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piston qu’ils font entrer dans la Canonière. Ils l’appellent aussi quelquefois canon. Tubulus sambuceus mittendis globulis innoxiis, ou tubulus sambuceus.

CANONIERES. En termes de Maçonnerie, sont les ouvertures qu’on laisse dans les gros murs & terrasses, pour évacuer les eaux. Fenestellæ aquis emittendis comparatæ.

CANONIQUE. adj. m. & f. Livre sacré & authentique, qui a autorité dans l’Eglise, comme faisant une partie de la Bible. Legitimus, canonicus. On les appelle ainsi, parce qu’ils sont dans le Canon, ou dans le Catalogue des Livres sacrés. Quelques Peres distinguent les Livres de la Bible en trois classes : les Protocanoniques, les Deuterocanoniques, & les Apocryphes. Du Pin. Le Livre de Judith est un Livre canonique dans l’Eglise Catholique ; les Calvinistes le rejettent mal-à-propos. Les Epîtres de saint Pierre sont reçues par l’Eglise pour canoniques, quoique saint Jérôme dise que plusieurs de son temps tenoient la seconde pour apocryphe, à cause de la différence du style. Il n’appartient qu’à l’Eglise de déclarer un Auteur, ou un Livre Canonique.

☞ Le Canon des Livres du nouveau Testament n’a point été dressé par aucune assemblée de Chrétiens, ni par aucun particulier. Il s’est formé sur un consentement unanime de toutes les Eglises, qui avoient reçu par tradition, & reconnu de tout temps certains livres comme écrits par certains auteurs inspirés du Saint Esprit, Prophètes, Apôtres, &c. Quoique quelques Livres du nouveau testament n’aient pas été reçus au commencement dans toutes les Eglises, ils se trouvent tous dans les catalogues anciens des Livres sacrés, si on en excepte l’Apocalypse, qui n’est point dans le Canon du Concile de Laodicée, mais que le consentement unanime des Eglises a depuis autorisé.

Canonique, se dit aussi de ce qui est fait selon les Canons & les Règles de l’Eglise. Mariage canonique. Doctrine canonique. Ce Prélat a toujours mené une vie canonique ; ses écrits ne contiennent rien que de canonique. La Commende d’une Abbaye est un titre canonique en France. On appelle Peines canoniques, les peines que l’Eglise peut imposer : telle est la déposition, l’excommunication, des aumônes, des jeûnes, ou quelque autre pénitence corporelle. Le Juge d’Église peut même condamner à l’amende honorable, pourvu qu’elle se fasse dans son Prétoire seulement.

On appelle aussi la Jurisprudence Canonique, le corps & la science du Droit Canon. Un cours canonique. Voyez Droit canon.

Canonique. s. m. Droit des prémices qui se payoit autrefois à l’Evêque dans l’Eglise Grecque, estimation des prémices que les Laïques devoient à l’Evêque chaque année. Primitiæ, jus primitiarum Episcopo solvendum. L’empereur Issac Comnene fit une Constitution pour régler le Canonique des Evêques. Alexis Comnene son neveu la confirma par une autre Constitution du mois de Septembre 1086, indiction 9e. Un village de trente feux payoit pour le Canonique une pièce d’or, deux d’argent, un mouton, six boisseaux d’orge, six de farine, six mesures de vin, & trente poules. Les autres payoient de même à proportion du nombre de leurs habitans.

CANONIQUEMENT. adv. D’une manière canonique, selon les Canons. Legitimè, canonicè. Ce mariage a été célébré canoniquement. Il a été pourvu canoniquement de ce Bénéfice.

CANONISATION. s. f. Déclaration du Pape, par laquelle après plusieurs enquêtes & solennités, il met au Catalogue des Saints un homme qui a mené une vie sainte & exemplaire, & qui a fait quelques miracles. Alicujus in numerum Sanctorum relatio, abscriptio, canonisatio. Du Cange dit que d’abord la canonisation n’étoit autre chose qu’un ordre du Pape par lequel il commandoit que le nom de ceux qui s’étoient fait remarquer par leur sainteté fussent insérés dans le Canon de la Mésse. Pour honorer quelqu’un d’un culte public comme Saint, les miracles qu’il fait ne suffisent pas, il faut un décret de canonisation.

