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BUR

la charge & la dignité de Burgrave. Burgraviat est aussi le territoire dépendant d’un Burgrave.

BURGUNDE ou BURGONDE. Nom de peuple. Burgundus. Voyez Bourguignon ; c’est le même peuple, & communément on se sert du mot de Bourguignon, même en parlant des premiers Burgondes. Je n’ai vu jusqu’ici que M. de Tillemont, qui emploie le mot Burgonde. Zozime prétend que les Gots, les Carpes, les burgundes & les Borans, tous peuples qui habitoient le long du Danube, ravagerent toute l’Illyrie & toute l’Italie. Tillem}., au IVe Tom. de son Hist. des Emp. p. 17 & 18. Il distingue les Burgondes des Bourguignons. Les Gots, dit-il, après avoir vaincu les Burgondes, travailloient à les exterminer entièrement ; mais les Burgondes étoient soutenus par les Alains & les Tervinges. Une autre partie des Gots, jointe aux Taifales, faisoit la guerre aux Vandales & aux Gépides. Les Bourguignons avoient occupé divers pays sur les Allemands. Il a retenu le nom de Burgondes, pour ceux qui resterent sur les bords du Danube, & il appelle Bourguignons ceux qui passerent le Rhin, & s’établirent en Gaule.

BURGUNDIONS. s. m. pl. M. Corneille, dans son Dictionnaire-Géographique, a fait ce nom du latin Burgundiones, mais mal. Quoiqu’en parlant des anciens peuples on se serve souvent de leurs noms latins ou grecs, en y donnant une forme françoise, comme nous l’avons dit bien des fois, on n’en use pas néanmoins ainsi, par rapport à celui-ci, & l’on dit toujours Bourguignons, même en parlant des anciens peuples qui passerent le Rhin, & vinrent s’établir dans la Séquanoise, à laquelle ils donnerent le nom de Bourgogne. C’est ainsi entr’autres que parle toujours M. de Cordemoy, ne disant jamais Burgundions, lui qui par-tout ailleurs emploie les anciens noms des peuples & des pays.

☞ BURIA. Les habitans de la Carinthie appellent ainsi un vent d’Est qui regne quelquefois chez eux avec tant de violence, qu’il est capable d’emporter les voyageurs avec leurs montures, & de renverser tout ce qu’il rencontre.

☞ BURICK. Petite ville d’Allemagne, sur le Rhin, au Duché de Clèves.

BURIDAN. Nom d’homme. buridan étoit un Docteur & Recteur de l’Université de Paris dans le XIVe siècle, & il passa pour un des plus habiles Philosophes de son temps. C’est de lui qu’est venu le proverbe que l’on dit à un homme irrésolu, qui ne sait à quoi se déterminer, qu’il ressemble à l’âne de Buridan. Ce proverbe est fondé sur ce que disent les Philosohes, & que disoit apparemment Buridan, qu’un agent qui n’est pas libre entre deux objets, qui ont une égale force pour le déterminer, ne se déterminera jamais à l’un plûtot qu’à l’autre. Par exemple, un âne au milieu de deux picotins d’avoine tout semblables, également distans, agissant sur lui avec une égale force, ne se déterminera jamais à l’un plutot qu’à l’autre, & mourra de faim entre les deux. Cela me fait appréhender qu’il ne t’arrive comme à l’âne de Buridan, qui mourut de faim entre deux picotins d’avoine, faute de se résoudre auquel il devoit alonger le cou, parce qu’ils étoient également distans de lui. Mascur, p. 25. Il paroît par les Annales de Bourgogne de Paradin, L. II, p. 172, qu’en Bourgogne on dit l’âne Burdin, au-lieu de l’âne de buridan, & il rapporte une autre origine de ce proverbe. Calixte II, dit-il, prit prisonnier un Espagnol nommé Burdin, qui avoit été fait Antipape contre Gelase II, par l’Empereur Henri. C’est celui qui prit le nom de Grégoire VIIIe, au commencement du XIIe siécle. Il n’étoit pas Espagnol, mais Limousin mêné en Espagne par Bernard, Archevêque de Tolède, & élevé ensuite à l’Evêché de Crême, on le revêtit d’une peau de chévre sanglante, les cornes élevées sur son front ; on le fit monter sur un chameau, le visage tourné du côté de la queue de la bête, qu’il tenoit de la main en forme de bride, & en cet état on le promena dans Rome. Quelques-uns disent, ajoute Paradin, que le proverbe de l’âne Burdin, fréquent en Bourgogne, prit de-là son origine.

