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se trouve comblé pour un moment. Après m’être penchée sur ces âmes pour en recueillir ce qu’elles eurent de plus délicat, de meilleur et d’immortel, je me relève attendrie et pénétrée de la valeur inestimable de la vie intérieure, mystérieuse et profonde, dont je viens de trouver l’écho dans ces pages jaunies par le temps, et qui, soudain, me mettent en contact avec ceux qu’une sorte de légende me rendait presqu’inaccessibles.

Oh ! chères lettres charmantes et fragiles, coupées dans les plis, d’où s’exhale le parfum d’un passé où l’amour, l’amitié, les épreuves, les joies sont si étrangement ressemblantes à ce que nous éprouvons nous-mêmes. Un siècle a passé sans affaiblir l’émotion arrachée à l’intimité de ces correspondants que nous appelons des ancêtres : nous nous les représentions vieux, sages, austères, et ils surgissent devant nous, jeunes, amoureux, un peu étourdis, bavards, tourmentés des mêmes passions qui nous agitent, animés des mêmes bonnes intentions, remplis des mêmes illusions, rebutés par les mêmes obstacles, désappointés par les mêmes faiblesses, si humains, si palpitants de vie, que je relis des pages entières pour essayer d’en extraire tout le mystère.

L’impression qui domine après des heures de pèlerinage parmi les âmes de ce passé familial, c’est celle d’une vie forte, à base de foi profonde qui gouverne leur vie et s’y mêle intimement et toujours.