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nous tient presque toujours lieu de raisonnement et nous guide avec une sûreté et une rapidité prodigieuses là où toute la réflexion masculine avance à tâtons.

Mais ce serait aller bien loin, et je dois à mes sœurs de reconnaître que l’instinct féminin s’ajoute souvent à la raison et à la réflexion. Cependant les femmes n’aiment pas ce mot… l’instinct… fi donc ! — Vous parlez de notre instinct comme de l’instinct d’un enfant ou d’un chien, me disait une amie, une intellectuelle, qui est un peu humiliée par mes observations, je crois.

Et puis après ? Oui ou non en avons-nous de l’instinct, vous, moi, et toutes les femmes ?

Mais entendons-nous d’abord sur la chose, c’est le mot qui vous choque. Quand j’aurai expliqué ce qu’est notre instinct, toutes les Èves, petites et grandes souriront, ravies, car elles aiment les discours flatteurs, cette faiblesse date du paradis terrestre et du serpent astucieux qui parlait si bien. Je dirai donc que l’intelligence féminine a le flair plus délicat que celle de l’homme ; qu’avec ses yeux, la femme voit en un clin d’œil, sans presque regarder, ce qu’un homme n’a pas remarqué après cinq minutes d’observation. Là où les hommes raisonnent et ergotent, les femmes devinent : elles pressentent et même prophétisent avec une si merveilleuse exactitude, que si les hommes se fiaient davantage à l’instinct des femmes, ils éviteraient bien des erreurs.