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hommes dans l’inconnu, et dont nous avons peur, comme les petits enfants ont peur du noir !

La clochette s’agite et les sons se rapprochent, comme s’ils couraient un peu haletants : des maisons closes, les gens sortent et se crient : « Est-ce le vieux Michel ? » « Peut-être la petite Mélanie ? »

Ils se prosternent pendant que la voiture passe rapidement, emportant le Bon Dieu, le curé, et la lanterne qui dessine sur le chemin blanc des zigzags fantastiques.

On les entend encore quelques secondes, puis plus rien que notre angoisse, à nous qui restons, pendant que l’autre, là-bas, s’en va !

C’est le silence encore, mais un silence profond, solennel, peuplé de questions angoissantes qui ne reçoivent pas de réponses.

La vie passe rapidement, et nous amène chacun notre tour, chacun à notre heure, devant le pont redoutable jeté entre les deux mondes, et qu’il faut traverser tout seul, ne sentant plus les mains amies nous encourager, ni les cœurs aimants battre avec les nôtres.

Moi, pauvre ignorante, je ne sais rien du mystère de la mort, mais les savants et les philosophes n’en savent pas davantage. Depuis des siècles, les hommes ont voulu savoir ce que deviennent leurs morts et comment ils les reverront, mais Dieu garde ses secrets pendant que les chercheurs font des