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intime où le silence est si parfait que l’on croit entendre le glissement d’un rayon sur le tapis.

Dehors, il fait froid et le vent agite les ombres du jardin ; dedans, il fait tiède et le crépuscule fond toutes les nuances en un gris où les formes se détachent en masses sombres.

On ferme les yeux, mais sans les voir, on se sent entourée par les objets familiers qui ouatent d’accoutumance douce notre lassitude de corps et d’âme !

Finie la journée où il a fallu tant parler, tant courir, tant prévoir, tant sourire ! La chaîne des devoirs quotidiens est entière, nulle lâcheté n’en a détaché un anneau ; chacun représente un effort : il a vaillamment été fait, et on a enfin le droit de ne plus bouger, de ne plus répondre, de ne plus s’agiter ! C’est le repos enfin ! Les idées éparpillées vont se remettre en place… Tout le jour, les autres nous ont empêchées de penser : leurs questions et leurs commentaires nous arrachaient nos pensées comme si l’on nous arrachait un livre des mains.

Et maintenant dans la pièce où la lumière s’éteint, notre âme s’éclaire et se rassérène. Quand on est aux prises avec les détails fastidieux d’une journée difficile, on s’énerve et on s’exaspère, mais on se calme quand on en voit l’ensemble d’un peu loin et d’un peu haut. Ô certes ! dans ce coup d’œil, on ne se juge pas sans reproches, et nos explora-