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BEL

BELIAL. s. m. C’est le nom qu’on donne au démon, & qui signifie en général quelque chose de fort mauvais, fort malin ; celui qui ne sauroit souffrir le joug : ce qui convient très-bien au démon, aux libertins, & aux grands pécheurs. S. Paul, i, Cor. VI, 15, donne ce nom au démon, & l’oppose à J. C. Quel accord entre J. C. & Belial ? Port-R. Et quelques-uns croient en effet que c’est un nom du démon : Aquila le rend par Apostat, Ἀποστάτης, & Suidas au mot Βελίαρ, où il faut lire Βελιάλ, comme a remarqué Hoffman, & comme M. Kuster a corrigé, Suidas dit que c’est là sa signification en hébreu. La Paraphrase chaldaïque l’interpréte רשעא, impiété, méchanceté ; mais je ne sai où un Auteur moderne a pris que Belial est le nom d’une idole des Sidoniens : ce Dieu de Syrie a échappé, si je ne me trompe, à Seldenus.

L’Ecriture fait entrer ce nom dans plusieurs phrases que notre langue a consacrées ; ainsi l’on dit, enfans de Bélial, Deut. XIII, 13. Des enfans de Bélial sont sortis de vous, qui ont détourné du Seigneur les habitans de la ville. Sac. Fille de Bélial, i, des Rois I, 16. Anne répond au grand Prêtre Héli, qui l’accusoit d’être ivre, ne croyez pas que votre servante soir comme l’une des filles de Bélial. Sacy. & Semeï dit à Davis, II, des Rois, XVI, 7. Sort, homme de sang, & homme de Bélial. Id. David dit au même livre, XXII, 5. Les douleurs de la mort m’ assiégé, les torrens de Bélial m’ont épouvanté. Id. Nahum I, 15, promet à Juda que Bélial ne passera plus au milieu de lui ; parce qu’il est entièrement détruit. R. David Kimhhi, dans son Commentaire, dit que Bélial signifie Sennacherib, qui étoit mort.

Ce mot est hébreu, mais il n’est pas aisé d’en déterminer l’étymologie. Quelques-uns prétendent qu’il est formé de la négation בל, ou בלי, & de עול, joug, & qu’il signifie un homme qui n’a point de joug, & qui ne le peut souffrir, qui secoue le joug de Dieu, de la loi, de sa conscience, un impie, un scélérat. Il semble que ç’ait été là le sentiment des Septante, qui traduisent בני בליעל, enfant de Bélial, παράνομοι. Ils le traduisent encore en d’autres endroits, λοιμὸς, ἀσεϐὴς, ἄφωρον, ἀνόμημα, ἀνομία, παλαίωσις. Peut-être aussi étoit-ce le sentiment d’Aquila, qui le rend par Ἀποστάτης, Apostat. C’est celui de S. Jérôme, de plusieurs Modernes aussi-bien que des Thalmudistes au Traité Sanhédrin, & le R. Schélomoh, Deuter. XIII, 13. D’autres, en y donnant le même sens, le tirent de בלי, non, & על, sur, au-dessus, comme si l’on avoit voulu dire que c’est un homme qui ne peut souffrir personne au-dessus de lui, ni maître, ni supérieur, &c. Ceux qui croient que c’est un nom du diable, le dérivent de la même négation בלי, sans : & de עליון, qui signifie le Très-Haut, pour dire, celui qui est séparé du Très-Haut. Arias Montanus le compose de בלי, non, & עלה, monter, de sorte que Bélial, selon lui, est la même chose que celui qui ne monte point, qui n’avance, qui ne profite point, absque profectu, homo frugi, profectus & emendationis expers. Il a pris cette interpretation de R. D. Kimhhi, qui explique ce mot בלי יעלה וילעליה, qui ne monte & ne prospere pas. D’autres après les Rabbins le dérivent de בלי, & de יעל, profuit, & le prennent pour inutile, qui n’est bon à rien, un vaurien, méchant, mauvais. Grégorius Grégori, dans son Lexicum Sanctum, cap. 618, croit qu’on peut encore le tirer de la négation בלי, & de עלל, faire, & l’expliquer, un paresseux, un fainéant.

BELIC, ou BELIF. Terme de Blason, dont on se sert quelquefois pour signifier gueules, ou couleur rouge. Coccineus.

☞ BELICASTRO. Voyez Belcastro.

☞ BELICHE. Nom que les peuples de Madagascar donnent au Diable, auquel ils jettent le premier morceau de la victime pour le rendre favorable, ou pour appaiser sa colere. Flacourt cité par Mor.

