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qu’à la langue grecque, & chercher brasser dans βράζω, ferveo, ebullio, parce qu’on se sert de feu pour faire de la bière.

En Normandie on appelle brasser, la manière d’exprimer le jus des pommes & des poires. Pour brasser ces sortes de fruits destinés à faire du cidre ou du poiré, on les fait écraser dans le tour du pressoir avec une meule qu’un cheval fait tourner autour. Quand ces fruits sont bien écrasés, on en prend le marc, on le met sur un tablier en le stratifiant avec du gleu ou du glui, jusqu’à une élévation d’environ trois pieds ; puis par le moyen de l’arbre du pressoir & de sa vis, on presse ce marc de façon qu’on en exprime tout le jus, qui tombe du tablier où est le marc, dans le cuvier nomme Bellon ; d’où on le prend pour le mettre dans les tonneaux. C’est-là que la liqueur bout, fermente & devient potable.

Brasser, se dit aussi particulièrement en matière de pêche, de ceux qui agitent & troublent l’eau avec des bouilles, ou bouloirs, pour faire donner le poisson dans les trubles, étiquettes, ou autres filets que le Pêcheur a tendus.

En termes de Marine, Brasser, c’est se servir de bras, ou manœuvres, avec lesquelles on gouverne les vergues. On dit, Brasser à faire servir ; c’est brasser les vergues, ensorte que le vent donne dans les voiles. Brasser à contre ; c’est brasser le bras du vent, afin que le vent donne dans les voiles. Brasser au vent ; c’est brasser les vergues du côté opposé à celui du vent. Brasser les vergues ; c’est en maniant les bras, mettre les vergues horisontalement de l’avant à l’arrière. Brasser les voiles sur le mat, c’est hâler les bras du vent, ensorte que le vent se mette sur les voiles, au lieu d’être dedans ; c’est-à-dire, manœuvrer les voiles, de manière que le vent fasse le contraire de ce qu’il faudroit pour faire filler le vaisseau. ☞ On dit en commandement : brasse tribord devant, brasse bas-bord, &c.

☞ On trouve dans Montaigne, brasser un lit de plumes ; pour dire, le remuer. On le dit encore dans les Provinces, & brasser les cartes, pour les mêler.

Brasser, signifie figurément, faire quelque conspiration. ☞ Pratiquer secrettement quelque complot pour prendre ou trahir quelqu’un. Machinari, moliri. Il y a long-temps qu’ils brassoient cette trahison. Brasser quelque chose contre l’État. Il se dit toujours odieusement. Il n’est pas noble.

Il signifioit autrefois, procurer, fournir. Il ne se dit plus qu’en mauvaise part. Gloss. sur Marot.

Brassé, ée, part.

BRASSERIE. s. m. Lieu où l’on fait de la bière. Cervisiæ officina. Dans un placet des Moines de Fulde à Charlemagne, on trouve braciarium en ce sens, Act. SS. Ben. Sæc. IV. P. I. p. 262. Il est défendu aux Brasseurs de nourrir, ou de tenir en leurs maisons, où sont les brasseries, aucuns bœufs, vaches, porcs, oisons, ni canards, à cause de l’infection que causeroient ces animaux dans les brasseries, qui ne peuvent être tenues trop nettes. De la Mare.

BRASSET. s. f. On appelle à Meaux le Brasset ; un canal d’eau qui environne les fauxbourgs de la ville. C’est l’ancien lit de la rivière de Marne. Hist. de l’Egl. de Meaux, Tom. I. p. 3.

BRASSEUR. s. m. Celui qui fait & qui vend de la bière en gros. Cervisiarius. Les Brasseurs s’appeloient autrefois Cervoisiers. L’histoire des Evêques de Verdun, qu’on trouve dans le Spicilége de Dom Luc d’Achery, appelle les Brasseurs, bracentes.

BRASSEUSE. s. f. Femme de Brasseur.

☞ BRASSEYAGE. s. m. Terme de Marine. C’est la partie qui avoisine le milieu des vergues. On entend par brasseyage ce qui est compris entre les haubans. Le brasseyage est facile quand la vergue ne touche pas les haubans sous le vent, sans être orientée au plus près.

