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LES CARILLONS.

Si Tugby avait été un peu animé dans le petit salon, il balança grandement son compte en se montrant l’oreille basse dans la boutique, où il resta les yeux fixés sur sa femme sans même essayer de lui répondre, transférant, toutefois, soit par distraction, soit par précaution, tout l’argent du comptoir dans ses poches. Le monsieur en noir, qui semblait être quelque membre inférieur de la faculté chargé spécialement de visiter les pauvres, était évidemment trop accoutumé à être témoin de petits différends entre mari et femme pour songer à intervenir par quelque observation en cette circonstance. Il resta assis sur le baril à bière, sifflotant un air et égouttant par terre la canelle, jusqu’à ce que le calme fût rétabli : alors il releva la tête et dit à Mrs. Tugby, ci-devant Mrs. Chickenstalker :

« La femme me semble intéressante ? comment l’a-t-elle épousé ?

— Oh ! cela, monsieur, répondit Mrs. Tugby prenant un siège près de son interlocuteur, oh ! cela n’est pas le moins cruel chapitre de son histoire. Ils s’étaient fréquentés, voyez-vous, plusieurs années auparavant. Richard et elle. Lorsqu’ils faisaient tous les deux un couple jeune et beau, tout avait été conclu et ils devaient se marier le premier jour de l’an. Mais je ne sais trop comment, Richard se mit dans la tête, d’après ce que certains messieurs lui dirent, qu’il ferait mieux de ne pas se marier et qu’elle n’était pas assez riche pour lui.