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— Afin de féliciter monsieur Weller sur sa nouvelle propriété, continua l’habile homme d’affaires. Eh ! ha ! hi ! hi ! hi !

— J’y suis tout à fait consentant, gentlemen, répondit M. Weller. Sammy, tirez la sonnette. »

Sam obéit, et le porter, le bœuf froid et les huîtres ayant été promptement apportés, furent aussi promptement dépêchés. Dans une opération où chacun prit une part si active, il serait peut-être inconvenant de signaler quelque distinction ; pourtant, si un individu montra plus de capacités qu’un autre, ce fut le cocher à la voix enrouée, car il prit une pinte de vinaigre avec ses huîtres sans trahir la moindre émotion.

Lorsque les coquilles d’huîtres eurent été emportées, un verre d’eau et d’eau-de-vie fut placé devant chacun des gentlemen.

« Monsieur Pell, dit M. Weller en remuant son grog, c’était mon intention de proposer un toast en l’honneur des fontes dans cette occasion ; mais Samivel m’a soufflé tout bas (ici M. Samuel Weller qui, jusqu’alors avait mangé ses huîtres avec de tranquilles sourires, cria tout à coup d’une voix sonore : Écoutez !) m’a soufflé tout bas qu’il vaudrait mieux dévouer la liqueur à vous souhaiter toutes sortes de succès et de prospérité, et à vous remercier de la manière dont vous avez conduit mon affaire. À vot’santé, mossieu.

— Arrêtez un instant, s’écria le gentleman au teint marbré avec une énergie soudaine ; regardez-moi, gentlemen ! »

En parlant ainsi, le gentleman au teint marbré se leva, et ses compagnons en firent autant. Il promena ses regards sur toute la compagnie, puis il leva lentement sa main, et en même temps chaque gentleman présent prit une longue haleine et porta son verre à sa bouche. Au bout d’un instant, le coryphée abaissa la main, et chaque verre fut déposé sur la table complétement vide. Il est impossible de décrire l’effet électrique de cette imposante cérémonie. À la fois simple, frappante et pleine de dignité, elle combinait tous les éléments de grandeur.

« Eh bien ! gentlemen, fit alors M. Pell, tout ce que je puis dire, c’est que de telles marques de confiance sont bien honorables pour un homme d’affaires. Je ne voudrais point avoir l’air d’un égoïste, gentlemen ; mais je suis charmé, dans votre propre intérêt, que vous vous soyez adressés à moi : voilà tout. Si vous étiez tombés entre les griffes de quelques membres infimes de la profession, vous vous seriez trouvés depuis long-