Pour être pleinement instruit de la manière dont on procède à Rome à la béatification & à la canonisation des Saints, de la sagesse avec laquelle on s’y conduit, & des précautions infinies, que l’on y prend, il faut lire sur cette matière l’excellent ouvrage du Cardinal Lambertini, mort souverain Pontife, sous le nom de Benoît XIV. Il est en quatre volumes in-fol. intitulé De Beatificatione Servorum Dei, & Canonizatione Beatorum.

Le P. Mabillon, dans la Préface du Ve sièclee des Acta SS. Bened. n. 88, remarque très-bien que le terme de canonisation n’est pas si ancien que la chose même, puisque ce mot ne se trouve point avant le XIIe siècle. Le premier qui s’en soit servi est Udalric, ou Oudry, Evêque de Constance, dans sa Lettre à Calixte II, pour la canonisation de l’Evêque Conrad. Ensuite Alexandre III, dans la Bulle de canonisation de S. Edouard, Roi d’Angleterre en 1161, & 11 ans après, dans celle de la canonisation de S. Thomas de Cantorberi ; puis Pierre de Celles & plusieurs autres s’en sont aussi servis.

Le P. Mabillon distingue une canonisation générale, & Une particulière. La première est celle qui se faisoit par un Concile général, ou par le Pape ; la seconde celle qui se faisoit par un Evêque, par une Eglise particulière, ou par un Concile particulier. Il y a quelques exemples de canonisations, ou d’une espèce de canonisation, qui semblent faites par un Abbé. Ainsi Ste Viborade tuée par les Barbares le 2e jour de Mai 925, ayant fait beaucoup de miracles à son tombeau, le jour de l’anniversaire étant venu, l’Abbé Engilbert, après en avoir délibéré avec ses Moines, ordonna d’en faire l’Office, & d’en dire la Messe comme d’une Vierge. Voyez le P. Mabillon præf. 5 sæc. 1, n. 91. M. l’Abbé Fleury ajoute que c’étoit avec l’autorité de l’Evêque.

Les premiers Saints que l’Eglise a canonisés sont les Martyrs : elle a commencé plus tard à canoniser les Confesseurs.

Le premier exemple d’un Acte de canonisation faite par le Pape, & qui soit sur, est, non pas celui de canonisation de S. Hugues faite par Innocent II, dans le XIIe siècle ; mais celui de la canonisation de S. Uldric, ou Udalric Evêque d’Ausbourg, faite par le Pape Jean XV le 11 Juin, l’an 983 de J. C. & le 8e de son pontificat. Cette canonisation fut faite vingt ans après la mort du saint : elle est signée du Pape, de cinq Evêques des environs de Rome, & de neuf Prêtres & trois Diacres Cardinaux. Le terme de canonisation n’étoit pas cependant encore en usage. Cet Acte est dans Baronius, dans la Collection des Conciles du P. Labbe, Tome IX, p. 741, & dans le Propylœum ad Acta SS. Maii. Voyez aussi Acta SS. Ben. sæc. V, Prœf n. XCIX, & p. 471.

La canonisation consistoit autrefois à mettre le nom du Saint dans les sacrés Diptyques, ou dans le Canon, c’est-à-dire, le Catalogue des Saints ; à ériger sous leur invocation des Eglises, ou des Oratoires, avec des Autels pour y offrir le saint sacrifice ; à tirer leur corps de leur premier sépulcre, & autres choses semblables : & ces manières de canoniser sont très-anciennes. Le Pape n’étoit pas le seul qui eût le droit de faire des canonisations ; les Ordinaires, sur-tout les Métropolitains, & les Primats l’avoient aussi en faisant leurs visites, ou bien dans un Concile de leur Province. On ne sait point quand le droit de canoniser a commencé à être réservé au Pape. Quelques-uns croient qu’Alexandre III est l’Auteur de cette réserve. Ils se fondent sur ce que dans le IIIe Liv. des Décrétales, ramassé par Boniface VIII. Tit. 45 de Reliquiis & Venerat. Sanct. Cap. Audivimus, on lit ces paroles, Ne liceat aliquem pro Sancto absque auctoritate Romanæ Ecclesiæ venerari. Mais ces paroles ne sont pas