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lage s’éveille à son tour : les volets s’ouvrent, des cheminées roses s’élancent des panaches légers que la brise fait ondoyer en courant secouer les fins arômes des bois d’alentour, et le soleil monte glorieux dans un ciel sans nuages. La sonnaille au cou, les vaches regagnent paisiblement le pacage, escortées par les gamins qui culbutent dans les fossés en criant de joie. La route blanche se déroule comme un ruban, elle escalade une pente rapide et contourne de gros buissons : je la vois semblable à une collerette de dentelle enveloppant un bouquet de fleurs vertes. Je longe un champ où le bruit d’une faulx siffle dans l’herbe fraîche ; de l’autre côté, comme une mer blonde, les blés ondulent avec une petite musique crépitante. Puis, c’est un bois que le chemin traverse, les rayons et les ombres y dansent et s’y poursuivent pendant que les chansons des oiseaux et des pins remplissent l’air de rumeurs douces.

Je regarde, émerveillée, ce jour nouveau frais comme une fleur, et je pense que cette aube si jeune est cependant l’aube ancienne qui prit, au premier jour, la terre nouvellenée pour l’envelopper de son manteau de lumière et l’envoyer parmi les étoiles dans son long pèlerinage : si ancienne et toujours jeune, chaque matin, elle apparaît dans la rosée perlée, vêtue de lumière fine, fraîche et parfumée !

Le vieux, vieux jour de la terre, après son grand plongeon dans l’abîme de la nuit, sort