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« Entrez, fit Arabelle.

— Hum ! une jolie voix toujours ; mais cela n’est rien. »

En disant ceci, il ouvrit la porte et entra dans la chambre. Arabelle, qui était en train de travailler, se leva en voyant un étranger, un peu confuse, mais d’une confusion pleine de grâce.

« Ne vous dérangez pas, madame, je vous prie, dit l’inconnu en fermant la porte derrière lui. Mme Winkle, je présume ? »

Arabelle inclina la tête.

« Mme Nathaniel Winkle, qui a épousé le fils du vieux marchand de Birmingham ? » poursuivit l’étranger en examinant Arabelle avec une curiosité visible.

Arabelle inclina encore la tête et regarda autour d’elle avec une sorte d’inquiétude, comme si elle avait songé à appeler quelqu’un.

« Ma visite vous surprend, à ce que je vois, madame ? dit le vieux gentleman.

— Un peu, je le confesse, répondit Arabelle en s’étonnant de plus en plus.

— Je prendrai une chaise, si vous me le permettez, madame, dit l’étranger en s’asseyant et en tirant tranquillement de sa poche une paire de lunettes qu’il ajusta sur son nez. Vous ne me connaissez pas, madame ? dit-il en regardant Arabelle si attentivement qu’elle commença à s’alarmer.

— Non, monsieur, répliqua-t-elle timidement.

— Non, répéta l’étranger en balançant sa jambe droite ; je ne vois pas comment vous me connaîtriez. Vous savez mon nom cependant, madame.

— Vous croyez ? dit Arabelle toute tremblante, sans trop savoir pourquoi. Puis-je vous prier de me le rappeler ?

— Tout à l’heure, madame, tout à l’heure, répondit l’inconnu qui n’avait pas encore détourné les yeux de son visage. Vous êtes mariée depuis peu, madame ?

— Oui, monsieur, répliqua Arabelle d’une voix à peine perceptible et en mettant de côté son ouvrage ; car une pensée, qui l’avait déjà frappée auparavant, l’agitait de plus en plus.

— Sans avoir représenté à votre mari la convenance de consulter d’abord son père, dont il dépend entièrement, à ce que je crois ? »

Arabelle mit son mouchoir sur ses yeux.

« Sans même vous efforcer d’apprendre par quelque moyen