Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/130

Cette page a été validée par deux contributeurs.

le salon, et se retourne immédiatement vers le parc. Volumnia est enchantée de la venue du procureur ; il fait vraiment ses délices ; tant d’originalité, de discrétion et de mystère ! il doit être franc-maçon, chef de loge avec un tablier et une truelle, et siéger comme une idole entourée de flambeaux sans nombre. Miss Dedlock fait ces remarques piquantes du ton léger qu’elle avait dans sa jeunesse, en travaillant à une bourse au crochet.

« Il n’est pas encore venu depuis que je suis arrivée, poursuit-elle ; j’en étais au désespoir ; l’inconstant ! Je croyais parfois qu’il était mort. »

Est-ce la nuit qui s’avance, ou bien une sombre pensée qui couvre d’un nuage la figure de milady ?

« M. Tulkinghorn, dit sir Leicester, est toujours le bienvenu à Chesney-Wold ; c’est un homme de grande valeur, et qui mérite bien l’estime que chacun lui accorde.

— Il doit être énormément riche, insinue le cousin débilité.

— Je le croirais volontiers, répond sir Leicester ; il est fort bien rémunéré de tout ce qu’il fait, et il fréquente la plus haute société, où il est reçu presque sur un pied d’égalité. »

Chacun tressaille, car un coup de feu vient d’éclater à peu de distance.

« Bonté divine ! Qu’est-ce que cela peut être ? s’écrie Volumnia.

— Un rat qu’on vient de tuer, répond milady au moment où M. Tulkinghorn apparaît suivi de plusieurs domestiques apportant des lampes et des bougies.

— Non, non, dit le baronnet ; à moins cependant, milady, que vous ne redoutiez l’obscurité ? »

Milady, au contraire, veut jouir du crépuscule.

« Et Volumnia ?

— Oh ! rien n’est délicieux comme une causerie dans l’ombre !

— Emportez les lampes, dit le baronnet ; je vous demande pardon, Tulkinghorn, comment vous portez-vous ? »

M. Tulkinghorn traverse le salon avec le calme et l’aisance qui lui sont habituels, s’incline en passant devant milady, reçoit une poignée de main de sir Dedlock, et va s’asseoir dans le fauteuil qui est de l’autre côté de la table où sont les journaux de sir Leicester, et où il s’assied toutes les fois qu’il a quelque chose à communiquer au baronnet. Milady étant souffrante, sir Leicester exprime la crainte qu’elle ne s’enrhume en restant auprès de la fenêtre ; milady lui sait gré de son attention, mais elle a besoin d’air ; sir Dedlock va remonter l’écharpe qui couvre les épaules de milady, et vient se remettre auprès du feu ;