux. S. Evr. La commisération est propre & naturelle à la Tragédie. Id.

COMMISSAIRE. s. m. Delegatus, Commissarius. C’est celui qui est commis, délégué, préposé pour quelque fonction particulière. On appelle généralement Commissaires, des personnes choisies, à la prudence & à la capacité desquelles on a confié le soin de quelque chose. Commissarius dicitur persona electa, cujus fidei, prudentiæ ac solertiæ res aliqua commissa est.

☞ On s’est servi de ce mot pour signifier des Officiers publics qui ont des fonctions ordinaires attachées à leurs charges. Quelquefois ce terme a été employé pour signifier des personnes qui ne sont chargées que pour un temps, de certains emplois extraordinaires & limités. Ainsi ce terme a parmi nous les deux significations du mot Curatores chez les Romains.

☞ Quelquefois ce mot est opposé au titre d’office, comme quand il est donné aux Intendans des provinces, aux Juges choisis extraordinairement pour des fonctions limitées qui ne sont point attachés à leurs offices : dans un autre sens il est donné à des Officiers de Compagnie, qui agissent dans des fonctions ordinaires, qui leur sont propres, attachées à leur offices & de leur compétence : mais qui leur tombent en partage par le choix qui est fait d’eux entre leurs confrères.

Commissaire. Quand il s’agit de procès, d’affaires ; c’est un Juge à qui le Roi attribue un pouvoir particulier & extraordinaire, de juger souverainement certaines affaires en des Chambres ou des Bureaux qu’il a établis à cet effet. Recuperator ; delegatus Judex. Les Chambres de la Marine, des Francs-fiefs, la Chambre de Justice, la Chambre-Royale, sont composées de Commissaires. On a fait juger ce prisonnier par des Commissaires. On lui a donné des Commissaires. Plusieurs grands-Seigneurs demandent des Commissaires au Conseil pour juger leurs affaires particulières.

Ce mot vient de committere, qui proprement signifie envoyer ensemble, & aussi charger quelqu’un de quelque chose, le commettre à quelque chose, pour faire quelque chose, lui en donner le soin. M. de la Mare, dans son Traité de Police. L. I, T. XI, c. 3, prétend que le nom de Commissaire vient de committo, pris au premier sens, & qu’il fut donné aux Commissaires ou Intendans, qui s’envoyoient autrefois dans les Provinces qui s’appelèrent d’abord Missi, & ensuite Commissi, parce qu’on les envoyoit deux ensemble. Il convient cependant que ce mot ne se trouve pas même dans la basse latinité. Les Commissaires des quartiers s’appeloient à Athènes Χορεπίσκοποι, & à Rome Curatores regionum urbis. M. de la Mare, dans son Tr. de la Police, L. I, T. XI, les appelle Conseillers-Commissaires-Enquêteurs & Examinateurs. Il prétend, c. 2, qu’ils ont été établis en France par les Romains, & conservés par nos premiers Rois. Il continue leur histoire dans les chapitres suivans jusqu’à nos temps. Au ch. 6 & 7, il explique leurs fonctions ; au 8 & 9e leurs qualités & leur rang, & au 10e leurs privilèges.

On appelle aussi Commissaires du Conseil, les Maîtres des Requêtes, ou Conseillers d’Etat, que M. le Chancelier nomme, afin de discuter une affaire avec le Rapporteur, auxquels il en doit communiquer avant d’en faire le rapport.

Commissaires est aussi le Juge particulier qui est commis pour l’instruction d’une affaire. Lectus, legatus alicujus causæ cognitor, disceptator. Quand on appelle de l’Ordonnance d’un Commissaire avec fondement, il ne peut plus être Rapporteur.

On appelle maintenant les Intendans de Justice, Commissaires départis en tel Province pour l’exécution des ordres de Sa Majesté. Legatus ad tuendam in Provinciis Regis auctoritatem. On appelle aussi Commissaires pour la revente du Domaine, ceux qui en font la nouvelle adjudication, & les Juges nommés pour la réformation des Coutumes des Eaux & Forêts.

Commissaires se dit aussi des Députés que le Roi nomme de sa part, pour regler les limites, & travailler à l’exécution des Traités de paix, ou autres grandes affaires, avec ceux qui sont nommés pour le même effet par les Princes étrangers, afin de tâcher de les regler à l’amiable. Legati de limitibus ac pactionibus statuendis.

On appelle grands Commissaires, au Parlement,