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fourrures, et que, dans le parfum tiède des confitures de fraises, naisse notre âme d’été, indépendante et vagabonde, qui secoue les entraves et franchit les espaces…

Mes petites sœurs, je parle, pour vous seules, d’un mystère que vous seules comprenez. Car les hommes, eux, n’ont aucun souci de l’air du temps et de la couleur du ciel. Pourvu que leurs affaires aillent à leur gré il fait toujours beau temps. Et ils ont parfaitement raison, seulement, ils n’ont aucun mérite à avoir raison puisqu’ils sont ainsi faits. Et cela vient de ce qu’ils n’ont qu’une âme invariable et immuable, et elle n’est même pas toujours à la portée de la main comme la vôtre, comme la nôtre !

Quand vous aurez compris cela, vous serez plus calmes et plus heureuses. Presque toutes, vous vous bercez de l’illusion qu’ils peuvent saisir les nuances et comprendre les délicatesses et les subtilités féminines. C’est une grave erreur et la source de la plupart des malentendus humains.

Les hommes, croyez-moi, sont très positifs, très affairés, et surtout, bien plus occupés d’eux-mêmes que de vous : ils n’ont ni le temps, ni le goût de s’arrêter devant ce qu’ils ne comprennent pas : ils passent vite et disent : cela n’existe pas.

Vous seriez donc toutes des « incomprises » ? Oui, mais entendons-nous : ne sont malheureuses que les incomprises qui persistent à vouloir être comprises ! Les autres, les heu-