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BOU

à qui on vide de l’eau à-peu-près comme l’eau de rivière, qui ne laisse point ou que peu de sédiment après l’évaporation, meurent pour l’ordinaire, car leur ventre s’enfle en peu de temps, & la bouffissure extérieure augmente & durcit. Id. p. 178.

☞ On dit figurément bouffissure du style, défaut d’un style empoulé. Voyez ce mot.

BOUFFOIR. s. m. Prononcez BOUFFOI. Ce terme de Rôtisseur, qui veut dire un petit instrument de cuivre, qui est grand & gros comme une lardoire, qui est percé par les deux bouts, dont on met l’un dans la partie de l’agneau qu’on veut bouffer, & dont on tient l’autre dans la bouche, afin de pouvoir faire passer son vent jusqu’à l’agneau qu’on bouffe.

☞ BOUFFON. s. m. Plaisant de Comédie, qui divertit, qui fait rire les gens par ses plaisanteries, par ses quolibets. Mimus, scurra, sannio, sannius. Les meilleurs bouffons se trouvent à la Comédie italienne.

Bouffon, se dit aussi de celui qui fait profession de dire ou faire des choses plaisantes pour faire rire les autres. Scurrans, scurra. C’est un bon, un excellent, un froid, un plat bouffon. C’est un ennuyeux personnage qu’un mauvais plaisant, & un bouffon insipide. C’est une qualité qui tient lieu de mérite à bien des gens.

En vain par sa grimace un bouffon odieux.
A table nous fait rire, & divertit nos yeux. Boil.

☞ On dit d’un homme qui aime à faire rire la compagnie, qu’il se plaît à faire le bouffon.

On dit aussi d’une femme qui est de même humeur, qu’elle fait la bouffonne ; & on dit par caresse à une petite fille gaie & enjouée, que c’est une petite bouffonne.

Servir de bouffon, c’est être un sujet de moquerie, de risée. Dans ce sens, un homme qui voit qu’on se moque de lui, dit je vois bien que je sers ici de bouffon. Je ne prétends pas vous servir de bouffon.

Bouffon, se prend quelquefois adjectivement, tant au masculin qu’au féminin. Scurrilis, mimicus. Il a fait un discours, un conte bouffon. C’est une humeur boufonne. C’est un bouffon personnage. Il a la mine bouffonne.

Aux accès insolens d’une bouffonne joie.
La sagesse, l’esprit, l’honneur furent en proie. Boil.

Qu’est devenu cet air, ce langage bouffon,
Dont tu charmais nos yeux & nos oreilles ?
Auroit-on volé tes bouteilles,
Ou jetté tes muids sur le fond.

Quelques-uns dérivent ce mot d’une fête qui fut instituée au pays d’Attique par le Roi Erecthée, à l’occasion d’un Sacrificateur nommé Buphon, lequel après avoir immolé le premier bœuf sur l’autel de Jupiter Polien, ou Gardien de la ville, s’enfuit sans sujet, si soudainement, qu’on ne le put arrêter, ni le trouver, laissant la hache & les autres ustensiles du sacrifice par terre. On les mit entre les mains des Juges pour leur faire leur procès, qui jugèrent la hache criminelle, & le reste innocent. Toutes les autres années suivantes on fit le sacrifice de la même sorte. Le Sacrificateur s’enfuyoit comme le premier, & la hache étoit condamnée par des Juges. Comme cette cérémonie & ce jugement étoient tour-à-fait burlesques, on a appelé depuis bouffons & bouffonneries, toutes les autres momeries & farces qu’on a trouvées ridicules. Cet histoire est rapportée dans Cœlius Rhodiginus, Liv. 7 j chap. 6.

Ménage, après Saumaise, dérive ce mot de buffo. On nommoit ainsi en latin ceux qui paroissoient sur le théâtre avec des joues enflées pour recevoir des soufflets, afin que le coup faisant plus de bruit, fit rire davantage les spectateurs. Vossius est de même avis, & dit que bouffer signifioit autrefois enfler & souffler ; d’où vient qu’on dit bouffi d’orgueil, que les habits bouffent, & une bouffée de vent. Il tire de la même origine le mot soufflet, qu’on appelle aussi un buffe.

