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vinssent concourir pour la beauté, car il voulait épouser la plus belle et lui faire partager son trône.

Quand la chose eut été répandue, il n’y eut pas dans tout l’univers une seule femme qui ne voulût tenter la fortune ; il n’y eut pas de harpie, si ratatinée qu’elle fût, qui ne se mît en douze. C’est qu’aussitôt qu’on touche cette corde, il n’est point de monstre qui s’avoue vaincu, il n’est point d’orque marine qui cède ; chacune se pique d’être la plus belle, et, si le miroir leur dit la vérité, elles accusent le cristal de tromper et le vif-argent d’être posé de travers. Donc, le monde étant plein de belles femmes, le roi ordonna qu’on les mît en rang, et les passa en revue, ainsi que fait le Grand Turc, quand il traverse le sérail[1]. Il allait, il venait d’un bout à l’autre, comme un singe qui ne s’arrête jamais, lorgnant celle-ci, reluquant celle-là.

Il trouvait à l’une le front mal fait, à l’autre le nez long ; celle-ci avait la bouche large, celle-là les lèvres épaisses ; l’une était boulotte, l’autre courte et mal tournée, celle-ci trop rembourrée de graisse, celle-là trop dépouillée de chair.

L’Espagnole ne lui plaisait guère à cause de son teint basané ; la Napolitaine lui déplaisait tout autant pour sa façon de marcher comme avec des

  1. i. Nous supprimons la fin de la phrase qui est trop scabreuse, Nous ne pouvons même pas la donner dans le texte, qui se trouve être ici beaucoup trop transparent.