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— Depuis quand est-il ici ? demandai-je à la femme du briquetier.

— Depuis ce matin, répondit-elle ; je l’ai trouvé au coin de la ville. Nous nous étions connus à Londres ; n’est-ce pas, Jo

— Tom-all-Alone’s, balbutia-t-il ; et laissant retomber sa tête sur sa poitrine, il murmura des mots sans suite, comme en rêve.

« Quand est-il arrivé ? demandai-je encore à Jenny.

— J’ai parti de Londres hier, répondit Jo lui-même ; faut que j’aille en queuqu’endroit.

— Où cela, mon pauvre Jo ?

— Queuque part, reprit-il d’une voix plus forte. J’ai été dit d’circuler, encore pus qu’auparavant, d’pis qu’ l’autre m’a donné un souverain. Mistress Sangsby, alle est toujours à me guetter, à me tourmenter à c’te fin que j’m’en aille. Qué qu’j’y ai fait à elle ? et y sont tous après moi, à m’tourmenter pour m’faire en sauver ; tretous enfin, depis que j’me lève jusqu’au soir ; eh ben ! j’m’en vas queuqu’part. C’est là que j’vas. Alle m’a dit l’aut’fois dans Tom-all-Alone’s qu’alle était de Stolbuns, et j’ai pris la route de Stolbuns ; autant c’telle-là qu’une autre. »

Il finissait toujours par s’adresser à Charley.

«  Que faire de lui ? demandai-je à la femme en la prenant à part. Il ne peut pas voyager dans l’état où il est, alors même qu’il saurait où aller.

— J’n’en sais pas pus que les morts, répondit-elle en jetant sur Jo un regard de compassion. Et s’ils pouvaient nous le dire, pe’t-être ben qu’les morts en sauraient plus long qu’moi. J’l’ai gardé ici par pitié ; j’y ai donné un peu de bouillon et de la médecine que j’ai pris chez l’docteur ; Lize est allée pour voir si queuqu’un voudrait le prendre (mon p’tit est couché là ;… c’est son petit à elle, mais j’parle toujours comme s’il était à moi), et je peux pas l’garder longtemps ; car si mon homme rentrait et qu’il le trouve à la maison, il serait ben assez dur pour le mettre à la porte et pourrait ben le cogner. Écoutez ! c’est Lize qui revient. »

Lize entra précipitamment et Jo se leva de sa chaise, sentant d’une manière confuse qu’il devait s’en aller. Je ne sais pas à quel instant l’enfant s’était éveillé, ni à quel moment ma petite femme de chambre l’avait pris dans ses bras ; toujours est-il qu’elle le promenait en calmant ses cris d’une façon toute maternelle, comme si elle était encore dans le grenier de mistress Blinder, avec son frère et sa sœur.

Lize avait été chez tous ceux qui sont chargés du service de