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appris une partie de ce que j’ai à vous communiquer, je désirerais qu’il fût présent. »

Le magistrat regarda M. Jinks. M. Jinks regarda le magistrat, et les officiers se regardèrent l’un l’autre avec étonnement. Tout à coup M. Nupkins devint pâle. Peut-être ce Weller, dans un moment de remords, avait-il confessé quelque complot formé pour assassiner le magistrat. C’était une horrible pensée ! En effet, M. Nupkins était un homme politique ; et il devint encore plus pâle en songeant à Jules César et à M. Perceval.

Il regarda de nouveau M. Pickwick et fit un signe à M. Jinks.

« Que pensez-vous de cette demande, monsieur Jinks, » murmura-t-il à son oreille.

M. Jinks, qui ne savait pas exactement qu’en penser, et qui avait peur d’offenser son patron, sourit faiblement, d’une manière douteuse ; puis, serrant les coins de sa bouche, secoua lentement sa tête.

« Monsieur Jinks, dit le magistrat gravement, vous êtes un âne, monsieur. »

En entendant cette petite expression familière, M. Jinks sourit encore, peut-être plus faiblement que la première fois, et se retira par degrés dans son coin.

Pendant quelques secondes M. Nupkins débattit la question en lui-même. Ensuite, se levant d’un air résolu, il invita M. Pickwick et Sam à le suivre, et les conduisit dans une petite chambre qui s’ouvrait sur la salle de justice. Là, il leur fit signe d’aller jusqu’au fond, et lui-même resta à l’entrée, tenant sa main sur la porte à demi fermée, afin de pouvoir facilement battre en retraite s’il découvrait chez ses justiciables la plus légère manifestation d’intentions hostiles. Enfin il déclara qu’il était prêt à entendre leurs communications, quelles qu’elles pussent être.

« Monsieur, dit M. Pickwick, j’arriverai au fait tout d’un coup, car il s’agit d’une chose qui affecte notablement votre personne et votre honneur. J’ai tout lieu de croire, monsieur, que vous recevez dans votre maison un vil imposteur.

— Deux ! interrompit Sam ; le valet en livrée violette enfonce tout le monde, en fait de larmes et de la scélératesse !

— Sam, dit M. Pickwick, je vous prie de vous modérer, afin que je puisse me rendre intelligible à ce gentleman.

— Très-fâché, monsieur, répliqua Sam ; mais quand je