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développé les effets, mais dont il n’a peut-être pas strictement défini l’essence ni indiqué l’origine : la civilisation, cette puissance à part, dans le monde, qui a tiré l’humanité de l’état de barbarie, d’ignorance et de dégradation dans lequel le christianisme lui-même n’avait pas pu l’empêcher de tomber ; la civilisation, qui a été, quoiqu’on en dise, la véritable institutrice des sociétés, a réussi, après un travail de quelques siècles, à donner une nouvelle direction aux idées, à imprimer de nouvelles tendances à l’intelligence humaine, à rectifier les croyances générales, les notions fondamentales du droit naturel et politique ; à organiser, dans le monde social, ces associations d’idées et de principes universellement admis contre lesquels tous les genres de despotisme sont venus ou viendront tour-à-tour se briser ; à faire apprécier exactement à l’homme sa dignité morale, sa pleine indépendance en tant qu’être pensant, et conséquemment à faire surgir chez lui la conscience de sa souveraineté native dans tout ce qui touche à l’organisation du corps social.

C’est la civilisation qui a dit aux peuples : « Vous seuls êtes les vrais souverains ; » et qui a dit aux Rois ; « Vous êtes les serviteurs et rien de plus, de ces agglomérations humaines qui forment les nations de la terre ; et c’était plus qu’une erreur, c’était un crime et une impiété que de vous en croire les maîtres. »

C’est la civilisation qui a dit aux peuples : « Ceux que vous appelez vos gouvernants n’ont reçu qu’une délégation d’autorité, qui se réduit au pouvoir de simple direction que vous, êtres collectifs, ne pouvez pas exercer directement. Or tout pouvoir délégué est essentiellement révocable. Vous avez donc le droit de changer vos institutions quand cela vous plaît : vous avez donc le droit de déplacer, quand vous le jugez utile, les fonctionnaires que vous avez constitués en autorité pour telle ou telle fin définie et limitée. »

C’est la civilisation qui a appris aux peuples que la souveraineté, soit individuelle soit collective, était inaliénable ; que par conséquent, de même qu’un homme ne pouvait être la propriété d’un autre homme, de même un peuple ne pouvait jamais être la propriété politique d’un autre peuple.

Enfin, Messieurs, la civilisation a trouvé dans le monde le principe de l’égalité native des hommes entre eux que le chris-