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LE CRICRI DU FOYER.

dure, mais elle était libre encore et courait plus rapidement, ce qui était l’essentiel ; le canal restait lent et frappé de torpeur, il faut en convenir ; mais qu’importe ? il serait plus tôt pris lorsque la gelée viendrait tout de bon, et alors quelle belle carrière ouverte aux patineurs ! Déjà les grosses barques avaient prudemment cherché un abri près du quai où elles allaient faire fumer tout le jour leurs longs tuyaux rouillés, et attendre oisivement la liberté des eaux.

Un énorme tas de ronces ou de chaume brûlait dans un champ ; autre spectacle que cette flamme si blanche, en plein jour, au milieu du brouillard, et jetant par moment quelques éclairs plus rouges, jusqu’à ce que Miss Slowboy se plaignît que la fumée lui pinçait le nez et l’étouffait ; — sur quoi, comme c’était son usage à la moindre provocation, elle réveilla le poupon qui ne voulut plus se rendormir. Mais Boxer, qui était en avant d’un quart de mille, à peu près, avait déjà franchi les limites de la ville, et atteint le coin de la rue où vivaient Caleb et la jeune aveugle. Longtemps avant que Peerybingle et sa femme fussent arrivés, le père et la fille étaient sur leur porte pour les recevoir.

Boxer, vous dirai-je en passant, lorsqu’il communiquait avec Berthe, faisait à sa manière certaines distinctions délicates qui me persuadent qu’il savait qu’elle était aveugle. Il ne cherchait jamais à attirer son attention en la regardant, comme il faisait mainte fois en s’a-