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rés, et qui maintenant formait un séduisant composé de confusion, de dentelles, de rougeur, et de soie lilas.

« Miss Arabelle Allen ! s’écria M. Pickwick en se levant de sa chaise.

— Non, mon cher ami, madame Winkle, répondit le jeune homme, en tombant sur ses genoux. Pardonnez-nous, mon respectable ami, pardonnez-nous. »

M. Pickwick pouvait à peine en croire l’évidence de ses sens, et peut-être ne s’en serait-il pas contenté, si leur témoignage n’avait pas été corroboré par la physionomie souriante de M. Perker et par la présence corporelle de Sam et de la jolie femme de chambre qui, dans le fond du tableau, paraissaient contempler avec la plus vive satisfaction la scène du premier plan.

« Ô monsieur Pickwick, dit Arabelle d’une voix tremblante, et comme alarmée de son silence. Pouvez-vous me pardonner mon imprudence ? »

M. Pickwick ne fit pas de réponse verbale à cette demande, mais il ôta précipitamment ses lunettes, et saisissant les deux mains de la jeune lady dans les siennes, il l’embrassa un grand nombre de fois (un plus grand nombre de fois peut-être qu’il n’était absolument nécessaire) ; ensuite, retenant toujours ses deux mains, il dit à M. Winkle qu’il était un coquin bien audacieux, et lui ordonna de se lever. M. Winkle, qui depuis quelques minutes grattait son nez avec le bord de son chapeau, d’une manière très-repentante, se remit alors sur les pieds ; et M. Pickwick, après lui avoir tapé plusieurs fois sur le dos, donna une poignée de main pleine de chaleur au petit avoué. De son côté, pour ne pas rester en arrière dans les compliments qu’exigeait la circonstance, le petit homme embrassa de fort bon cœur la mariée et la jolie femme de chambre, puis après avoir secoué cordialement la main de M. Winkle, compléta sa démonstration de joie en prenant une quantité de tabac suffisante pour faire éternuer, durant le reste de leur vie, une demi-douzaine de nez ordinaires.

« Eh bien, ma chère enfant, dit M. Pickwick, comment tout cela s’est-il passé ? Allons, asseyez-vous et racontez-moi votre histoire. Comme elle est jolie, Perker ! continua l’excellent homme, en examinant le visage d’Arabelle, avec autant de plaisir et d’orgueil que si elle avait été sa propre fille.

— Délicieuse, mon cher monsieur ! Si je n’étais pas marié moi-même, je vous porterais envie, heureux coquin, dit Perker