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CAN

fondément & plus fortement ; car elles surpassent les autres en longueur. Les dents canines d’enhaut sont nommées œillères.

Le quatrième muscle des lèvres s’appelle canin, parce qu’il prend son origine de l’os de la mâchoire supérieure au-dessus de la dent canine, & va s’insérer à la lèvre inférieure proche l’angle de la bouche, pour tirer cette lèvre en haut. Dionis. Cet adjectif n’a d’usage que dans ces phrases.

CANINANA. s. m. Serpent de l’Amérique, long d’un pied & demi, ou de deux pieds ; son dos est vert, son ventre est jaune. Il suit les hommes sans leur faire de mal, & se laisse prendre aisément comme les chiens ; & c’est de-là qu’on l’appelle Caninana, de canis, chien. Sa chair est en usage dans le pays, comme celle de la vipère en Europe.

CANINGA. s. m. Arbre qui croît dans les montagnes de l’Île de Cuba. Son tronc est gros & noirâtre auprès des racines. Son écorce a le goût de cannelle, & de girofle ; on l’ôte comme celle de la cannelle, & elle est plus épaisse. Les habitans de l’Île de Cuba, s’en servent pour assaisonner leurs viandes, & même ils l’emploient en remèdes.

CANIRAM. s. m. Grand arbre branchu, qui croît au Malabar. Son tronc, que deux hommes peuvent à peine embrasser, est couvert, de même que les plus grosses branches, d’une écorce cendrée, blanchâtre ou rougeâtre. Les petites branches sont d’un vert sale, pleines de nœuds, & couvertes d’une écorce amère. Ses feuilles sortent de deux en deux de chaque nœud : elles sont d’une figure ronde, oblongue, & extrêmement amères. Des nœuds des petites branches sortent des fleurs disposées en parasol, composées de quatre, cinq, ou six pétales, d’un vert d’eau, pointues, d’une odeur foible, mais assez agréable. Son fruit est une pomme ronde, lisse, de couleur d’or, dont la chair, quand elle est mûre, est blanche, mucilagineuse, & couverte d’une écorce épaisse & friable : cette chair, aussi bien que la semence qu’elle contient, ont un goût très-amer, de même que toûtes les parties de l’arbre.

☞ CANISCHA ou CANISE. Ville forte de la basse Hongrie, dans le comté de Salavar, sur la rivière de Sala. Canischa est le vrai nom.

☞ CANISTRO. Petite ville de Turquie en Europe, dans la Macédoine, sur la côte de l’Archipel, près du cap de ce nom.

Sa racine prise en décoction, ou en infusion, est cathartique, bonne pour les fièvres pituiteuses, pour la colique, les tranchées, & les cours de ventre, &c. Son écorce pilée & paîtrie avec de l’eau dans laquelle on a fait tremper du riz, arrête les dissenteries billieuses. Le suc exprimé de ses feuilles, pris dans une décoction, appaise les maux de tête : mais il produit l’effet du poison & cause la mort, lorsqu’on en boit en trop grande quantité. Dict. de James.

CANIVEAUX. s. m. pl. Ce sont les gros pavés, qui étant assis alternativement avec les contre-jumelles, traversent le milieu d’un ruisseau, d’une cour, ou d’une rue. Une pierre taillée en Caniveaux est celle qui est creusée dans le milieu, pour faire écouler l’eau.

CANIVET. s. m. Diminutif de Canif. Les Espagnols, pour dire un canif, disent gannivette, du diminutif cannivet, qu’on dit dans le Boulonnois & dans la Touraine, au lieu de canif. Dict. Étim. de Ménage, au mot canif. Chapelain, quoique Parisien, s’est servi du mot de canivet, en écrivant à M. Huygens sur la cabale qui se forma à l’Académie Françoise, pour empêcher l’élection de Gilles Boileau. Il y a apparence, dit-il, que cet orage se dissipera bientôt, & que les Muses retourneront à leurs Musettes, & rangaîneront leurs stilets & leurs cannivets. Mélanges de Littérature, tirés des Lettres manuscrites de M. Chapelain.

