Page:Deulin - Contes d’un buveur de bière, 1868.djvu/207

Cette page a été validée par deux contributeurs.

201
Le Filleul de la Mort

— Alors…

— D’ailleurs, elle avait le nez trop court. Veux-tu dix princesses plus belles que celle-là ? »

Macaber haussa les épaules. « On voit bien, dit-il, que vous n’avez jamais été amoureux. »

La Mort se serait arraché les cheveux, s’il n’avait eu le crâne chauve & poli comme verre.

De colère, il donna un grand coup de sa faux dans un énorme rocher en murmurant : « Maudite faux ! » Le rocher se fendit du haut en bas, puis tomba en poussière.

Macaber se leva tout à coup. « Je consens à vivre, dit-il, à une condition : vous me confierez l’inſtrument qui m’a ravi mes amours.

— Ma faux ! mais jamais Dieu le Père ne permettra…

— En ce cas, laissez-moi mourir en paix ; » & il se recoucha sans plus vouloir répondre.

« N’eſt-ce pas, Dieu le Père, que cet enfant demande l’impossible ? » s’écria la Mort avec désespoir.

« Accorde-lui sa demande, » répondit Dieu le Père.

Dieu le Père était las d’entendre les hommes récriminer sans cesse contre la Mort. Il voulut condescendre à mettre une fois pour toutes la grande faux à la disposition d’un mortel.

« Eh bien ! prends-la, dit la Mort à Macaber,