BRASSICOURT, BRACHICOUR substantivement. Terme de Manége, qui se dit d’un cheval qui a naturellement les jambes courbés en arc, à la différence des chevaux arqués, qui les ont courbées par la force du travail.

BRASSIÈRES. s. f. pl. Chemisette, espèce de petite camisole de femme qui sert à couvrir les bras & le haut du corps. Brachiala.

On dit proverbialement, qu’une personne est en brassières ; pour dire, qu’elle est contrainte, qu’elle n’a pas la libre disposition d’agir, de faire ce qu’elle voudroit.

☞ BRASSIEUX. Gros Bourg de France, dans la Sologne, au bord du Beuvron.

BRASSIN. s. m. Est un vaisseau où les Brasseurs font leurs bières. C’est aussi la quantité de bière contenue dans la cuve. Ce mot signifioit autrefois, Affaire.

Soit Philosophe ou Médecin,
Il n’entend rien en tel brassin.

BRASSOIR. s. m. Terme de monnoie. Espèce de canne de terre cuite avec laquelle on brasse l’or en bain. Rudicula. A l’égard de l’argent & du billon, on se sert d’un brassoir de fer, à cause qu’il n’y a pas le même inconvénient qu’à l’or, qui s’aigriroit avec un brassoir de fer ; & de plus, le fer, par son hétérogénéité, feroit pétiller l’or, ce qui causeroit des déchets.

BRATHITE, ou SABINITE. s. f. Pierre figurée. C’est une espèce de la Dendrite. Elle imite les feuilles de la Sabine. Brathites.

☞ BRAVA. Ville d’Afrique, en Ethiopie, au Zanguebar, sur la côte d’Ajan, dans un petit État indépendant. C’est aussi le nom de la plus méridionale des Îles du Cap Vert, connue par ses bons vins.

BRAVACHE. s. m. Fanfaron sur le fait de la valeur, faux brave. Traso. Ce mot est un peu vieux, & ne peut entrer que dans le discours comique & burlesque.

BRAVACHERIE. s. f. Bravade, menace fière & insolente, fanfaronade. Cotgrave seul. Frivola jactantia. Il n’y a ni rodomontade d’Espagne, ni bravacherie Napolitaine, ni mutinerie Walonne, ni Fort d’Antonia, ni du Temple ou Citadelle dont on nous menace, qui nous puisse empêcher de desirer & demander la paix. Sat. Men. t. 1, p. 176.

BRAVADE. s. m. Menace d’un fanfaron, ☞ action de braver quelqu’un par ses actions, par ses paroles ou par ses manières. Ferocio insultatio. Ceux qui font le plus de bravades, sont bien souvent les plus poltrons. Voilà où se sont terminées toutes ses bravades. Voit. Fabius étoit trop prudent pour prendre les bravades d’Annibal pour autant d’affronts. S. Evr.

Les bravades enfin sont des discours frivoles,
Et qui songe aux effets, néglige les paroles. Corn

Bravade, s. f. est aussi le nom d’une fête instituée en 1256, par Charles d’Anjou, à son retour de la Terre-Sainte, & qui se fait à Aix en Provence. Celui qui a abattu l’oiseau est déclaré Roi par les Magistrats, il se choisit un Lieutenant & un Enseigne, qui lévent chacun une compagnie ; & la veille de la fête de S. Jean-Baptiste, ils se rendent dans la place de la ville, où le Parlement & les autres Corps se trouvent aussi pour allumer le feu, & cela s’appelle la Bravade ; peut-être parce qu’ils sont braves, c’est-à-dire, vêtus magnifiquement, ou plutôt parce que cette fête fut établie pour entretenir les habitans dans l’exercice de la guerre, & les rendre braves.

☞ BRAUBACH, Brocubachium, ou brubachium, petite ville d’Allemagne, sur le Rhin, dans la Wétéravie.

BRAVE. adj. m. & f. & s. Excellent en sa profession. Eximius, insignis, egregius. On dit un brave homme, un brave soldat, brave cavalier, qui fait toutes choses d’une manière noble & honnête. Il l’a fait en brave homme, & le doit soutenir. Corn. Cette qualité ne doit être attribuée qu’à un homme