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des hommes d’une crédulité à toute épreuve et qui auraient du faire toute autre chose que de la politique ; approuvé que par des intrigants, admiré que par des esprits voués aux plus déplorables illusions, prôné, vanté, présenté comme la réalisation de la vraie liberté politique, que par des traîtres.

Jusqu’à 1847, le Canada, tout mal gouverné qu’il fut, trouvait encore une certaine compensation à ce malheur dans la protection qu’il trouvait sur les marchés Anglais. Jusqu’à 1847 l’Angleterre rendait à ses colons la justice de les traiter mieux que les étrangers, que les nations ses rivales : enfin, elle reconnaissait de fait qu’elle avait certaines obligations à remplir envers eux.

Aujourd’hui, Messieurs, tout est changé ! L’Angleterre a cessé de nous protéger ; elle a mis les étrangers sur le même pied que nous sur ses marchés : elle a détruit, par là, notre commerce ; elle a donc déclaré de fait qu’elle n’avait plus de devoirs à remplir envers le pays. Or l’Angleterre s’affranchissant, guidée par son intérêt, de ses devoirs envers nous, elle nous affranchissait, par là même, de ce qu’elle considérait être nos devoirs envers elle. Par cela même qu’elle sacrifiait nos intérêts aux siens, elle nous signifiait que pour l’avenir nous devenions libres de l’imiter : elle nous signifiait que nous devions, dorénavant, nous protéger nous-mêmes ; que nous pouvions chercher ailleurs les avantages, la protection qu’elle nous retirait !

Si le gouvernement des colonies était autre chose qu’une pure affaire d’égoïsme, d’orgueil, d’intérêt, d’ambition : si, en Angleterre, on se croyait le moins du monde obligé de favoriser leurs intérêts ; si on y attachait la moindre importance à les satisfaire, à les bien gouverner, à promouvoir leur prospérité intérieure, on eût de suite pourvu aux moyens de leur accorder une compensation pour ce qu’on leur ôtait. Mais non, le contentement, la prospérité des colons sont la dernière chose dont les ministres où les Chambres s’occupent. Quand la métropole prospère, quand ses manufactures sont alimentées, quand elles trouvent des débouchés pour leurs produits, qu’est-ce que cela fait qu’une colonie soit ruinée par une mesure dont la métropole tire d’immenses profits ? De quelle importance sont les intérêts de la colonie en comparaison de ceux de la métropole ?