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CAN

nées sont entre deux. Les ouvertures de ces motagnes par où les rivières coulent, conservent la force de l’air. La plus grande portée du canon est, lorsqu’il est élevé de vingt-cinq degrés. Voyez Hanzelet, qui en a décrit toutes les portées de degré en dégré, & la manière d’en calculer l’augmentation ou la diminution, à proportion de son élévation. Le canon doit être posé sur son affût, & arrêté avec des surbandes qui se serrent sur ses tourillons. Cet affût a la culasse dentelée de trois ou quatre dégrès nommés coches, sur lesquelles le canonier pose le point de mire pour tirer. Darcous dit avoir inventé une manière de suspendre le canon dans un vaisseau, qui le fait demeurer dans son point de mire, nonobstant l’agitation de la mer.

Canon (la) poudre à, est une composition faite de salpêtre, de soufre & de charbon, qui s’enflamme & se raréfie aisément, & qui est cause de tout l’effet du canon. Pulvis pyrius. Polydore Virgile dit qu’elle fut inventée par hazard ; qu’un Chimiste ayant de cette composition dans un mortier qu’il avoir couvert d’une pierre, le feu s’y prit, & fit sauter en l’air la pierre avec une grande violence. Thevet dit que c’étoit un Moine de Fribourg, nommé Constantin Anclitzen. Mais Bellefost & d’autres meilleurs Auteurs, disent que ce fut un nommé Bertolde Schwartz ou le Noir, qui l’inventa. Il en enseigna premièrement l’usage aux Vénitiens l’an 1380, en la guerre qu’ils avoient contre les Génois en un lieu nommé autrefois Fosse-Claudienne, & à présent Chioggia ; & néanmoins Pierre Messie dit en diverses leçons, que les Mores qui étoient assiégés en l’an 1343, par Alphonse XI, Roi de Castille, tiroient certains mortiers de fer qui faisoient un bruit semblable au tonnerre. Et Dom Pèdre, Evêque de Léon, en la Chronique du Roi Alphonse, qui conquit Tolède, dit qu’en une bataille navale qui fut donnée entre le Roi de Thunis, & le Roi More de Séville, il y a plus de 400 ans, ceux de Thunis avoient certains tonneaux de fer avec quoi ils tiroient forces tonnerres de feu. Du Cange dit qu’on voit dans les Registres de la Chambre des Comptes, que l’usage en étoit en France dès l’année 1338.

Larrey, dans son Hist. d’Angl., Henri VIII, p. 343, prétend que c’est en Angleterre qu’on vit en 1535 les premiers canons de cuivre, & dit qu’on en attribue l’invention à Jean Owen. Il avoue néanmoins qu’il en avoit paru quelques-uns auparavant de même métal, mais bien au-dessous de la perfection de ceux-ci. Le même Auteur, dans sa seconde partie, p. 686, dit qu’en 1346, à la bataille de Crécy, il y avoit cinq pièces de canon dans l’armée angloise ; que ce fut la première fois qu’on s’en servit dans les batailles. Mezeray rapporte que le Roi Edouard jeta l’épouvante dans l’armée françoise par cinq ou six pièces de canon, parce que c’étoit la première fois que l’on eût vu de ces foudroyantes machines. Larrey ajoute que quelques-uns cependant en font l’usage de quelques années plus ancien, & disent que l’année 1338 les François s’en étoient servis au siège de Puy-Guillaume en Auvergne.

Les premiers canons on été appelés bombardes, du mot latin bombus, à cause de leur bruit éclatant. Les canons ont eu divers noms, diverses longueurs & divers calibres. Les premiers canons ont été appelés cardinales, mulets, basiliques, ribadoquins, émerillons, serpentines, passevolans, verteuils ou sautereaux, sacres, coulevrines, barces, fauconneaux, bastardes, &c. qui seront expliqués à leur ordre. Les plus ordinaires & réguliers de fonte verte sont les canons ou coursiers de 9 à 10 pieds de long, calibre de Roi de six pouces de diamètre, & portent une balle de 33 livres un tiers. Le canon de fer coulé ou de fer battu n’a point de régle, & ne porte que douze livres de balle pour le plus.

