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D’année en année, c’est le même charme que l’on retrouve et comme un chapelet qui continue celui de l’année précédente… et le temps s’écoule, amenant si peu de changement que vous vous sentez toujours un esprit et une âme de Mois de Marie quand, après l’Angelus, la cloche carillonne pour l’office du soir.

J’aime à me rendre d’avance sur la petite place de l’église qui domine le fleuve ; dans le crépuscule rose le clocher pointu regarde si les étoiles ne commenceront pas bientôt leur ronde autour de sa flèche, et de toutes les maisons, des chemins verdissants, des vieux jardins clôturés, sortent lentement les fidèles qui causent bruyamment avec les « rencontres » ; les jeunes filles se groupent sur le perron, où les hommes, plus loin, « tirent une dernière touche » en attendant le curé… et on entend la maîtresse d’école, déjà installée à l’orgue, qui essaie ses accompagnements.

Et quand le curé arrive un peu essoufflé, car il est presque en retard, il frappe dans ses mains comme on fait à l’école : — Allons, mes amis, entrons, entrons, je commence le chapelet.

C’est un envolement de jupes claires dans l’escalier du jubé ; posément les fumeurs secouent la cendre de leur pipe et la mettent dans leur poche, tout en se rendant à leur place, à temps pour répondre au Credo.

C’est simple, c’est recueilli, c’est frais