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l’escalier et courut au jardin. Prétiosa flaira le danger, remit le petit bâton dans sa bouche et reprit sa forme de bête. Arrivé en bas, le prince ne trouva plus celle qu’il avait vue de la fenêtre et en fut si affecté qu’il se plongea dans une profonde mélancolie. Au bout de quatre jours, il tomba malade ; il répétait sans cesse : « Mon ourse, mon ourse ! » Quand sa mère l’entendit se plaindre ainsi, elle s’imagina que l’ourse lui avait fait quelque mal et elle donna ordre de la tuer.

L’ourse était si bonne qu’elle se serait fait aimer des pierres du chemin. Charmés de sa douceur, les serviteurs n’eurent pas le courage de l’abattre ; ils la conduisirent au bois et rapportèrent à la reine qu’ils y avaient lâché la pauvre petite bête. La nouvelle en vint aux oreilles du prince et il s’abandonna à des folies incroyables. Quoique malade, il se leva et voulut qu’on mît les serviteurs en hachis. Lorsqu’il apprit d’eux comment la chose s’était passée, il monta presque mourant à cheval, et tant chercha et tant tourna qu’il finit par retrouver l’ourse. Il la ramena à la maison, l’enferma dans une chambre et dit :

— Ô beau morceau de roi qui es caché dans Cette peau, ô chandelle d’amour qui es enclose dans cette lanterne velue ! Pourquoi me tromper ainsi ? Est-ce pour me voir vivre dans l’angoisse et dépérir peu à peu de consomption ? Je meurs