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j’attends… sans en avoir l’air. Au piano, c’est un bon endroit, propre à faire oublier le départ, et c’est important !

S’il revient affamé, il y a des chances pour que le dîner ait raison de sa mauvaise humeur. Au café, il dirait volontiers : « Étais-je bête, tout à l’heure ! » Mais il résiste à cette impulsion intelligente. Un vrai grognon n’admet jamais qu’il ait eu tort de grogner ! Cela engagerait son avenir, et je suppose que grogner est une volupté qu’il faut éprouver pour la bien comprendre.

La plupart des femmes, tout en trouvant l’homme grognon très désagréable, s’en amusent beaucoup et ne regrettent que de ne pouvoir leur rire franchement au nez. C’est si amusant de les voir, eux, si importants, devenus si déraisonnables, si enfantinement grincheux, si ridicules ! S’ils pouvaient se voir et s’entendre… ils désireraient un grognoir pour s’y cacher !


XXXV

Une halte dans l’église


Dans l’église déserte j’entrai hier vers la fin du jour. J’étais fatiguée, triste, avec un immense désir d’arrêter de vivre, sans mourir, pour me reposer !

Dans une telle disposition, la prière n’est pas longue : elle se borne à déposer son âme accablée devant Celui qui sait.