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LE CRICRI DU FOYER.

C’était encore là une des illusions innocentes du brave John, sa phrase habituelle à l’heure des repas, qu’il répétait sans s’apercevoir de l’opiniâtreté de son appétit à le contredire ; mais cette fois cette réflexion même ne fit naître aucun sourire sur le visage de la petite femme qui restait là, distraite, parmi les paquets, repoussant lentement du pied la boîte du gâteau de mariage, sans regarder, sans même voir ce joli soulier mignon sur lequel ses yeux semblaient se fixer et dont elle était peut-être habituellement assez coquette. Tout entière à sa rêverie, elle ne faisait attention ni au thé ni à John, qui l’appelait en vain et frappait la table avec le manche de son couteau pour la réveiller. Il se leva enfin et lui toucha le bras ; ce ne fut qu’alors qu’elle le regarda et alla vivement s’asseoir à sa place, derrière le plateau du thé, riant de sa négligence ; — mais tout était changé, l’air et la musique.

Le Cricri, lui aussi, s’était tu. Il n’y avait plus dans la chambre cette gaîté qui y régnait tout-à-l’heure… non, elle avait disparu.

« Ce sont donc là tous les paquets, John ? dit Mrs Peerybingle après un long silence, pendant lequel l’honnête voiturier avait mis en pratique une partie de sa phrase favorite, prouvant qu’en effet il mangeait avec plaisir, s’il lui était plus difficile de prouver qu’il mangeait peu.

— Ce sont donc là tous les paquets, John ?

— Tous, répondit John ; mais non… Ah ! je… » Il laissa