BOUFFONNER. v. n. Plaisanter, faire des actions bouffonnes, soit sur le théâtre pour divertir le peuple, soit dans les compagnies par enjouement, & pour exciter à rire. Scurrari, scurriliter ludere. Il se prend toujours en mauvaise part, à moins qu’on n’y ajoute quelque adoucissement : comme c’est un homme gai, enjoué, qui boufonne agréablement.

BOUFFONNERIE. s. f. Action ou parole pour faire rire ; chose bouffonne, plaisanterie. Mimicus jocus, scenica dicacitas. Une méchante bouffonnerie. Une agréable bouffonnerie.

BOUFFONESQUE. adj. m. & f. Lepidus, jocularis, ridiculus. Naudé s’est servi de ce mot dans son Mascurat, pour dire, plaisant, agréable, burlesque. Après avoir donné carrière à son humeur plaisante & bouffonesque, il se mit tout-à-fait dans la sérieuse. Naudé n’est pas un Auteur à suivre.

BOUFFRON. s. f. Sepia. Poisson de mer. Voy. Sèche, c’est la même chose.

BOUGE. s. m. Petite chambre ou cabinet qui accompagne une plus grande. Cellula. Les chambres des maisons garnies sont accompagnées d’un bouge pour coucher un valet. Il signifie aussi une chambre, une maison extrêmement mal-propre. Avez-vous vu l’endroit où il loge ? C’est un vrai bouge.

Et le clerc qu’on députe aux Ducs, aux robes rouges
N’a jamais inventé ni boutiques, ni bouges.
L’Abbé de Villers.

Du Cange dérive ce mot de bugia qu’on a dit dans la basse latinité : pour dire, une maison fort petite.

Bouge, en termes de Charpenterie, signifie une pièce de bois qui a du bombement, & qui courbe en quelque endroit. Arcuatio.

Bouge. Terme de Potier d’étain. C’est le demi-cercle qui est autour du fond de l’assiète.

Bouge. Terme de Tonnelier. Le milieu de la futaille, & la partie la plus élevée. Umbo.

Bouge, terme d’ Orfèvre en grosserie, est un petit ciselet ainsi nommé, parce qu’on s’en sert pour travailler sur les petites patries d’un morceau où le marteau à bouge ne peut entrer. Encyc.

Bouge, se dit aussi de la partie du chandelier qui commence à la poignée, & qui descend sur le pied en s’évasant.

Villon s’est servi du mot de bouges, pour signifier l’habillement que nous nommons haut-de-chausses & culotte.

Je donne l’envers de mes bouges
Pour tous les matins les torcher.

Bouge, s. f. signifie aussi la même chose que bougette, & en ce sens Pasquier, Rech. Liv. VIII, ch. 2, le dérive de Bulga. Nous disons encore qu’un homme qui s’est fait riche, a bien mis dedans ses bouges ; pour dire, dedans sa bourse. Pasq. Ce mot n’est plus en usage.

On nomme encore de la sorte sur les côtes de Guinée & dans quelques lieux de l’Afrique avancés dans les terres, cette espèce de coquillage blanc qui vient des îles Maldives, qu’on nomme aux Indes Orientales des coris, ou cauris, & qui servent de menue monnoie.

Bouge, s. f. Sorte de mauvaise poire qui se mange au mois d’Octobre. Elle se nomme autrement ben, ou la poire de Légat. La Quint.

Bouge, s. f. Terme de commerce. Espèce d’étamine fine, blanche & claire, dont on fait les chemises de la plupart des Religieux qui n’usent point de chemises de toile.

BOUGEOIR. s. m. Petit chandelier sans pied qui a un manche, une queue, ou un anneau, pour le porter à la main, & où l’on met une bougie. Cerarium. C’est le plus ancien des Aumôniers d’un Prélat qui porte le bougeoir quand il officie. Bougeoir est aussi une sorte d’étui, où il serre la bougie. Tach.