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soin de sommeil ; il copiera tout ce que vous lui donnerez et aussi longtemps que vous voudrez sans penser à dormir.

Il fait nuit ; le gaz brille de tout son éclat, et se heurtant contre les clercs qui vont jeter à la poste les lettres du jour ; contre les avocats et les avoués qui vont dîner chez eux ; contre les demandeurs, les défendeurs, les plaideurs de toute espèce, contre la foule en général dont la sagesse des lois entrave les affaires ; et se plongeant au centre de la procédure et dans la boue, composé mystérieux de la même famille, dont on ignore les éléments et qui s’attache à nous sans qu’on puisse savoir ni pourquoi ni comment, dont on ne sait rien au monde, si ce n’est que quand il y en a trop, nous jugeons nécessaire de la balayer au loin, M. Tulkinghorn et le papetier arrivent au magasin du vieux Krook.

« C’est ici qu’il demeure, monsieur, dit le papetier.

— Ici ? répond l’avoué avec indifférence.

— Y entrez-vous, monsieur ?

— Non ; je retourne chez moi ; bonsoir ; je vous remercie. »

M. Snagsby salue profondément, et va retrouver sa petite femme et son thé. M. Tulkinghorn se retourne après avoir fait quelques pas, et entre dans la boutique de M. Krook. Une chandelle fumeuse forme tout l’éclairage de la devanture ; un vieillard et un chat sont assis au coin du feu dans le fond du magasin ; le vieillard se lève et se dirige vers l’étranger en tenant à la main une chandelle coulante et noircie, dont la mèche a besoin d’être mouchée.

— Votre locataire y est-il ? demande le procureur.

— L’homme ou la femme ? dit M. Krook.

— L’expéditionnaire, » répond M. Tulkinghorn.

Le vieillard jette sur l’avoué un regard observateur ; il le connaît de vue ; il a même une idée vague de sa réputation aristocratique.

« Voudriez-vous le voir, monsieur ?

— Oui, répond l’avoué.

— C’est un plaisir que je n’ai pas souvent moi-même, dit M. Krook en faisant une grimace ; faut-il lui dire de descendre ? Il est probable qu’il ne viendra pas, je vous en préviens.

— Dans ce cas-là je vais monter, dit M. Tulkinghorn.

— Au second étage, monsieur ; prenez la chandelle et passez par ici. »

M. Krook, son chat sur ses talons, reste au bas de l’escalier, d’où il suit des yeux M. Tulkinghorn.

« Hi ! hi ! hi ! » fait-il en ricanant dès que l’avoué a franchi le