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dans les bras l’un de l’autre ; mais non, il ne faut pas ; des étrangers nous voient qui ne connaissent pas notre amitié, notre amour. Défions-nous, c’est la campagne avec son monde, ses commères, ses cancans. Un bon serrement de mains, un regard pénétrant, un soupir à demi-étouffé nous en disent plus qu’une accolade donnée en public. Nous prenons l’étroit sentier qui va de la gare au grand chemin, tout juste l’espace nécessaire pour marcher en nous serrant l’un près de l’autre. Ces sentiers ne sont-ils pas faits pour l’union, pour le bonheur. Qui ne les a recherchés quelquefois dans la vie ? Comme ils laissent de doux souvenirs ! On aimerait souvent y revenir quand les années ont blanchi les cheveux et quand les pas fatigués commencent à se ralentir sur les cailloux de la route.

Notre marche est lente vers la petite maison hospitalière où j’ai goûté depuis les douceurs de l’amitié franche et de l’amour sincère. Le soleil derrière nous se couche dans des nuages de pourpre et d’or ; la campagne est verte ; les moissons non jaunies ne l’ont pas encore dorée ; les maisonnettes, sur le bord du chemin, ouvrent leurs portes et leurs fenêtres pour respirer largement l’air qui se rafraîchit et que parfument les derniers foins coupés ; le grillon pousse de temps à autre son cri aigu ; les moineaux, par centaines, s’assemblent sur les fils suspendus, et nous marchons lentement dans cet air de bonheur et d’amour. Heureux instants ! douce ivresse, première étape de l’amour ! comme tout fut vite passé ! Dans la petite maison de Ste-Martine, je fus reçu avec les marques de la plus profonde sympathie par