Canon, se dit aussi de la partie des mousquets, fusils, carabines, pistolets, & autres armes à feu où se met la charge de poudre & de plomb. Tubus æreus, fistula œrea. Il est posé sur un petit fût pour le tirer a la main. Suivant l’ordonnance de 1689 pour la marine, le canon des mousquets doit être de trois pieds neuf pouces de long, d’un fer doux bien lié, & bien soudé, point pailleux, ni cassant, ni brasé, ni éventé, bien foré au dedans, & limé au dehors : le derrière du canon doit être à pans, renforcé jusqu’au tiers ; & le devant doit être rond & déchargé de fer.

☞ On appelle canon brisé, un canon coupé en deux parties qui se joignent ensemble. Voyez Brisé.

Canon rayé ou carabiné, est celui en dedans duquel on a tracé des lignes creuses, des moulures longitudinales ou circulaires. Ils en tirent plus juste & portent plus loin. Intus striatum.

Canon. Terme de Serrurier. C’est la partie d’une clef qui est forée, & qui joint l’anneau. Tubulus clavis. C’est aussi la partie de la serrure, dans laquelle entre le bout de la tige de la clef, quand elle n’est pas forée.

Canon. On appelle canon de soufre, celui qui est en bâton & rouleau tel qu’on le vend.

On appelle canons de gouttière, en termes d’Architecture, des bouts de tuyau de cuivre ou de plomb, qui servent à jeter les eaux de pluie au-de-là d’un cheneau & d’une cimaise par les gargouilles, pour les empêcher de tomber au pied du mur dont elles pourroient endommager les fondemens. Stillicidii tubus.

Canon, se dit, en termes d’Horloger, de tout ce qui est creusé intérieurement. ☞ On adapte des canons ou petits, cylindres, percés de part en part à différentes pièces ou roues, pour qu’elles tournent sur des arbres ou tiges sans aucun bercement.

Canon, est aussi le tuyau d’une plume, & la partie qui sert à écrire, Pennæ caulis.

Canon, se dit aussi par les chaudronniers, pour signifier une sorte de tuyau qui entre dans le corps de l’arrosoir, & au bout duquel est la pomme de l’arrosoir, qui est pleine de petits trous par où sort l’eau qui arrose. Tubulus. ☞ C’est encore chez les chaudronniers un morceau de fer à tête large & forée, que l’on appuie sur la pièce, à l’endroit où on la perce.

Canon. Les tourneurs appellent aussi les canons d’un arbre à tourner en ovale, ou en d’autres figures irrégulières, deux cylindres creux, qui sont traversés par la verge de fer quarrée qui joint la buelte au mandrin.

Canon à dévider, est une manière de petit bâton tourné avec des rebords, qui presque à son extrémité a un trou pour mettre la broche du rochet.

Canon, se dit aussi d’un pot de faïance un peu long & rond, où les Apothicaires de Paris mettent les électuaires & les confections.

Canon, signifie aussi un petit tuyau qu’on met au bout des seringues pour donner des clystères.

Canon, signifie, en termes d’Imprimerie, les plus gros caractères avec lesquels on imprime. Crassiores characteres. Il y a le gros double canon, le gros canon, le trismegiste ou canon approché & petit canon, le tout avant le gros parangon, & le gros romain.

Canon. Chez les anciens, les canons sont comme des sections ou des titres dans un ouvrage. C’est ainsi que S. Hilaire a divisé son Commentaire sur S, Matthieu en 33 canons. Ce mot pour marquer les titres ou sommaires des livres de la Bible, se trouve dans les plus anciens exemplaires latins, C’est ce que les Grecs appellent κεφαλαῖα, chapitres.

Canon, en Géométrie & en Algèbre, signifie une régle générale pour la solution de plusieurs questions d’un même genre. On dit plus communément aujourd’hui Méthode & formule.

Canon, en termes de manège, est la partie de la jambe du train de devant du cheval, comprise entre le genou & le boulet. Tibia. Il y a une fusée au canon de ce cheval.

Canon, est aussi une partie d’un mors, ou d’une embouchure de cheval. Tubulus. C’est une pièce de