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COH — COI

COHOBER, v. a. terme de Chimie. ☞ Voyez Cohobation. Distiller à plusieurs reprises une même liqueur en la reversant sur la même substance dont elle a été tirée, ou sur une nouvelle substance semblable à celle-là. Cohober une liqueur.

COHORD, s. m. nom d’homme. Ce mot se dit encore de trois différentes manières : Gohard, Gunhard, Guichard. Il paroît que Gunhard est le véritable nom, & que les autres n’en sont que des corruptions. C’est aussi le sentiment de MM. de Sainte-Marthe. Gunhardus. S. Gohord étoit Evêque de Nantes au IXe siècle. Il fut tué en 843, le jour de S. Jean Baptiste, par les Normands, qui s’emparèrent de la ville. L’Eglise de Nantes & celle d’Angers font la fête de S. Gohord, comme d’un martyr. Voyez sur ce Saint le Gallia Christiana, première édit. T. III, p. 764, 765.

Il paroît, par ce qu’on a dit, que les noms si communs en France, Gohard, Guichard, Guyard, viennent originairement de Gunhardus. Gohord en vient aussi, par le changement de l’u & de l’a en o, & du g en c, changemens qu’on a faits si souvent.

☞ COHORTAL, s. m. terme d’Hist. ancienne. Serviteur du Préfet du Prétoire.

COHORTE, s. f. c’étoit chez les Romains un corps d’infanterie composé de cinq ou six cens hommes. Cohors. Le mot de cohorte répond aujourd’hui à ce que nous appelons un bataillon. Elle étoit divisée en trois manipules, ou compagnies. Le Centurion de la première cohorte s’appeloit Primipilus, & portoit l’Aigle ou l’étendard de la Légion. Une Légion étoit composée de dix cohortes. Il soutint avec quelques cohortes l’effort des ennemis. Du Rier.

Messieurs de Port Royal ont traduit dans leur Version du Nouveau Testament le mot latin cohors par celui de compagnie. Le P. Amelote a fait la même chose : mais les Peres Jésuites de Patis & M. Simon ont conservé le mot cohorte. Et en effet nos Compagnies ne répondent pas à la cohorte Romaine. Les derniers Traducteurs ont aussi gardé dans leurs Versions du Nouveau Testament le mot de Centurion, où il y a dans le latin Centurio, que les premiers ont exprimé par Centenier.

Dans un ordre de bataille, voici comment les cohortes étoient rangées, & les Postes qu’elles occupoient. La première cohorte avoit la droite de la première ligne, comme les Compagnies de Grenadiers de nos régimens ; les autres suivoient dans l’ordre naturel, en sorte que la troisième étoit au centre de la première ligne de la légion, & la cinquième à gauche, la seconde entre la première & la troisième, & la quatrième entre la troisième & la cinquième : les cinq autres cohortes formoient la seconde ligne dans leur ordre naturel, ainsi la sixième étoit derrière la première, & les autres de suite. La première, la troisième & la cinquième cohorte étoient les meilleures ; on en juge par les postes qu’elles occupoient, que les Romains regardoient comme les plus importans : ce n’est pas que les Généraux Romains n’ayent changé cet ordre de bataille, lorsque la situation du lieu, la surprise, la nécessité de faire une évolution par un simple demi-tour les y obligeoient, de même que nos Généraux ne rangent pas toujours les troupes selon l’ordre des régimens. On croit que Marius fut le premier qui divisa la milice Romaine en cohortes. Voyez Modestus & Vegetius. La première cohorte s’appeloit militaire, Cohors militaris.

Cohorte Prétorienne, c’étoit une troupe de soldats choisis qui servoient de garde au Préteur ou au Général. Cohors Prætoria.

☞ En Poësie on se sert du mot de cohorte ; pour dire, les soldats, les gens de guerre. Il avoit avec lui ses vaillantes cohortes.

Ta valeur arrêtant les troupes fugitives,
Rallia d’un regard leurs cohortes craintives. Boil

☞ On se sert encore de ce mot pour désigner une troupe de toutes sortes de gens quels qu’ils puissent être. Turba, turma, caterva. Le Prévôt est venu accompagné de toute sa cohorte. On voyoit accourir le peuple par nombreuses cohortes.

Il brave des Sergens la timide cohorte. Boil.

Que fait autour de votre porte
Cette soupirante cohorte. La Font.

COHUAGE, s. m. terme de Coutumes. Cohuagium. C’est un droit qui se lève & se prend sur les marchandises qu’on porte aux cohues ou marchés.

☞ COHUE, s. f. vieux mot qui paroît avoir signifié primordialement, assemblée. Depuis il s’est dit des assemblées tumultueuses, ou il se faisoit beaucoup de bruit. De-là vient que ce mot se trouve affecté aux halles, aux marchés, aux foires.

☞ On s’en est servi pour signifier l’assemblée des Officiers de Justice, qui se faisoit en certain lieu pour juger les procès ; comme on voit dans les Ordonnances de l’Echiquier de Normandie de l’an 1383. Tribunalia in quibus judicia exercentur. On s’en est servi depuis pour signifier le lieu destiné à tenir la Justice dans des villages par des Juges pédannés : il est ainsi appelé a coeunte multitudine, selon Chopin. Du Cange croit qu’il vaut mieux le dériver du latin chaos. Il vient plutôt de coui, qui est un vieux mot celtique, ou bas-breton, signifiant la même chose. Ménage témoigne que coua a été dit autrefois pour halle. Or c’est dans les halles que se tiennent la plûpart des petites Justices. On appelle encore la halle, & cohue de Quintin en Bretagne, le lieu où se font les publications de Justice. Il y en a encore plusieurs semblables en Poitou. ☞ C’est dans ce sens qu’on dit aller à la cohue. Le Procureur que je cherchois étoit à la cohue.

Cohue, se dit figurément des assemblées tumultueuses, où il n’y a point d’ordre, où tout le monde parle à la fois. Hominum inter se vociferantium tumultus. Il signifie de plus, criallerie, cris de plusieurs personnes à la fois. On tenoit autrefois de belles conférences chez un tel ; mais il est venu tant d’impertinens, que cela est dégénéré en cohue. Vous trouverez là une cohue souvent fort confuse ; mais assez réjouissante. La cohue vaut mieux pour un peu de tems, & le sérieux pour un commerce qui doit avoir de la suite.

COHYNE. s. m. Arbre de l’Amérique dont les feuilles ressemblent à celles du laurier. Son fruit est aussi gros qu’un melon, & de la figure d’un œuf d’Autruche. Les Indiens en font des tasses : il ne vaut rien pour manger, mais on assûre que sa chair étant pilée & appliquée sur la tête, en appaise les douleurs. Dict. de James. Voyez Calebassier.

COI

COI, COIE. adj. Ce mot n’est guère en usage au féminin. Il signifie, qui n’a aucun mouvement, qui est tranquille, en repos. Quietus, tranquillus, pacatus, sedatus. Tandis que tout est en guerre, ce Philosophe se tient coi dans sa maison. Après cet orage la mer devint coie pendant vingt-quatre heures. Il ne fait pas la moindre haleine de vent, le temps est coi.

On le dit figurément. J’ai une raison péremptoire à alléguer qui le fera taire tout coi. Il y avoit bien des ligues autrefois dans la France : maintenant tout est coi, personne ne remue.

Cois & discrets on les voyoit paroître. Boil.