BURIN. s. m. Pointe d’acier qu’on pousse avec la main pour graver sur les métaux, soit argent, cuivre ou étain. Cœlum. On appelle une planche gravée au burin, celle dont on tire les images en taille douce, à la différence de celles qui sont gravées en eau forte, qui sont plus rudes.

Les Serruriers ont aussi des burins. Ils en ont de plats, de coulans, de carrés, & d’autres propres à piquer les rapes. Ils se servent de burins plats pour fendre les panetons des clefs, & c’est encore avec ces sortes de burins qu’ils coupent & emportent le fer à froid, lorsqu’il s’y trouve des grains.

On dit figurément d’un Graveur, que c’est un bon burin ; pour dire qu’il manie bien le burin. Cæti tractandi peritus artifex.

☞ On dit encore mieux qu’il a le burin délicat, élégant. En parlant des estampes gravées au burin, on dit c’est le burin d’un tel. On dit aussi qu’un burin a du mérite, du gout, &c. pour dire les estampes.

Burins, ou Tappes, en marine, sont les outils dont on se sert pour calfater les vaisseaux.

Burin, est aussi un terme d’arracheur de dents ; c’est un instrument d’acier avec lequel ils nettoient les dents en les raclant fortement. Dentiscalpium.

BURINER. v. a. absolu. Graver avec le burin sur les métaux. Cœlare. Buriner une planche. Faire buriner des armes. Buriner les dents, c’est les nettoyer avec le burin, comme font les arracheurs de dents. Purgare, radere, scalpere dentes.

BURINÉ, ÉE, part.

☞ BURKEN. Ville d’Asie, dans la Perse, au Turquestan.

☞ BURLATZ. Petite ville de France, dans le Languedoc, sur la riviere d’Agoût.

BURLESQUE. adj. m. & f. & s. m. Plaisant, gaillard, tirant sur le ridicule. Style bouffon, rempli d’expressions propres à faire rire ; poësie triviale & plaisante, propre à jeter du ridicule sur les choses ou sur les personnes. Jocularis, ludicra dictio. Ce mot est assez moderne, ainsi que le genre singulier de poësie qu’il exprime. Sarrasin se vantoit d’en avoir usé le premier. Il nous est venu d’Italie, où il y a quantité de Poëtes burlesques, dont le premier a été Bernica, & ensuite Lalli, Caporali, &c. La fureur burlesque se déborda en France, & y fit d’étranges ravages ; mais on s’en guérit bientôt, & elle n’y regna pas long-temps, à cause qu’on introduisit trop de licence, tant dans les sujets que dans les vers, & trop de ridicules plaisanteries. Le burlesque y étoit devenu tellement à la mode, qu’en 1649 il parut un livre avec ce titre, La passion de notre Seigneur en vers burlesques. Scaron y excella, & fut agréablement ridicule. On appelle en prose, style burlesque, celui où l’on emploie des mots qui se disent par pure plaisanterie, & qu’on ne souffre point dans le sérieux. Ce style souffre tout. Le P. Vavasseur a soutenu, dans son livre De ludicra dictione, que le burlesque a été absolument inconnu aux Anciens, quoique quelques-uns disent que du temps de Ptolomée, fils de Lagus, un nommé Raintou avoit traité en ridicule des sujets sérieux de Tragédie.

En dépit du bon sens le burlesque effronté
Trompa les yeux d’abord, plut par sa nouveauté. Boil.

Mais laissons le burlesque aux plaisans du Pont-Neuf.

Idem.


J’aime assez Bergerac, & sa burlesque audace. Id.

On voit pas plusieurs exemples que l’on vient de citer que l’on dit aussi le burlesque substantif masculin, pour signifier le style burlesque, comme on dit le françois, l’italient, l’espagnol, l’allemand, &c. pour la langue françoise, italienne, espagnolle, &c. Naudé traite du burlesque dans son Mascurat, p. 210 & suiv. où il y a plusieurs choses singulières, tant sur le style burlesque des François, que sur celui