Page:Dickens - Bleak-House, tome premier.pdf/193

Cette page a été validée par deux contributeurs.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

— Oui, sans doute si j’étais sûr d’être bien montré, répliqua M. Krook, dont le regard soupçonneux étincela. J’ai beaucoup perdu à ne pas avoir su lire, mais je ne voudrais pas qu’on me fît perdre encore plus en me l’apprenant de travers.

— Et qui donc vous montrerait à lire de travers ? demanda mon tuteur en souriant.

— Je ne sais pas, monsieur Jarndyce, répliqua le vieillard en relevant ses lunettes et en se frottant les mains. Je ne suppose pas que personne voudrait… mais il vaut toujours mieux s’en rapporter à soi que de compter sur les autres. »

Tout cela était assez bizarre pour qu’en revenant avec M. Woodcourt, mon tuteur demandât à ce dernier si M. Krook n’était pas un peu comme le disait sa locataire. Le jeune médecin répondit qu’il n’avait aucun motif de le croire ; que M. Krook était d’une défiance excessive, comme tous les gens ignorants ; et, d’ailleurs, presque toujours sous l’influence du gin, dont il faisait une énorme consommation, ainsi que nous avions pu le remarquer à l’odeur qu’exhalait sa boutique et surtout sa personne ; mais il ne voyait rien chez lui, jusqu’à présent, qui dénotât de la folie.

Chemin faisant, je me conciliai tellement l’affection de Pepy, en lui achetant un petit moulin à vent avec deux sacs de farine, qu’à table il fallut absolument le placer à côté de moi. Sa sœur se mit auprès d’Éva. La pauvre Caroline était rayonnante ; sa joie nous rendait heureuses, et mon tuteur n’était pas moins gai que nous. Le soir, Caroline retourna chez elle en fiacre avec Pepy, qu’on avait porté dans la voiture, profondément endormi, mais tenant toujours son petit moulin à vent.

J’oubliais de dire, ou, si je ne l’ai pas oublié, je suis toujours bien sûre de ne pas l’avoir dit, que M. Woodcourt, le médecin de miss Flite, était ce jeune homme brun que nous avions rencontré chez le docteur Bayham Badger ; et puis encore que M. Jarndyce l’invita à dîner avec nous ; et puis aussi qu’il accepta, et qu’après son départ, ayant dit à Éva : « Mignonne aimée, si nous parlions de Richard ? » elle se mit à rire et me dit… Mais à quoi bon répéter ce que me dit mignonne aimée ? »

Cette chère Éva ! elle aimait tant à rire !