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des places sur l’impériale de la voiture de Londres, ils y arrivèrent, sains et saufs, dans la soirée.

Trois ou quatre jours subséquents furent remplis par les préparatifs nécessaires pour leur voyage au bourg d’Eatanswill ; mais comme cette importante entreprise exige un chapitre séparé, nous emploierons le petit nombre de lignes qui nous restent à raconter, avec une grande brièveté, l’histoire de l’antiquité rapportée par M. Pickwick.

Il résulte des mémoires du club, que M. Pickwick parla sur sa découverte, dans une réunion générale qui eut lieu le lendemain de son arrivée, et promena l’esprit charmé de ses auditeurs sur une multitude de spéculations ingénieuses et érudites, concernant le sens de l’inscription. Il paraît aussi qu’un artiste habile en exécuta le dessin, qui fut gravé sur pierre et présenté à la Société royale des antiquaires de Londres et aux autres sociétés savantes ; que des jalousies et des rivalités sans nombre naquirent des opinions émises à ce sujet ; que M. Pickwick lui-même écrivit un pamphlet de quatre-vingt-seize pages, en très-petits caractères, où l’on trouvait vingt-sept versions différentes de l’inscription ; que trois vieux gentlemen, dont les fils aînés avaient osé mettre en doute son antiquité, les privèrent de leur succession, et qu’un individu enthousiaste fit ouvrir prématurément la sienne, par désespoir de n’en avoir pu sonder la profondeur ; que M. Pickwick fut élu membre de dix-sept sociétés savantes, tant nationales qu’étrangères, pour avoir fait cette découverte ; qu’aucune des dix-sept sociétés savantes ne put en tirer la moindre chose, mais que toutes les dix-sept s’accordèrent pour reconnaître que rien n’était plus curieux.

Il est vrai que M. Blotton, et son nom sera dévoué au mépris éternel de tous ceux qui cultivent le mystérieux et le sublime ; M. Blotton, disons-nous, vétilleux et méfiant, comme le sont les esprits vulgaires, se permit de considérer la chose sous un point de vue aussi dégradant que ridicule. M. Blotton, dans le vil dessein de ternir le nom éclatant de Pickwick, entreprit en personne le voyage de Cobham. À son retour, il déclara ironiquement au club, qu’il avait vu l’homme dont la pierre avait été achetée ; que cet individu la croyait ancienne, mais qu’il niait solennellement l’ancienneté de l’inscription, et assurait avoir gravé lui-même, dans un instant de désœuvrement, ces lettres grossières, qui signifiaient tout bonnement : Bill Stumps, sa marque. M. Blotton ajoutait que M. Stumps ayant