Ces mots viennent, selon quelques-uns, de canna, qui est un bout de plume, parce que les canifs servent à la tailler. Ménage dit qu’il vient de l’Allemand, ou de l’Anglois knife, qui signifie un petit couteau.

CANNAGE. s. m. Mesurage des étoffes, toiles, rubans, &c. qui se fait avec la mesure des longueurs, qu’on appelle canne.

CANNAIE. s. f. Lieu planté de cannes & de roseaux. Arundinetum, cannetum.

☞ CANNARES. Province & peuples de l’Amérique méridionale, dans l’audience de Quito, au Pérou. Ces peuples adorent le soleil. Quand les Espagnols arrivèrent dans ce pays, ils trouvèrent un palais magnifique appelé Thomebanba ou Thumi pampa. Rien ne pouroit égaler la magnificence du Temple qu’on y voyoit. Il étoit dédié au soleil. Les portes, ornées de peintures, étoient enrichies d’émeraudes enchassées dans l’or. Les murailles du Temple, ainsi que celles du palais du Roi, étoient revêtues de lames d’or. Il ne reste de tout cela qu’une fort grande masure.

CANNE. s. f. Terme de Botanique, qui convient à quelques genres de plantes bien différens les uns des autres. Canna, arundo. Il y a la canne ou le roseau ; la canne d’Inde, & la canne odorante. La canne, ou le roseau, est un genre de plante si semblable au chien-dent, qu’il n’y a que la seule grandeur des tiges des feuilles, qui en établisse la différence. Il y en a plusieurs espèces : celle qu’on appelle canne commune, arundo vulgaris, ou vallatoria, a sa racine noueuse, qui s’étend ça & là. La tige croît à la hauteur de douze ou quinze pieds : elle est de la grosseur du doigt, creuse & pleine de nœuds. De chacun de ces nœuds sortent les feuilles qui enveloppent presque la tige, & qui sont roides, un peu âpres, larges de deux doigts, & longues d’un pied & demi, & veineuses. Au bout des tiges naissent les fleurs par paquets, composées de plusieurs filets, qui forment une chevelure molle, de couleur de pourpre, qui devient ensuite cendrée, & que le vent emporte. Elle croît dans les eaux dormantes, & aux bords des rivières. On s’en sert en divers endroits pour couvrir les maisons, pour faire des cloisons, des échalas, & à plusieurs autres usages. Il y a une espèce de canne, qu’on appelle arundo scriptoria, dont les Anciens se servoient pour écrire, & dont se servent encore aujourd’hui les Arabes, les Persans, les Arméniens, les Grecs & les Turcs. Il y en a une autre espèce qui est appelée arundo sagittalis. Les Tartares & les Asiatiques s’en servent pour faire des flèches & des dards. On en porte des Indes d’une sorte qui est souple & flexible, dont on fait des corbeilles, & d’autres beaux ouvrages. On en porte aussi qui sont fermes & plus grosses, qui servent à faire des bâtons pour s’appuyer. Le bambou est une espèce de canne. Voyez Bambou.

La canne qui porte le sucre croît ordinairement de la hauteur de cinq, six, ou sept pieds, & de la grosseur de deux pouces en circonférence : elle est divisée par plusieurs nœuds, qui sont éloignés de quatre ou cinq pouces les uns des autres. La tige pousse de longues feuilles vertes, touffues, du milieu desquelles s’élève la canne, qui est aussi chargée en son sommet de plusieurs feuilles pointues, & d’un pennache dans lequel se forme la semence. Elle est remplie d’une moëlle blanche, & succulente, de laquelle on exprime cette douce liqueur, dont se forme le sucre. Arundo saccharifera.

La Canne d’Inde ou Cannacorus, est une autre sorte de plante, dont il y a aussi plusieurs espèces. Celle que les Botanistes appellent arundo Indica latifolia, ou cannacorus latifolius vulgaris, a une tige noueuse, de la hauteur de deux, de trois, & quelquefois de quatre pieds. Ses feuilles sont grandes, roulées comme des cornets de papier, lorsqu’elles commencent à sortir : elles se développent ensuite, paroissent fort amples, membraneuses, un peu pointues, ayant beaucoup de veines qui les traversent obliquement, Au sommet de la tige sont