BÉLIDE. s. m. & f. Nom patronymique, qui signifie, qui est de la race de Belus. Ainsi Virgile, Enéid. Liv. II, v. 81, appelle Palamede, Bélides, & les Danaïdes sont aussi appelées Bélides, parce qu’elles étoient petites-files de Bel, surnommé l’ancien, pere de Danaüs Roi d’Argos, dont elles étoient filles.

BELIER. s. m. C’est le mâle de la brebis. Aries. Le belier colonel de la laineuse troupe. Ronsard. Un divertissement des Rois de Perse est de faire choquer des beliers, pour qui l’on parie de tous côtés, pendant que les maîtres & les intéressés de part & d’autre les animent au combat. Wicqfort. Il ne faut qu’un bon belier pour tout un troupeau de brebis. Quand les Romains déclaroient la guerre à quelqu’un de leurs voisins, le Héraut appelé Fecialis prenoit un belier, le conduisoit sur les terres de l’ennemi, & l’y abandonnoit, pour marquer que ces terres seroient bientôt des pâturages du peuple Romain.

☞ Cet animal dans les premiers temps de sa vie s’appelle agneau, & prend celui de mouton quand il a été coupé. On ne garde de beliers dans un troupeau qu’autant qu’il en faut pour féconder les fémelles.

Ménage dérive ce mot de vellarius, qui a été fait de vellus, toison. D’autres de balarius, ou de balare, Borel de belin, vieux mot françois, qui signifioit sot & mouton ; le Pere Thomassin de l’hébreu Bahal, dominus, maître, parce que le belier est le maître du troupeau, il y domine ; mais cette étymologie est tirée de bien loin ; Guichard de יובל, Jobel, mot hébreu, qui se donne au même animal.

Belier en parlant des guerres anciennes, est une grosse poutre de bois ferrée par le bout, & qui a quelquefois des pointes en forme de cornes de belier. Aries, arietaria machina. Les Anciens s’en servoient avant l’invention du canon pour battre les murailles d’une ville. Il y a plusieurs sortes de beliers décrits dans Juste Lipse, Végéce, & autres. M. Félibien dit qu’il y avoit trois sortes de beliers ; les uns qu’on suspendoit à des cordes ; kes autres qui couloient sur des rouleaux ; & les autres que soutenoient sur leurs bras ceux qui les faisoient agir contre la muraille qu’on vouloit battre. Vitruve assure que ce furent les Carthaginois qui inventèrent le belier pendant qu’ils assiégeoient Cadis. Ils se servirent d’abord d’une grosse pièce de bois que plusieurs hommes tenoient entre leurs bras, & dont ils donnoient de grands coups contre la muraille. Péphasmenos Tyrien, trouva le moyen de suspendre cette grosse pièce de bois à une autre. D’autres partagent entre Geras & Péphasmènos la gloire d’avoir trouvé le moyen de suspendre le belier. La machine qu’on opposoit au belier pour en arrêter la force, s’appelle Loup. Joséphe, de la guerre des Juifs, Liv. III, ch. 15, remarque que ce qui fit donner à cette machine le nom de belier, c’est qu’elle étoit armée au bout d’un gros fer qui avoit la forme de tête de belier, & apparemment on lui donna ce nom & cette forme, parce qu’elle doguoit les murailles à peu près comme les beliers doguent les uns contre les autres, c’est-à-dire, parce qu’elle frappoit les murailles à peu près de même qu’un belier heurte son adversaire. Enfin, Polydus Thessalien perfectionna cette machine, pendant le siége que Philippe, Roi de Macédoine, & fils d’Amintas, mit devant Byzance, aujourd’hui Constantinople. Il y a pour tant quelques Critiques qui prétendent que les Grecs menèrent Epeus au siége de Troye, & que ce fut lui qui inventa le belier pour abattre les murs de cette ville. Felib. Les François se servoient comme les Romains de tortues, ou de galeries couvertes, pour faire jouer contre les murailles cette longue & grosse poutre ferrée par le bout, à qui on avoit donné le nom de belier, & qui par le moyen des cables où elle étoit suspendue, étoit poussée contre la muraille, pour la rompre & l’abattre. P. Dan.

Belier. Aries. Terme d’Astronomie. Le premier des douze signes du Zodiaque où le soleil entre au mois de Mars : c’est le point d’où on commence à compter les degrés du Zodiaque suivant l’ordre & la succession des signes. Cette constellation est composée de treize étoiles, selon Ptolomée : c’est le domicile de Marsn & l’exaltation du soleil, & elle fait avec le lion & le sagittaire le trigone de feu. Les Poëtes ont feint que c’est le belier qui portoit la toison d’or, & sur lequel Phryxus se sauva avec sa sœur Hellé, en fuyant la persécution d’Ino, femme d’Athamas Roi de Thèbes. En traversant