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la santé de leur âme ; à ceux-là je dirai que pour faire une réaction bienfaisante, il faut voir arriver chez soi, dans la tempête, une pauvre femme qui mendie parce que son mari ivrogne l’abandonne, que ses enfants crient la faim, qu’elle va accoucher bientôt dans une cabane misérable où le froid entre comme chez lui.

Voilà une histoire qui vous réveille une âme enneigée, et qui vous fait vous détester avec une ferveur telle, que, tout de suite vous voulez vous transformer et devenir utile, non à vos heures et quand ça vous chante, mais toujours, en toute saison et tous les jours.

Nous parlons de la misère et de la pauvreté, et nous en entendons parler, mais sans croire vraiment qu’il existe des êtres qui manquent de tout. Si nous y croyons, comment pouvons-nous vivre tranquilles sans jamais nous occuper d’eux ?… Si nous n’y croyons pas, allons les voir avec nos yeux, entrons dans leurs demeures, respirons leur affreuse indigence, cela nous sera salutaire.

— Que nous sommes égoïstes, plaignards et chimériques ! C’est à dégoûter de l’humanité de nous observer à certains jours ! Et pourtant, là encore, nous aurions tort : voyons-nous comment nous sommes, mais que ce soit pour essayer de nous améliorer et non pour nous décourager.

Nous ne saurions trop nous défier de la rêverie qui est presque toujours la dilata-